Les sociétés étrangères proposent jusqu'à 16 fois le salaire qu'offre la compagnie nationale à ses cadres. M.Lakhdar Badreddine, secrétaire national chargé des affaires économiques, affilié à l'Ugta, a mis, hier, au défi le ministre de l'Energie M.Chakib Khelil, au sujet de la saignée des cadres de Sonatrach. «Ils sont bel et bien plus de 2000 cadres ayant quitté la société nationale en quête d'une rémunération beaucoup plus attractive, proposée par les compagnies étrangères», a-t-il déclaré hier, dans son intervention au Forum du quotidien El Moudjahid. Ce dernier a remis en cause les chiffres communiqués par le ministre, dimanche sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, faisant état du départ de 40 cadres «au plus». «Les statistiques du ministre sont erronées. Elles ne reflètent nullement la réalité.» Khelil aurait dû, selon ce syndicaliste, multiplier ce chiffre par 50. «Je dispose, atteste-t-il, d'une liste des 75 cadres ayant démissionné de l'entreprise Hyproc (société de transport des hydrocarbures). Cela représente deux fois le chiffre évoqué par le ministre de l'Energie. Cela concerne uniquement une seule société. Ce constat est plus grave pour le reste des filiales activant dans le secteur de l'énergie». Interrogé sur les raisons de cette «hémorragie» qui touche les compagnies nationales, le représentant de l'Ugta qualifie la situation de «tout à fait normale et prévisible». Et pour cause, «l'on ne peut reprocher à un cadre son ambition, la plus légitime, d'améliorer ses conditions de vie». «Comment convaincre ces derniers de travailler à Sonatrach, au moment où les compagnies étrangères paient ces cadres en euros?», s'est-il interrogé. Selon lui, il est plus qu'urgent de réviser le système salarial, en l'orientant vers la rémunération selon les compétences. Dans ce cadre, nous avons appris que la direction de Sonatrach et le syndicat d'entreprise ont procédé hier, à la signature de la convention portant le nouveau barème des salaires. Approché en marge de la conférence-débat, M.Laâmouri, secrétaire général du syndicat d'entreprise, a affirmé que «cette augmentation touchera tous les travailleurs de Sonatrach». Il ajoute que «les métiers de base ressentiront particulièrement l'effet de cette réévaluation des salaires puisque ils ont bénéficié d'une augmentation très conséquente». L'accord qui prendra effet à compter du mois de janvier, «sera une bouffée d'oxygène pour des dizaines de milliers de travailleurs. Il interviendra à la suite de la signature des conventions de branche arrêtées lors de la dernière tripartite». Les augmentations ont fait, à en croire M.Laâmouri, l'objet d'une étude approfondie. Cela va-t-il stopper la saignée des cadres de Sonatrach? Notre interlocuteur est sceptique. «Les sociétés étrangères proposent parfois 16 fois le salaire que nous offrons à nos cadres», souligne-t-il. Dans un autre chapitre, M.Badreddine a reconnu que les dernières augmentations de salaires sont «insuffisantes». «Cette augmentation n'est pas ressentie par les citoyens pour plusieurs raisons. Je citerai de prime abord, la non-abrogation de l'article 87». Tout en avouant que l'Ugta «a fait le maximum», durant les négociations. Le pouvoir d'achat des Algériens reste et restera faible, souligne-il, sachant que face à ces augmentations, l'on enregistre la libéralisation parfois irrationnelle et non régulée des prix des aliments de base et des services. La solution réside, selon lui, dans la «réévaluation du dinar». «Aucune augmentation ne sera ressentie si les pouvoirs publics ne procèdent pas à la révision de la valeur de la monnaie nationale» insiste-t-il.