Le gouvernement affiche une volonté d'élever les réformes au-dessus des débats idéologiques en axant son discours autour des aspects techniques et pédagogiques. Après avoir joué la carte de la temporisation, le gouvernement a réuni, samedi, son Conseil pour examiner le dossier épineux relatif à la reforme du système éducatif. Il est le premier d'un cycle de Conseils de gouvernement qui seront consacrés à l'étude du rapport Benzaghou qui, faut-il le préciser, a été remis, voilà pratiquement onze mois, à la présidence. Sans grande surprise, le gouvernement a souligné les insuffisances et les dysfonctionnements du système éducatif national «dont la refonte en profondeur devient une nécessité incontournable». Cette refonte consiste, souligne-t-on, à enrayer le phénomène de dégradation de l'école algérienne et à mettre en place les voies et moyens aptes à permettre son redressement et sa réhabilitation. L'enseignant, en sa double qualité de sujet et d'acteur principal de la réforme, constitue la clé de voûte du processus d'adaptation et de modernisation de l'école. A ce sujet, il a été indiqué le nécessité de procéder à la mise à niveau et à l'évaluation des formateurs. Au chapitre de la refonte pédagogique, le Conseil a insisté sur l'opportunité de réformer les programmes scolaires qui visent à réhabiliter et à enrichir le champ disciplinaire de l'enseignement des filières scientifiques et technologiques, de l'éducation civique, morale et religieuse, de l'histoire et de la philosophie. En évoquant l'enseignement des langues, l'on souligne en substance, cette volonté officiellement affichée de promouvoir tamazight à l'école. Cela sonne comme une réponse aux revendications soulevées par le mouvement de contestation en Kabylie. Aussi, entre-t-elle dans le cadre du processus de dialogue déclenché entre le gouvernement et les ârchs dialoguistes. De la même manière, les questions relatives au renforcement de la langue arabe et à l'ouverture sur la langue étrangère - aucune allusion au français - occupent une place de choix dans les programmes des réformes en question. Ce qui caractérise ce Conseil de gouvernement, c'est cette tendance non révélée d'aborder les grands axes liés aux réformes, sans pour autant «s'aventurer» sur les aspects idéologiques qui sont, faut-il le préciser, à l'origine d'une campagne menée tambour battant par le courant islamo-conservateur qui se fixe comme objectif primordial de freiner, vaille que vaille, les réformes contenues dans le rapport Benzaghou. On citera, à titre d'exemple, la «coordination nationale pour une école authentique et ouverte», présidée par l'ex-ministre de l'Education nationale, Benmohamed dont font partie plusieurs cadres islamistes issus des partis politiques tels le MSP et Ennahda, etc. estimant que «ces réformes constituent une atteinte dangereuse à l'identité et aux préceptes de l'Islam». Ce courant a formulé des critiques virulentes à l'égard du chapitre relatif à l'enseignement des langues étrangères, notamment le français pour les élèves de la deuxième année primaire et l'anglais qui entrerait, lui aussi, dans le cycle primaire. Les observateurs laissent présager qu'à travers la position adoptée, le gouvernement affiche une volonté d'élever les réformes au-dessus des débats idéologiques en axant son discours autour des aspects techniques et pédagogiques. Tout compte fait, le Conseil de gouvernement de samedi constitue un message clair à l'endroit du courant islamo-conservateur, qui avait cru remporter la bataille de l'école.