Le groupe salafiste pour la prédication et le combat est perçu aujourd'hui comme l'unique force de frappe capable de mettre en péril la région saharo-sahélienne. Une importante délégation du comité antiterroriste des Nations unies est, ces jours-ci, en visite de travail dans le nord du Mali. Dirigée par Javier Ruperez, directeur exécutif du comité, la mission comprend, outre les experts de la direction, les représentants du Centre africain d'études et de recherches sur le terrorisme de la Cedeao, d'Interpol, de l'Organisation mondiale des douanes et de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime. Priorité sera donnée aux questions liées au terrorisme, et à la Résolution 1373 (2001) qui demande aux Etats membres d'adopter un certain nombre de mesures afin de renforcer leur capacité à lutter contre le terrorisme. Initiées en 2005, ces visites ont couvert plusieurs pays dont le Kenya, le Maroc, la Tanzanie, l'Algérie et l'Albanie. Un rapport d'évaluation des besoins en matière d'assistance technique est élaboré à l'issue de chaque visite, et c'est sur la base de ce rapport que la direction exécutive travaille avec les pays donateurs et les organisations régionales et internationales afin de faciliter la délivrance d'assistance technique complémentaire dans les domaines identifiés. Bien sûr, le Gspc semble être derrière toute cette activité américaine dans le Sahel, après le regain de violence constaté dans ce pays. Kidal.info a annoncé, le 1er octobre dernier, qu'un «accrochage mortel entre des éléments de l'Alliance et la direction militaire du résidant au Sahara», a eu lieu, le 27 septembre dernier, dans le nord du Mali. Il en est résulté «la mort des trois principaux chefs dont le remplaçant de El-Para». Kidal.info qualifie cet accrochage de «guerre contre le Gspc». Tessalit.info confirme l'information et annonce que les combats ont eu lieu en milieu de journée. «Le bilan actuel est de quatre morts du côté du Gspc, et d'un blessé du côté de l'Alliance. Les membres du Gspc survivants reflueraient en Algérie sous la pression des forces de l'Alliance démocratique», précise Tessalit.Info qui confirme que «le nouveau chef du Gspc pour le Sahara est parmi le nombre des tués». Par la suite, il s'est avéré qu'il s'agissait d'un dirigeant du Groupe salafiste pour la prédication et le combat connu sous les noms de Abdel Hamid et Abohola, et qui a été tué en fin septembre au Mali, lors de l'accrochage avec l'armée régulière de Bamako. Les propos tenus par l'Alliance alors étaient du genre: «Nous avons combattu les gens du Gspc pour montrer que nous ne sommes liés ni de près ni de loin au terrorisme, et nous venons de tuer leur numéro deux (pour la zone 9 du Gspc) au cours de l'accrochage», avait déclaré le porte-parole de l'ex-rébellion targuie. Selon lui, l'accrochage entre ex-rebelles et membres du groupe algérien s'est déroulé fin septembre. Donnant plus de détails concernent le chef terroriste tué, il affirme: «Connu sous plusieurs noms, notamment Abdel Hamid et Abohola», il «était le numéro deux du Gspc dans le sud de l'Algérie après Mokhtar Belmokhtar. Mais les deux ne s'entendaient plus. Ils sont tous deux des terroristes». Les combats ont eu lieu sur le territoire malien. Il n'y a eu aucune victime dans nos rangs. Les éléments du Gspc ne voulaient pas quitter notre territoire, et nous étions obligés de les faire partir, avait également ajouté le porte-parole. Selon plusieurs sources, dont l'ex-rébellion targuie, le corps du dirigeant salafiste tué a été transporté dans la ville algérienne de Bordj. Des observateurs de la région, le gouvernement algérien a très probablement encouragé les ex-rebelles touareg maliens à débarrasser la zone de ces «hôtes encombrants». Le 30 juin 2005, au moins treize islamistes armés avaient été tués par l'armée algérienne lors d'une opération à la frontière avec le Mali contre une colonne de véhicules du Gspc. Les accrochages épisodiques qui sont menés dans le nord du Mali par le Gspc contre les autorités maliennes depuis au moins l'été 2005, si l'on se réfère à la cassette vidéo mise sur le web par le groupe algérien, commencent à agacer l'autorité centrale, déjà confrontée aux Touareg rebelles locaux. Mais, la nouvelle donne dans ces incursions, dont on ne connaît pas encore de manière claire les objectifs politiques, a aussi son revers, si l'on s'appuie sur une analyse faite par le site Afibone-Mali. Selon cette lecture, la donne est interprétée non seulement comme une main tendue de l'Alliance à l'endroit des autorités algériennes mais aussi et surtout une rupture avec l'attitude d'indifférence face aux incursions des groupes terroristes islamistes sur le territoire malien. Côté Gspc, on reste dans le flou total, et aucune analyse sérieuse ne peut nous dire à quoi riment ses incursions dans le sud du Mali et quels sont les objectifs (s'ils existent) à atteindre à terme dans cette confrontation qui ne semble pas en avoir. Les appuis que le Gspc possède au Mali sont essentiels pour son repli et il est étonnant de constater que par ses incursions épisodiques, il risque de compromettre gravement sa stratégie dans la région. Les incursions menées par ses troupes au Mali et en Mauritanie, renseignent sur la stratégie peu visible, parce que possédant des moyens limités, mais facilement «décodables» du groupe salafiste pour la prédication et le combat. Après avoir fait une sorte d'OPA sur tous les groupes armés à l'est et à l'ouest du pays, le Sud étant acquis depuis 1997, le Gspc cherche à se restructurer et à se donner les moyens de tenir le plus longtemps possible, dans une guerre de laquelle il ne veut pas sortir pour le moment. Il est certain qu'une partie de l'argent généré par le groupe de Belmokhtar va vers des appuis locaux, sans lesquels il est, pour ainsi dire, pratiquement impossible au Gspc de survivre dans un environnement hostile et qu'il connaît à peine. Cela avait été vérifié lors de la prise d'otages des trente-deux touristes européens, en mars 2003. La question qui se pose alors est celle-ci: le Gspc a-t-il opéré des attaques par le passé pour conforter l'Alliance du Nord ou s'agit-il d'une petite mise en scène de l'Alliance pour lancer des messages à Bamako et dire qu'elle s'occupe à «nettoyer» les lieux de toute présence malvenue? Les alliés algéro-maliens qui forment le groupe de combat au nord du Mali sont-ils devenus tout à coup encombrants pour l'Alliance? Quelles que soient les réponses, ce sont bel et bien les experts militaires de Washington qui semblent profiter d'une situation, dont eux seuls, maîtrisent les contours et les visées.