Bien avant la révolution castriste, les écrits de Marti, qui datent de la moitié à la fin du XIXe siècle, ont forgé les esprits et tracé la voie de la libération pour les peuples latino-américains encore sous le joug espagnol, mais plus sûrement sous l'emprise du nouvel hégémonisme américain. En fait, c'est singulièrement contre l'hégémonie américaine que s'est levé José Marti, avec lui ceux ayant acquis la conviction qu'il n'y avait pas d'autre alternative que de combattre pour leur indépendance et leur liberté. José Marti (1853-1895), qui a théorisé le concept de lutte populaire, était un des chefs de file de la Révolution et dénonçait déjà en son temps, l'hégémonisme américain en Amérique latine, se mettant au service des peuples hispaniques. Par ses écrits et son engagement total pour l'indépendance, il devint en fait le symbole de la lutte de l'Amérique hispanique pour son unité et sa liberté. Marti a fait à Cuba ce que Simon Bolivar (1783-1830) a fait avant lui au Venezuela en proclamant en 1811 l'indépendance de ce pays alors occupé par l'Espagne. C'est dans cette Amérique latine marquée par les idées révolutionnaires de Simon Bolivar, notamment, que José Marti a, de son côté, théorisé le combat libérateur. C'est ainsi qu'il eut à exposer ses idées dans des lettres qui sont réunies en recueil sous le titre Penser, c'est servir que l'Anep a eu l'initiative de rééditer. Puisant de sa longue expérience dans les luttes pour la liberté et pour le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, José Marti en a tiré un certain nombre de principes et théories propres à impulser le combat révolutionnaire. C'est ainsi qu'à quelques mois de son décès en 1895, il a écrit dans Le Manifeste de Montecristi des lignes d'une étonnante actualité quand on regarde les errances qu'ont connues des Révolutions par ailleurs victorieuses en soulignant que «la difficulté majeure des guerres d'indépendance en Amérique et des nations nouvelles, à leur début, résident plus dans les dissensions entre leurs héros, plus que dans le prurit d'émulation et de méfiance inhérent au coeur de l'homme, dans l'absence au moment opportun d'une forme susceptible de contenir l'esprit de rédemption qui, appuyé sur d'autres énergies secondaires, déclenche et alimente la guerre (...)». Ce que, en effet, l'on a observé dans les guerres de libération modernes du XXe siècle. C'est dire l'importance des témoignages de cet intellectuel «immense», écrira M.Bouteflika dans sa préface en indiquant que le Cubain José Marti énonce de manière lapidaire l'axe de la renaissance civilisationnelle des peuples d'Amérique latine et sa formule est généralisable à l'ensemble des peuples colonisés quelle que soit leur appartenance civilisationnelle: «Que l'on greffe le monde sur nos républiques, soit; mais le tronc doit rester celui de nos républiques».