Personnalité incontournable d'un probable dialogue algéro-français, Dominique de Villepin a fait, hier, une sortie médiatique particulièrement intéressante. L'ancien Premier ministre de Jacques Chirac a choisi la chaîne de télévision publique Al24 News pour faire d'importantes révélations sur l'attitude de responsables français par rapport à la crise algéro-française. Il a ainsi affirmé qu'il existait chez des personnalités françaises du pouvoir «un grand espoir de dépasser cette crise avec l'Algérie». Le diplomate, qui sait peser chaque mot, a certainement mesuré la véracité de ses propos. L'optimisme dont il a fait montre s'explique par «des efforts qui sont faits». Il y a donc des initiatives en haut lieu. Le message délivré par le président Tebboune dans l'entretien qu'il a accordé au journal français l'Opinion a visiblement été bien reçu à l'Elysée. «Cela va dans le bon sens», a confirmé Dominique de Villepin, qui confie à la télévision algérienne : «Ce que je peux dire, sur la base de mes rencontres avec de nombreux responsables en France, que ce soit dans les milieux politiques ou économiques, c'est qu'il y a une grande attente et un grand espoir de parvenir à des solutions.» Cela revient à dire que l'agitation de l'extrême droite française a, certes, un écho médiatique, mais demeure très critiquée dans les milieux politiques et économiques responsables. Le diplomate chevronné n'a apporté aucune précision sur l'identité de ses interlocuteurs français, mais l'on peut supposer, au regard de la réputation dont jouit l'ancien Premier ministre français, que ces derniers sont crédibles. «Je sais que chaque partie est prête à faire sa part», a dit Dominique de Villepin, allusion certainement à une disponibilité algérienne au dialogue, d'ailleurs déjà exprimée par le président Tebboune. Les deux hommes se rejoignent sur un point, celui de ne jamais accorder aux tenants de l'extrême droite le statut d'interlocuteurs dans les relations entre l'Algérie et la France. Cela étant entendu, «nous sommes tous prêts à travailler pour surmonter les divergences actuelles et rouvrir les canaux de dialogue et de coopération», a-t-il encore affirmé. Il reste que l'espoir doit être accompagné de «bonne volonté». Celle-ci «doit être le moteur qui nous guide», soutient Dominique de Villepin. «C'est pourquoi je souhaite sincèrement que nous puissions bientôt progresser», a-t-il révélé. La précision de cette déclaration et l'échéance rapprochée qu'elle sous-tend amènent à penser qu'un travail de fond a bel et bien été effectué pour aplanir les différends entre Alger et Paris. Et l'ancien Premier ministre français de préciser : «Je vois déjà des mouvements dans ce sens, et c'est pourquoi je veux croire que bientôt nous pourrons avancer ensemble.» Cette affirmation ne fait pas de De Villepin un «médiateur», a-t-il assuré, mais ne l'empêche pas d'insister sur le fait qu'il faut tout mettre en œuvre pour dénouer la crise. «C'est du moins ce à quoi je m'engage de par ma position.» Une position qui le met visiblement au centre de l'équation algéro-française, sans en faire pour autant un acteur actif, à ce qu'il affirme. Il reste qu'il apporte un véritable discours d'apaisement. Et il ne le développe pas sans arguments. Aussi, en déclarant avoir «lu attentivement l'interview du président Tebboune», le diplomate suggère avoir lu entre les lignes. «Je vois qu'il y a des mouvements, et je voudrais dire qu'ils vont dans le bon sens», a-t-il signalé. L'optimisme de Dominique de Villepin tranche avec le climat délétère qui règne entre les deux pays. Mais cela ne semble pas décourager l'homme qui affirme croire à l'ouverture d'une nouvelle page dans la relation bilatérale. «Le plus important est de se concentrer sur ce qui nous attend et sur ce qui doit être accompli pour notre jeunesse et pour nos peuples et que cela nous incite à regarder vers l'avenir et à aborder les aspects difficiles et douloureux dans un esprit constructif.» Tout cela répond à l'acharnement de l'extrême droite et démontre qu'il demeure en France des forces politiques qui œuvrent à un rapprochement avec l'Algérie, notamment sur la question mémorielle, dont De villepin a estimé «nécessaire de réorienter l'attention vers la reconnaissance de l'histoire tragique». Il y a dans cette déclaration un accord avec le propos du président Tebboune sur le sujet. «Cela doit être fait sans aucun doute», conclut le Premier ministre sous Chirac qui semble parler en connaissance de cause.