La rentrée politique s'annonce délicate avec des informations contradictoires sur l'émergence de conflits entre le Président Bouteflika et le Chef du gouvernement, Ali Benflis, rapportée par le quotidien londonien Asharq al-Awsat. A chaque rentrée, les allégations les plus invraisemblables s'emparent des observateurs politiques, avec comme point d'orgue de prétendus différends au sommet de l'Etat. Après l'éternelle rengaine des antagonismes entre le Président et l'état-major de l'armée, c'est au tour du chef de l'Exécutif de se retrouver au centre de la campagne politico-médiatique sur le thème d'un désaccord profond entre lui et le Président de la République. Selon ce journal arabe, Benflis serait mécontent de la gestion politique des événements de Kabylie et aurait, tout bonnement, demandé au Président de «démissionner» le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, sous prétexte qu'il ne se conforme pas à la discipline gouvernementale et qu'il aurait, de par ses déclarations, compliqué davantage l'action de l'Exécutif. Ce journal prête, également, au Premier ministre des divergences de vues avec le Président Bouteflika. Au-delà du fait que Ali Benflis a prouvé une loyauté infaillible au Président Bouteflika, depuis que les deux hommes avaient décidé de travailler ensemble, relation renforcée par la campagne présidentielle d'avril 1999, dont Benflis a supporté la direction et fixé la stratégie, une brouille entre les deux personnages paraît tout à fait imaginaire, si l'on se réfère au contexte politique actuel. Benflis gère au mieux l'action de l'Exécutif, notamment sur le volet des réformes économiques ou sociales où son bilan est éloquent, mais de surcroît, se révèle un précieux allié du Président dans le «management» politique de la coalition gouvernementale qui, malgré les pronostics les plus pessimistes, résiste à l'implosion. Cette diatribe, dirigée contre le duo Bouteflika-Benflis, n'est, de ce point-là, pas fortuite au regard des manoeuvres politiques et électorales qui s'annoncent. En effet, les échéances municipales et législatives approchent et Bouteflika a besoin de consolider sa base d'autorité par la réussite électorale de partis qui lui sont favorables, pour ne pas dire acquis, tels que le FLN et le RND. Concernant le parti de Benhamouda, dont l'idée est de conduire à la proue des formations politiques en lice, son apport intégral et fiable ne pourrait être garanti que par l'entremise d'un Benflis qui doit reprendre le contrôle des affaires. Mais le plus troublant est que cette désinformation, qui élargit son cercle de nuisance de Bouteflika à Zerhouni en passant par Benflis, intervient aussi au moment où le gouvernement semble avoir repris la maîtrise des événements en Kabylie. L'agitation politique que devaient générer ces émeutes en un scénario bien huilé - contestation, violence, contre-violence, pourrissement, perte de contrôle et démission - du principal visé dans cette affaire, en l'occurrence Bouteflika, n'a pas fonctionné comme il était prévu. La capacité conjuguée de la présidence, de l'Exécutif et de l'ensemble des corps de sécurité à déjouer cette intrigue aux allures de complot avait complètement dynamité la perspective de la réussite de ce scénario. D'où une énième campagne de rumeurs qui englobe tous ceux qui font la décision actuellement.