Les menaces proférées par le Groupe salafiste pour la prédication et le combat sont prises au sérieux par toutes les capitales occidentales. Des experts occidentaux ont estimé que le Gspc, qui vient de prêter allégeance à l'organisation Al Qaîda, pourrait compter sur l'apport de centaines d'hommes vivant en Europe, et dont certains pourraient passer à l'action sans que les polices locales ou les cellules chargées de la lutte antiterroriste aient pu prévenir l'action de l'attentat. Selon des déclarations faites au journal arabophone basé à Londres, Al-Charq al-Awsat, Uwe Cabrioli, qui a dirigé la cellule antisubversive à la Dgse de 1998 à 2004, affirme qu'il est certain que «le Gspc dispose de centaines de militants actifs et sympathisants dans toutes les capitales européennes». La peur qui s'est emparée subitement des capitales occidentales, notamment Paris et Washington, est un peu plus amplifiée que de mesure par les dirigeants européens pour les raisons que l'on sait, et qui ont fait maintenir, par exemple, un George Bush à la présidence malgré ses échecs manifestes, latents et successifs. Le Gspc avait perdu, entre 2002 et 2004, l'essentiel de ses membres les plus actifs en France, en Grande-Bretagne et en Espagne, et il n'est pas évident que ses réseaux se soient reconstitués avec cette vitesse. Jusque-là, le Gspc était considéré comme une organisation terroriste qui mène une guerre de type local et circonscrite, et donc, ne pouvant représenter une menace pour l'Europe ou les Etats-Unis, mais depuis dix jours, les donnes ont changé. Le Groupe salafiste pour la prédication et le combat, dont le ralliement à Al Qaîda a été annoncé par Abdelmalek Droukdel, dit Abou Mossaâb Abdelouadoud, le 11 septembre dernier, devenait soudainement une hantise pour la sécurité intérieure en France, et le ministère français de la Défense avait estimé que le Gspc pourrait constituer «une menace sérieuse» pour la France dans les prochains mois, et devenir le «bras armé» d'Oussama Ben Laden outre-Méditerranée, après les avertissements brandis par le numéro deux d'Al Qaîda, Ayman al-Zawahiri, de frapper «les croisés américains, français et leurs alliés». Cette menace directe d'Al Qaîda avait succédé à celle formulée par le chef du Gspc dans son communiqué du 11 septembre, date symbole dans l'univers du terrorisme: «Nous prêtons allégeance à cheikh Oussama Ben Laden (...). Nous poursuivrons notre djihad en Algérie. Nos soldats sont à ses ordres pour qu'il frappe par notre entremise qui il voudra et partout où il voudra. Tout en décidant de rallier Al Qaîda et de prêter allégeance à Ben Laden, nous conseillons à nos frères de tous les autres mouvements jihadistes, partout dans le monde, de ne pas manquer cette union bénie (...) L'Organisation d'Al Qaîda est la seule habilitée à regrouper tous les moudjahidine, à représenter la nation islamique et à parler en son nom», ajoute l'émir du groupe qui considère la France comme son «ennemi n°1». Aussitôt après, et dans un message vidéo répondant en écho à Abdelmalek Droukdel, al-Zawahiri a annoncé le ralliement du Gspc à son organisation et menacé la France, en affirmant que le groupe algérien serait une «épine» dans la gorge des Français. «Nous prions Dieu pour que cela soit une épine dans la gorge des croisés américains et français et de leurs alliés», a déclaré le conseiller d'Oussama Ben Laden dans cette vidéo de plus d'une heure. Les premiers extraits, appelant à frapper les pays du Golfe et Israël, avaient été diffusés à l'occasion du 5e anniversaire des attentats du 11 septembre. Le ralliement du Gspc à Al Qaîda s'est fait sur plusieurs mois, voire sur plusieurs années. L'organisation de Ben Laden faisant passer celle d'Abou Mossaâb par une sorte de «période d'essai» au bout de laquelle il a consenti à accepter ce nouvel équipier, en fait bien utile dans une région où Al Qaîda n'a jamais réussi à s'implanter sérieusement. Dans un premier enregistrement, datant d'un peu plus d'une année et dont on a pu écouter quelques extraits, Oussama Ben Laden faisait l'éloge du djihad lancé contre les Etats-Unis et les «forces du mal» et encensait certains groupes djihadistes, dont le Gspc, qu'il citait sous la formule de «nos frères en Algérie». Par la suite, Ayman Zawahri faisait aussi les louanges des frères djihadistes d'Algérie et un éloge appuyé du Gspc. Enfin, Abou Mossaâb Zarkaoui, lui, citait nommément, dans un enregistrement datant de peu avant sa mort, «le frère Abou Mossaâb Abdelouadoud» et renseignait, de ce fait, sur les liens qui soudent toutes les organisations djihadistes actuelles et la stratégie qui les unit. Pour le Gspc, il s'agit désormais de mener «une guerre sans fin», car le djihad qu'il a choisi fera encore des dégâts sur le long terme, sans qu'il soit possible, pour autant, de négocier politiquement avec des meneurs qui ont choisi un terrain résolument et absolument hiératique. Voilà où se pose actuellement le Gspc, qui semble plus à l'écoute d'Al Qaîda pour prendre des décisions qui s'imbriquent désormais dans une «guerre sacrée» transnationale, et non plus de type local.