Qui, du grand public, a eu vent de l'initiative belgo-algérienne de mettre l'Algérie à l'honneur durant toute l'année 2006 dans les diverses manifestations culturelles au plat pays? La réponse laisse indifférente une grande partie de nos compatriotes émigrés-immigrés. Ils auront, pour une partie d'entre-eux remarqué que dans les trois festivals principaux du cinéma, celui de l'Amour organisé au printemps par la ville de Mons; celui du film francophone organisé en septembre par la ville de Namur et celui du film méditerranéen, organisé en novembre par la ville de Bruxelles, l'Algérie fut mise en évidence par ses cinéastes et comédiens. Et jusqu'à la mi- décembre, où, grâce à des initiatives d'associations privées et d'artistes indépendants, nous avons pu nous étonner de talents artistiques si merveilleux et si discrets. Nabila Belkacem et son association Itinérances s'est adjoint l'aide de l'association Diwan de Omar Diab et les talents du Dr Moumen Abib, pour tenir une semaine culturelle algérienne à Bruxelles. Beaucoup de nos compatriotes ont pu voir, ou revoir des films comme Tahia ya Didou de feu Mohamed Zinet, ou Barakat de Djamila Sahraoui. Le groupe Marzoug (fanfare) de Biskra et Kamel El Harrachi (chaâbi) ont animé de belles soirées... Sur l'autre registre qu'est la peinture, Souhila, architecte de formation, a décoré halls et couloirs de l'Espace Senghor de ses tableaux, représentant ses rêves d'Algérie. Carla Cirrone, une Belge d'Italie du sud (la Sicile) expose durant tout le mois de décembre, toujours à Bruxelles, de superbes tableaux où l'imaginaire algérien mêle les chaleurs du désert et l'azur de la Méditerranée. Les émigrés-immigrés algériens en Belgique ont leur particularisme. Ils aiment se rencontrer régulièrement. Aux grandes occasions comme les fêtes nationales, les fêtes religieuses, et quand il le faut, ils se créent des occasions. Juste pour se voir, discuter, chanter, danser... Ce samedi, vous dit-on, vous êtes invités chez Zoubir. Il fait un méchoui pour les familles et les enfants. Si ce n'est pas Zoubir, ce sera Saïd, ou Omar et son association, ou encore Kacimo et son équipe de la Cocab (association de la communauté algérienne). Ce dernier n'hésite pas à ramener de grandes vedette de la chanson algérienne ou des troupes artistiques nationales pour charmer ses compatriotes. Il ne se passe, pratiquement pas une seule semaine, où il n'y a pas d'événement de ce genre, à tel point que parfois les Algériens de Bruxelles ou de Mons ne savent plus choisir entre telle ou telle invitation. Le seul hiatus, est que certains pensent qu'il ne se passe rien chez la communauté algérienne. L' overdose génère aussi des problèmes de mémoire. Pourtant, Soraya, Hassina, Nadia, Atika, Fouzia, Brahim et les autres, se sont téléphoné dernièrement pour rendre visite à l'hôpital Reine-Fabiola aux enfants venus d'Algérie, sans leurs parents, pour des opérations cardiaques. Ils leur offrent des cadeaux et surtout les sourires et la chaleur de leurs mamans restées au bled. Je ne sais si elles ne me gronderont pas parce que je l'écris. Ils, par éducation, aiment l'anonymat pour de tels gestes. S'il y a une erreur à éviter, c'est celle de croire que les Algériens de Belgique ne s'intéressent au pays qu'aux grands rendez- vous politiques. L'image de l'implication des immigrés-émigrés que le jour des scrutins nationaux est galvaudée. A Bruxelles, les représentants des partis politiques RCD, FLN, RND, FFS, ex FIS...sont, il est vrai, actifs lors de grands moments, mais aussi présents dans les cafés, les soirs de convivialité. Ils ne différent pas de leurs matrices en Algérie. Ils surfent sur les problèmes soulevés depuis la nuit des temps par les émigrés-immigrés: prix excessif des billets d'avion chez Air Algérie; l'encombrement des voyages lors des grandes vacances; l'absence de banques algériennes Europe pour une captation des flux financiers informels; la collaboration de nos chercheurs et spécialistes avec les universités algériennes... Et jusqu'au domaine des médias. Pourquoi les chaînes télé marocaines, turques, tunisiennes...sont sur le câble belge et pas les nôtres? Faut une antenne parabolique, oui, mais en Belgique beaucoup de communes l'interdisent. En cette fin d'année, où le réveillon laïc et civil va cohabiter, l'espace d'un soir, avec la fête religieuse de l'Aïd El Adha, rappelons-nous cette belle affirmation de Pablo Neruda, si je ne me trompe: On peut enlever (exiler) un homme de son pays, mais on ne peut enlever le pays de son coeur.