La fête annuelle de l'entame de la saison automnale, traditionnellement tenue à T'kout, chef-lieu de daïra, à 100km au sud-est de Batna, a perdu de son essence originelle séculaire. Le visiteur de l'édition 2006 aura constaté que cette fête «à caractère socio-économique rassemblant les tribus du Grand Aurès n'est devenue, au fil du temps, qu'un souk ordinaire pour marchands ambulants de quincaillerie et confection» dixit Ammi M'hand, un vieillard de la tribu des Beni Bouslimane de T'kout, sortie de l'anonymat lors des événements de 2003 déclenchés par les jeunes du mouvement des archs. A ce titre, le président de l'APC de T'kout explique la décadence de la manifestation : «Dépourvus de moyens financiers et traumatisés par les risques sécuritaires, nous nous efforçons de maintenir la tenue de cette fête, dans l'attente de jours meilleurs». En effet, contrairement aux précédentes éditions (avant 2003), la fête qui se tient trois jours durant, fin août correspondant au début du premier mois amazigh de l'automne, regroupait les populations des Aurès qui faisaient dans le troc, tout en animant culturellement, folkloriquement et artistiquement parlant, les veillées nocturnes. «C'était un temps», répond Ammi M'hand qui retrace l'histoire. «Nos ancêtres organisaient, au tout début une zerda pour venir en pèlerinage au marabout Sidi Abdesselem dont la mosquée existe toujours» ajoutant que les gens en profitaient pour faire du troc. Dattes de Biskra contre figues sèches de la région, sel contre frik (blé vert pour la soupe), guerba, produits artisanaux...Au regard de leur culture ancestrale empreinte de ferveur et de sagesse, les érudits «Bouslimani» étaient une sorte de parlement, «Tadjemaât» qui, sur le plan social, élaboraient les législations régissant le statut de la famille (mariage, divorce...) et prenaient en charge les contentieux entre membres des tribus. «Les T'koutis étaient des notables qui réglaient tout conformément aux préceptes de l'Islam». «Comme est en train d'agir Bouteflika», insiste le vieux M'hand qui dit approuver la démarche de réconciliation. «C'est une valeur algérienne séculaire», conclut-il.