«Manger ou se divertir», tel est, en substance, le dilemme imposé aux Souk-Ahrassiens en ce Ramadhan 2006 qui renvoie, à coup de léthargie languissante, l'image d'un pathétique et non moins immense désert culturel. Les veillées ramadhanesques à Souk Ahras, loin de constituer un passe-temps agréable, sont perçues par la majorité des jeunes, comme des moments d'ennui, excepté les cafés, pour d'interminables parties de dominos, ces derniers n'ont pas où aller. Les trois salles de cinéma dont dispose la municipalité du chef-lieu de wilaya, sont fermées depuis belle lurette, ne permettant ni projection de films ni animation de soirées musicales. Il faut le dire, la première quinzaine du mois sacré a, dans ce contexte, consacré le règne de l'apathie et de la somnolence, un vrai vide culturel, même pas une pièce théâtrale montée pour tenter de secouer le cocotier et de faire illusion, une vaine vacuité qui caractérise les veillées ramadhanesques. En somme, l'animation est la grande absente durant ce mois sacré habillé du souci de donner «d'abord et avant tout» à manger aux démunis, ce qui est louable en soi, l'abstinence décrétée par les pouvoirs publics locaux en matière de divertissement, sonne, toutefois, comme une flagellation infligée aux citoyens «invités» à prolonger le jeûne stomacal par un autre récréatif en reconnaissant que l'argent disponible a servi à nourrir les pauvres; aussi bien la commune que la wilaya, tentent de faire diversion. Partout ailleurs en Algérie, on allie dans une parfaite synergie les impératifs du ventre et ceux de l'esprit. Pourquoi ne serait-ce pas le cas à Souk-Ahras? Les comités des fêtes communal et wilayal. De vraies coquilles sans âme, soit dit au passage, ne bénéficient-ils pas de crédits servant justement à l'animation culturelle? Le président d'APC de Souk Ahras, interrogé à ce propos, nous a donné une réponse dilatoire, arguant: «Nous avons consommé une manne d'argent conséquente pour les repas et les couffins et c'est le maximum que nous pouvions faire eu égard à nos moyens financiers». Avouons que cette reprise revêtait un caractère cocasse et ridicule à la fois, car prenant acte de cette déclaration, on comprendra que le côté culturel est relégué au second plan, ce qui prête à penser qu'il y a un abîme entre les deux générations dans la conception des choses, car chacun des deux protagonistes voit les choses à l'aune de sa propre lucarne et c'est là le noeud gordien du problème.