Un déficit de 2,5 milliards de centimes combiné à une dette de près de 60 milliards de dinars mettent la Maison de la presse en cessation de paiement. M.Djoudi, directeur de la Maison de la presse, souffre et ne sait plus à quel saint se vouer. Il assiste désespérément au délabrement de l'institution qu'il dirige depuis fin 1998. L'image qu'elle renvoie n'est pas celle qu'il aurait souhaitée. Elle est indigne du rang qu'elle aurait toujours dû occuper. «C'est un sentiment de honte qui m'envahit lorsqu'un étranger pénètre dans l'enceinte de la Maison de la presse.» Et le dernier en date fut la visite de l'ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique, très mal vécu par M.Djoudi. Un bastion de la liberté d'expression de renommée mondiale qui part à vau-l'eau. Des lieux délabrés, un manque d'hygiène alarmant...De toute évidence, la Maison de la presse a opéré sa mue. Faute de moyens tout simplement, mais aussi par une politique d'assistanat dont le revers risque de porter un coup fatal à cet espace de liberté tant attendu et souhaité. Combien de titres de journaux ont disparu sans honorer leurs dettes, et tant d'autres toujours en activité qui ne l'ont pas encore fait? La liste est longue, très longue...M.Djoudi poussa un soupir. Le décret portant création de la Maison de la presse (n°90-243 du 4 août 1990 modifié par le n°92-127 du 28 mars 1992) attribue à cette dernière le statut d'Epic (Etablissement public à caractère industriel et commercial). Il s'est fait bizarrement sans apport de capital social et en l'absence du ministère de la Communication. La première mesure qui, en fait, a plongé la Maison de la presse dans cette forme d'assistanat, que dénonce vigoureusement M.Djoudi, a été celle prise par le ministre de la Communication en faveur des éditeurs pour l'exonération de leurs loyers depuis la création de leurs titres jusqu'au 31 décembre 1995. Ce qui a engendré un manque à gagner de 2,5 milliards pour la Maison de la presse et que les pouvoirs publics de l'époque s'étaient engagés à prendre en charge, en vain. M.Djoudi se demande: «Comment a-t-on pu résister jusqu'à maintenant?» Et d'ajouter: «On peut parler de tout sauf de gestion!» Et comment cela pourrait être possible? La Maison de la presse croûle sous des dettes insurmontables. La Cnas, 29.259.320DA, Sonelgaz, 13 millions de dinars, EPA plus de 3 millions de dinars...63 employés, dont les salaires sont difficilement honorés et une subvention de 5 millions de dinars qui ne peut être que symbolique, achèvent l'image de ce triste tableau. «C'est un cadeau empoisonné!» s'exclame M.Djoudi. Il a cependant la conscience tranquille. Sa résistance a forcé l'admiration des directeurs de journaux. Et cela le rend heureux. Il cite des titres, El Watan, L'Expression, El Khabar, Liberté, Le Soir d'Algérie, Echourouk, satisfait de les avoir accompagnés et soutenus dans leur parcours, d'avoir résisté durant les années de braise...Il évoque avec fierté leur réussite. M.Djoudi a proposé un véritable plan de redressement aux pouvoirs publics, auxquels il lance un véritable SOS qui consiste en l'assainissement des dettes de la Maison de la presse, l'augmentation conséquente de la subvention, la révision des loyers et le paiement des charges par les locataires. L'image de marque de l'Etat algérien en est le véritable enjeu. La prise en charge de ce haut lieu de la liberté d'expression confirmera la reconnaissance de l'Etat envers ceux qui sont tombés la plume à la main.