Ahmed Taleb Ibrahimi est une figure algérienne qui incarne la fraternité algéro-tunisienne. La Fondation tunisienne Temimi pour la recherche scientifique et l'information a choisi de mettre à l'honneur l'ancien ministre des Affaires étrangères pour souligner l'«esprit de fraternité tuniso-algérienne». Elle a organisé, hier à Tunis, une rencontre dédiée à cet homme, militant et responsable politique algérien. Le choix du Dr Ahmed Taleb Ibrahimi n'est manifestement pas anodin. Son parcours dans le mouvement national, son engagement pour l'indépendance de l'Algérie et son action au sein des institutions de l'Etat algérien en font une personnalité de premier plan. Son action à la tête de la diplomatie algérienne fut remarquable et couronnée de nombreux succès. Il y a lieu de souligner que lorsque le Traité de concorde et de fraternité algéro-tunisien fut signé, Ahmed Taleb Ibrahimi était ministre des Affaires étrangères. C'est dire toute l'opportunité de cette personnalité pour célébrer cette fraternité. Il a contribué à la décolonisation des pays africains, notamment ceux sous domination portugaise. Il a traduit de la manière la plus claire le soutien indéfectible de l'Algérie aux causes palestinienne et sahraouie. Ahmed Taleb Ibrahimi fut un ministre respecté et écouté dans toute la nation arabe. Il a véritablement marqué de son empreinte la diplomatie algérienne. Successeur du défunt Seddik Benyahia, il a porté haut la voix de l'Algérie dans tous les fora internationaux. Si les Tunisiens, et notamment les animateurs de la Fondation Temini, se souviennent de l'homme pour son action dans la consolidation de l'amitié algéro-tunisienne, Ahmed Taleb Ibrahimi était aussi un diplomate connu dont les compétences étaient reconnues sur toute la planète. Cela pour dire que pour rendre «hommage aux martyrs et au combat commun» des deux pays, la Fondation tunisienne a opté pour l'Algérien qui représente le mieux cet esprit de fraternité, d'autant qu'Ahmed Taleb Ibrahimi a été l'un des artisans d'une amitié qui n'a jamais été démentie, avant et après les indépendances des deux pays. C'est pour cette raison que la rencontre vise à souligner «le développement et le partenariat dans tous les domaines» entre l'Algérie et la Tunisie. Cet événement, à la fois politique et historique, en ce sens qu'il n'a visiblement pas de précédent, a rassemblé des personnalités proches du Dr Ibrahimi. Les participants comprenaient des chercheurs, des journalistes, ainsi que des diplomates algériens et tunisiens, mais également d'autres personnalités qui, sans avoir approché l'ancien ministre des Affaires étrangères, connaissaient son parcours ou avaient lu ses ouvrages. La rencontre a permis de mettre en lumière des aspects très intéressants de la personnalité et de l'oeuvre du Dr Ibrahimi, encore quelque peu méconnus en raison de sa grande discrétion. Cet homme, intellectuel, penseur, brillant diplomate et grand militant, a longtemps interagi avec ses camarades dans l'oeuvre d'édification de l'Etat algérien, mais également dans le raffermissement de la fraternité algéro-tunisienne. L'avènement du multipartisme n'a pas freiné son élan, bien au contraire. Il n'a eu aucun mal à dialoguer avec les nouveaux venus sur la scène politique algérienne, à initier un parti politique, à participer à l'élection présidentielle, mais surtout à prendre une part active au débat, en optant pour la discrétion qui reste sa marque de fabrique. Il n'a, pour ainsi dire, jamais cessé d'être un militant de l'Algérie, qu'il a défendue en toutes circonstances. Jusqu'à son retrait de la vie politique active, Ahmed Taleb Ibrahimi a toujours placé l'Algérie au-dessus de toute autre considération. Ce sont là les appréciations des intervenants présents lors de la rencontre. Les conférenciers étaient, hier, enthousiastes et nombreux. Les Algériens Brahim Zedour, Djamel Yahiaoui et Othman Lahyani ont, tour à tour, dépeint l'homme, ses différentes facettes, son parcours au sein de l'Ugema qu'il a présidée, ainsi que ses actions en tant que ministre de la République durant une période très importante pour l'Algérie. Les grandes décisions historiques, telles que la nationalisation des hydrocarbures, la médecine gratuite et la démocratisation de l'enseignement témoignent du fait que le Dr Ibrahimi aura été un grand témoin d'une époque bénie de l'Algérie révolutionnaire. Ce qui renforce la pertinence de son rôle d'acteur et de témoin privilégié de la naissance d'une nation, c'est son regard rationnel sur les succès et les échecs de l'Algérie. Les conférenciers ont évoqué son autobiographie, enrichie par une analyse sans concession du passé et du présent de l'Algérie. L'amour du pays se ressent dans ses écrits, et les conférenciers l'ont perçu comme une belle contribution à cette Algérie que les Algériens et les Tunisiens présents dans la salle estiment à la hauteur de sa grandeur. Les Tunisiens Abdeljelil Temimi, Mohamed Dhaifallah, Rachid Khchana, Kamel Ben Younes, Abdelatif Al-Farati, Bachir Jouini, Asia Atrous et Nawfel Salama n'étaient pas en reste dans la description de la vie et de l'oeuvre d'Ahmed Taleb Ibrahimi. Ils ont montré une grande maîtrise de sa biographie et une aptitude assez rare, faut-il le souligner, à appréhender le fait historique, la Révolution algérienne et le système politique où a évolué l'ancien ministre des Affaires étrangères. Tout compte fait, l'hommage rendu à Ahmed Taleb Ibrahimi était celui de l'amitié algéro-tunisienne. Dans la salle, les nombreux présents ont compris le sens profond de cette rencontre et toute l'importance d'un homme discret, certes, mais qui fut longtemps décisif dans le parcours de son pays.