Des souvenirs emplis de tendresse, de nostalgie et de tristesse qui, parfois même, agressent... Fadéla M'rabet n'est plus à présenter...L'une des premières féministes d'Algérie et docteur en biologie, elle est connue pour être une femme de caractère qui ne mâche pas ses mots, qui sont parfois très durs à entendre, souvent même aussi durs que la réalité elle-même. Après La Femme algérienne (1965), Les Algériennes (1967) chez Maspéro, L'Algérie des illusions (1972) chez Robert Laffont, Une Enfance singulière (2003) chez Balland, réédité à Alger par l'Anep et Une Femme d'ici et d'ailleurs, la liberté est mon pays (2005) aux Editions de l'Aube, la voilà qui s'exprime à nouveau à travers Le Chat aux yeux d'or, une illusion algérienne, un hommage qu'elle a voulu rendre à Nanna, la femme à son oncle, et, à travers elle, à Djedda, à Yemma, à toutes les femmes algériennes et à la femme en général. Ce sont des souvenirs douloureux, beaux, joyeux, tristes, laids, terrassants, bouleversants, révoltants et très controversés qu'elle déverse çà et là, au détour d'une ruelle, à la vue d'un détail, au son d'une voix, au gré d'un voyage, à partir d'une rencontre, aux retrouvailles avec une amie d'enfance... tous les déclics sont là pour enchaîner les souvenirs et déchaîner la révolte chez une Fadéla M'rabet, qu'on a du mal à cerner parfois... Certes souvent, douce et sensible, on la sent aussi dure et amère envers une société qu'elle voulait sereine et prospère mais qui reste pour elle, fermée et austère. Non pas qu'elle veuille se venger ou s'en détacher, l'auteur cherche surtout à s'insurger contre l'ordre établi et à exprimer une révolte qu'elle voudrait partagée. A travers le souvenir douloureux de la mort de Nanna, de ses obsèques, des adieux et des pleurs d'une séparation dure à supporter, c'est un cri contre la mort et pour la vie, contre la violence et pour la justice, contre l'intégrisme et pour la tolérance, contre la soumission et pour la liberté et l'égalité qui est lancé par une femme en détresse... La détresse d'une femme qui souffre peut-être de l'éloignement, de la différence ou de l'incompréhension, mais qui souffre surtout d'une société en mal d'amour et pourtant pleine de sensations, d'une Algérie qui a tout pour être heureuse mais qui ne fait rien pour prospérer... Dans Le Chat aux yeux d'or, l'auteur veut renvoyer l'image d'une insurgée contre l'Etat, la religion, les hommes et la société algérienne en général, sa critique est très dure et parfois même extrémiste. Beaucoup de choses peuvent lui être reprochées... mais pas une sensibilité à fleur de peau qui pourrait excuser une telle dureté dans le ton...