Il vient se ressourcer sur cette terre d'où il puise ses racines et dont il s'est toujours revendiqué. Le grand jour est arrivé, Zinedine Zidane sera, aujourd'hui, parmi nous. Celui que la planète entière a érigé en une idole retourne dans le pays de ses racines, sur les terres qui ont vu naître ses géniteurs et pour lesquelles il s'était fait la promesse de venir les découvrir. Zidane en Algérie, c'est l'événement de cette fin d'année, celui que des millions de citoyens de ce pays attendaient comme on le ferait pour le retour de l'enfant prodigue. Interviewé par un magazine espagnol juste avant le Mondial que l'Allemagne allait accueillir, il avait eu cette réponse à la question qui lui demandait s'il avait un rêve qu'il voudrait voir se réaliser une fois sa retraite de footballeur entamée: «Oui aller dans mon pays d'origine avec mon papa. Voilà, c'est une chose qui me tient à coeur et que je réaliserai. L'emmener là où il a grandi, dans le village de Bejaïa, dans la montagne, où il était gardien de moutons». Ce rêve-là est sur le point de devenir réalité. Il va venir et il ira à Béjaïa puis dans le village d'Aguemoun celui de ses ancêtres. Il sentira l'air frais de cette montagne de Kabylie, il verra au loin Yemma Gouraya, gardienne ancestrale de la région béjaouie. Il se ressourcera sur cette terre d'où il puise ses racines et dont il s'est toujours revendiqué. «Ce que j'ai particulièrement aimé en lui, c'est qu'il n'a jamais renié ses origines» disait à son sujet, son entraîneur Marcello Lippi, lorsqu'il jouait à la Juventus de Turin. «Il aime se retremper dans l'ambiance du pays de ses parents et de ses ancêtres, ajoutait-il. Ici à Turin, il lui arrive souvent de faire un tour en ville et d'aller prendre un pot dans un café fréquenté par des Algériens. C'est aussi avec des Algériens qu'il aimait faire de petites parties de football après les entraînements. L'entraîneur que je suis n'apprécie pas tellement cette pratique, mais je ne le heurte jamais. Je sais qu'il agit en professionnel et qu'il n'exagère pas. Quand je passe et que je le vois jouer, je lui dis ´´Zizou, il ne faut pas trop tarder. Il faut récupérer´´´. Il me comprenait cinq sur cinq». Il prolongeait, ainsi, le rituel de la Castellane, le quartier de son enfance où tout gamin il disputait d'interminables rencontres de football avec ses potes. Ce football qui l'a enrichi mais pour lequel il s'est énormément sacrifié. «Quand j'étais gamin, disait-il dans l'interview accordée au magazine espagnol, on était une dizaine de copains à jouer au foot ensemble tous les jours. Ce qui faisait la différence entre nous, c'est que moi, je n'avais que ça en tête. Mes copains aimaient beaucoup le foot, mais ils aimaient aussi aller au cinéma, sortir avec des copines. Moi, c'était le foot, le foot, le foot. Je ne réussissais pas dans mes études et je n'avais que le foot en tête. Je me suis dit: Si je ne fais pas d'études, il faut que je fasse ça, mais il faut que je le fasse à fond. J'avais compris que quand on veut vraiment quelque chose, il ne faut rien laisser au hasard, ne pas se laisser perturber par d'autres désirs». A Turin, c'était une star mais il ne se démarquait pas de ce qu'il aimait faire lorsqu'il n'était qu'un anonyme parmi d'autres anonymes. Il est loin le temps où l'enfant de la Castellane était parti se faire engager par le centre de formation de l'AS Cannes. Jeune et déjà adulte, car il devait déjà, apprendre à se prendre en charge loin du cocon familial, loin des siens auxquels il était tant attaché. «Si je suis devenu ce que je suis aujourd'hui, c'est en grande partie grâce à ma famille, affirmait-il. Avant d'être footballeur, j'étais un petit garçon aimé, protégé de tous parce que j'étais le dernier d'une famille de cinq enfants. Je n'ai pas reçu de l'amour en paroles comme celui que l'on donne aujourd'hui aux enfants, mes parents n'avaient pas l'expression. Mon père ne m'a jamais dit ´´Je t'aime, je t'aime, je t'aime´´, et pourtant, il m'aimait plus que tout. Il me le prouvait en me protégeant». Il y a eu Cannes où il a amélioré ses qualités innées et où il a effectué ses premiers pas dans le professionnalisme français. Il y a eu ensuite Bordeaux, puis la Juventus de Turin enfin le Real Madrid. A chaque fois, Zinedine franchissait un nouveau palier vers les sommets d'une gloire incontestée. Une gloire accentuée par ses exploits en équipe de France avec laquelle il a remporté une Coupe du monde, un Euro et a disputé une finale du Mondial. Nous étions justement parmi les privilégiés qui ont assisté sur place à la dernière Coupe du monde. Notre parcours de plus de 30 ans de journaliste nous a donné l'occasion de voir des centaines de matches marqués par l'empreinte de un ou deux joueurs qui sont sortis du lot. Jamais quelqu'un nous a fait frémir autant que Zidane, lequel un soir de juillet de cette année, dans le stade de Francfort, nous a offert un récital dans l'art de faire ce que l'on veut d'un ballon. Il avait, pourtant, face à lui les Brésiliens, ceux que l'on présentait comme les maîtres lorsqu'il s'agit de montrer sa technique. Ce jour-là, Zinedine s'est transformé en professeur, en expert devant lequel les Sud-Américains se sont fait tout petits. Il n'y avait plus de Ronaldinho, Ronaldo ou Kaka., il y avait, tout simplement Zidane, le chef d'orchestre dans un match que l'on a présenté comme le sommet de sa carrière. Qu'importe qu'après ça, on ait dit de lui qu'il raté sa finale parce qu'il a eu un coup malheureux sur la personne de l'Italien Materrazzi. Pour l'écrasante majorité de l'opinion sportive mondiale, il avait été le Grand bonhomme du Mondial 2006 et les experts de la Fifa ne s'étaient pas trompés, eux qui ont décidé de lui décerner le titre de meilleur joueur de la compétition. Le Mondial terminé, Zidane, fidèle à sa promesse, a pris sa retraite. Il avait, ainsi, le temps de se préparer pour ce dont il avait parlé avant la compétition: aller en Algérie. Le jour tant attendu est arrivé. Il va retrouver le pays de ses racines et pour lequel il s'est beaucoup investi par des actions de bienfaisance. Nous pouvons lui dire: bienvenue parmi nous Zidane.