La polémique sur la question du voile a atteint l'Italie qui, à son tour, s'interroge. On sait que la question met en effervescence l'Europe depuis de très longues années. On sait aussi que cela a commencé en France durant les années noires du terrorisme, on se souvient de tous les écrits de la presse française, autour de ce sujet, dit «affaire du foulard islamique». Conséquence: toutes ces jeunes filles, d'origine musulmane, refoulées devant la porte de l'école, parce qu'elles se couvraient la tête. Aujourd'hui, parait-il, qu'en métropole, depuis la loi de 2004 bannissant le port du voile à l'école, tout est rentré -plus ou moins- dans l'ordre, parce qu'aucune jeune écolière ne le porte en classe. La France est contente, la France se porte mieux. Mais voilà que l'affaire du voile est passée de la France à l'Angleterre de Tony Blair, où le Premier ministre dénonce «ce signe de séparation entre les communautés», et s'interroge sur l'intégration des minorités. «Il y a une vraie question au sujet de l'intégration, et que nous devons mener ce débat», indique-t-il encore. Qu'est-ce qui a fait changer d'avis Blair qui, quelques jours auparavant, ne voulait pas se laisser entraîner dans le débat sur le port du voile islamique, après avoir fait dire par son porte-parole, que «ces questions sont des questions d'opinion personnelle, pas de politique gouvernementale». Pourquoi ce retour au premier plan d'un sujet qui agite aujourd'hui et maintenant, l'Europe, un débat devenu le passe-temps favori pour certains pays européens en manque d'idées plus conviviales. Le fait est que le voile inquiète aujourd'hui les nations de l'Union européenne et fait les choux gras aux Pays-Bas, en Suisse, en Italie... En Italie, une fièvre particulière s'est emparée ces jours-ci du public ayant pour sujet la question du voile, après une belliqueuse querelle entre une députée de droite de l'Alliance nationale, Daniela Santanchè et l'imam de la mosquée de Segrate près de Milan, Ali Abu Shawaima. Incident télévisé au sujet des musulmanes qui portent le voile, où la députée a été durement prise à partie et traitée «d'ignorante» par l'imam qui «ne permet pas aux ignorants de parler de l'islam» et «d'infidèle» parce qu'elle contredisait les thèses de l'imam qui affirmait que «le voile est une obligation de Dieu. Ceux qui n'y croient pas ne sont pas des musulmans» et la députée qui répliquait que «le port du voile n'était pas une prescription du Coran». Thème de grande sensibilité et débat de sourds. La parlementaire est sous protection policière, après que les déclarations de l'imam eurent été jugées menaçantes. Cet échange de violence verbale a provoqué de vives réactions dans la sphère politique italienne, où la ministre de la Parité, Barbara Pollastrini (de la gauche au pouvoir) apportant sa solidarité à la députée, a déclaré que «la députée a exprimé son opinion sur le voile et un verset du Coran. Nous sommes dans un pays démocratique. M.Shawaima doit savoir que dans notre pays, les menaces, les intimidations, les condamnations ne sont pas acceptables». Daniela Santanchè a récemment publié un livre très critique sur les conditions de vie des femmes musulmanes intitulée La femme niée. Le débat sur le voile islamique a fait irruption en Italie, où vivent presque un million de musulmans, après une déclaration du président du Conseil, Romano Prodi, mardi dernier, à un journaliste de l'agence Reuter. «Si une femme veut porter le voile, très bien, mais il faut qu'elle soit visible» et «donc ne pas cacher son visage» qui ajoute, «si elles veulent vraiment s'intégrer et faire partie du futur de l'Italie» a déclaré le chef du gouvernement, interrogé sur le sujet de la controverse en Grande-Bretagne. Débat donc enflammé dans une polémique qui prend de plus en plus de l'ampleur, où la politique ne veut pas rester en marge, où les politiciens des deux bords insistent sur «l'intégration» des musulmans. Que la question du voile, devenant l'enjeu du moment, est même arrivée sur la table du Parlement et le président du Sénat, Franco Marini, a annoncé que le thème du voile sera discuté car, explique-t-il, «est arrivée l'urgence de discuter de l'argument». Mais, nombreux sont les députés et sénateurs de la droite italienne qui excipent d'une loi qui interdit le port du voile. La gauche au pouvoir va-t-elle suivre cette nouvelle inquisition?