Le procès des assassins des sept marins italiens dans le port de Jijel en 1994 a été reporté pour «absence de la partie civile». Cette absence a fait réagir l'ambassade d'Italie en Algérie à travers un diplomate qui a indiqué que «le gouvernement italien a toujours fait confiance à la justice algérienne et souhaité que les coupables soient traduits en justice» tout en exprimant sa «surprise de l'absence de la partie civile qui n'est pas une raison suffisante pour reporter le procès». Les Italiens estiment que «l'action pénale doit être poursuivie» pour que les coupables soient rejugés. La surprise italienne est liée au fait que l'affaire des sept marins de Jijel est «une affaire sensible», de l'aveu même de ce diplomate, et qu'elle demeure ancrée dans la mémoire des Italiens comme en témoigne un récent article rappelant l'affaire des sept marins après la mort d'Antar Zouabri. Lors du premier procès, 16 prévenus ont comparu et ont été condamnés à des peines diverses. Quatre terroristes du GIA ont été condamnés à la peine capitale par contumace, un autre à perpétuité, deux autres à dix et cinq années de réclusion et 9 autres ont été acquittés. Ils avaient alors répondu à des chefs d'inculpation assez lourds dont «homicide volontaire avec préméditation», «vol qualifié» et «appartenance à une organisation terroriste» en l'occurrence le GIA dirigé, alors, par l'émir national Djamel Zitouni qui avait commandité la campagne d'assassinats des étrangers en Algérie. Or, le parquet de Jijel avait interjeté appel pour un second procès. La défense des accusés a introduit une requête pour la comparution d'un mis en cause dans cette affaire qui n'est autre que Chaâbane Derra, un terroriste du GIA de la région de Jijel qui avait participé au massacre des sept marins italiens. Derra avait indiqué aux enquêteurs les détails de cette horrible nuit du 6 au 7 juillet 94, lorsque un commando terroriste a réussi à monter sur le cargo au port de Djendjen et à exécuter à l'arme blanche sept marins italiens dans leur sommeil. Depuis le premier procès, seulement deux terroristes sont en prison. Si les avocats de la défense semblent avoir été satisfaits du premier verdict, le parquet de Jijel a obtenu qu'un second procès se tienne pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire qui avait empoisonné les relations algéro-italiennes durant près de quatre années. L'assassinat des sept marins italiens avait provoqué, de par la méthode employée et «l'audace» des terroristes, une hémorragie diplomatique, puisque de nombreuses chancelleries étrangères ont décidé de fermer leurs portes face à l'augmentation des assassinats d'étrangers. L'Italie avait déjà perdu, en décembre 1993, Aniello Castaldo, un dirigeant d'une société mixte algéro-italienne, assassiné à Birkhadem. Les intérêts italiens ont été également ciblés puisque trois employés de la société italienne Sadelmi, ont été égorgés à Frenda (Tiaret). Mais même dans ce contexte agité, le gouvernement italien n'avait pas paniqué, à l'inverse d'autres pays européens, et avait maintenu une présence consulaire appréciable et encouragé ses investisseurs à demeurer en contact avec les opérateurs économiques algériens. Comme pouvait en témoigner le refus de la Sacce (société d'assurances italienne). Mais l'affaire des sept marins tués à Djendjen a provoqué un tel émoi à Rome que les relations avec Alger s'étaient quelque peu dégradées jusqu'à la rencontre entre les deux anciens Premiers ministres algérien, Ahmed Ouyahia et italien, Lamberto Dini. Certaines voix en Italie et en France avaient accusé le gouvernement algérien de négligences dans la protection des étrangers. Une attitude qu'Alger a réfutée d'où l'obstination actuelle de la justice algérienne de faire toute la lumière sur cette affaire en exigeant un second procès. Reste que l'absence de la partie civile prête à diverses interprétations et intrigue les Italiens qui n'avaient pas, pour leur part, déposé plainte, mais juste appuyé les poursuites du parquet algérien.