Vengeance! Tel est le mot employé par Bush à propos de la pendaison de Saddam Hussein qui n'a pas fini de susciter des interrogations. Le bilan de l'attentat, mardi, contre l'université Moustansiriyah à Baghdad, ne cesse de s'alourdir dépassant la centaine de morts et près de 200 blessés. Ce nouvel échec sécuritaire illustre le naufrage de la politique du gouvernement Maliki qui s'est mis, par ailleurs, en position fausse par l'exécution précipitée et scandaleuse de l'ex-président irakien, Saddam Hussein et des deux co-accusés Barzan Al-Tikriti et Awad Al-Bandar. Ainsi, c'est au tour du président américain, George W.Bush, que l'on ne peut soupçonner d'admirer l'ancien président irakien, de qualifier, après d'autres analystes et commentateurs, l'exécution de Saddam Hussein de simple «acte de vengeance» de la part d'un gouvernement (majoritairement chiite), auquel la «maturité politique» fait défaut. Dans un entretien à la chaîne publique PBS, le président Bush a déclaré que la pendaison de l'ancien «dictateur a renforcé les doutes sur le Premier ministre irakien (Nouri Al-Maliki)» et a démontré clairement que son gouvernement «manque encore d'une certaine maturité». M.Bush a estimé d'autre part, que cette exécution semblait être «un acte de vengeance» confessionnelle qui «rend plus difficile de mettre un terme à la violence» qui ravage l'Irak. Le chef de la Maison-Blanche a ainsi affirmé: «Quand est venu le moment de l'exécuter, cela semblait constituer un acte de vengeance, faisant passer un message contradictoire auprès du peuple américain et de l'opinion publique internationale». «Et cela démontre que c'est un gouvernement (le gouvernement Maliki) qui doit encore atteindre une certaine maturité», a ajouté M.Bush. La vidéo pirate qui a fait le tour de la planète montrait les détails de l'exécution et révélait entre autres, que l'ancien président a été insulté et que le nom de son ennemi chiite, le chef radical Moqtada Sadr, a été scandé, ce qui a non seulement choqué le monde, mais aussi exacerbé le courroux des sunnites. Nouri Al Maliki, qui ne pouvait ignorer cela, n'aura sans doute pas mieux fait s'il avait voulu rendre toute conciliation impossible entre les deux communautés chiite et sunnite d'Irak. Le carnage de l'université Moustansiriyah à Baghdad, deux jours après l'exécution de Barzan Al Tikriti et Awad Al Bandar, condamnés à mort le 5 novembre 2006 en même temps que Saddam Hussein dans le procès de Doujail, vient comme une réponse et illustre parfaitement le climat qui prévaut aujourd'hui en Irak où le fossé ne cesse de se creuser entre les communautés, outre du fait de la maladresse des gouvernants que du fait que ce sont ces derniers qui semblent exacerber le sentiment de vengeance parmi leurs compatriotes, semblant mettre de l'huile sur le feu. Alors qu'un bilan de l'ONU indiquait lundi que plus de 34 000 civils irakiens ont été tués en 2006, l'année en cours s'ouvre sur une rivière de sang jonchée de cadavres d'étudiants et de professeurs qui devaient être la future élite d'un pays que la guerre a renvoyé des décennies en arrière. Or, mardi a été la journée la plus sanglante depuis le début de l'année, avec plus de 100 personnes tuées dans une série d'attaques dans la capitale dont la plus criminelle a touché l'université Moustansiriyah, dans l'est de Baghdad, où au moins 70 personnes, en majorité des étudiants, ont été tuées et 169 blessées dans un double attentat. Cela s'est produit en fin d'après midi au moment où étudiants et professeurs quittaient les cours, quand un kamikaze s'est fait exploser au milieu de la foule, attentat suivi peu après par l'explosion d'une voiture piégée garée devant la porte centrale de l'établissement universitaire, ont indiqué les services de sécurité irakiens. Le Premier ministre irakien Nouri Al-Maliki a certes, condamné «ce crime horrible contre des innocents étudiants», et a promis, dans un communiqué officiel, que «les auteurs de cet acte lâche (...) seront retrouvés et la justice rendue». Mais n'est-ce pas la conduite revancharde d'un gouvernement qui n'a pas su raison garder qui a rendu un tel crime possible? En réalité, la sauvagerie de l'exécution de Saddam Hussein, perçue par les sunnites irakiens comme un assassinat, a rompu les derniers fils encore ténus unissant les deux communautés chiite et sunnite, alors que les décisions discutables de Nouri Al Maliki ont beaucoup contribué à une dégradation de la situation dommageable pour le devenir de l'Irak. Dans l'affaire de la pendaison de Saddam Hussein -ou le chef (chiite) du gouvernement irakien a laissé voir sa haine envers l'ancien président irakien- dans celle du désarmement des milices chiites -Maliki montrant peu d'empressement à faire appliquer la décision de désarmer les miliciens-le Premier ministre irakien, Nouri Al Maliki, s'est à chaque fois plus conduit en partisan qu'en homme d'Etat responsable et garant de l'unité du pays et de la sécurité de son peuple. A tel point que même le président américain rejoint l'opinion mondiale unanime en estimant, à son tour, que la pendaison de Saddam Hussein est «un acte de vengeance». Dès lors, Maliki est-il encore l'homme de la situation alors que l'Irak est plus que jamais à feu et à sang? Bush vient-il de lui signifier une prochaine fin de mission? Les prochains jours éclaireront sans doute ce qui est réservé à ce pays meurtri qu'est l'Irak.