Annoncée pour le 22 février dernier, la rencontre à Paris entre les ârchs et des députés de la gauche française au sein du Parlement européen, n'a pas eu lieu. Les délégués n'ont pas obtenu leur visa d'entrée en France. De sources proches de la Coordination des ârchs de Tizi Ouzou, L'Expression a appris que les services consulaires de l'ambassade de France ont refusé de délivrer les visas d'entrée au territoire français à plusieurs délégués de la Cadc. Ces derniers devaient se rendre à Paris à l'invitation d'une association algérienne proche des milieux socialistes français. Outre une manifestation publique programmée par ladite association, les membres des ârchs devaient aussi être reçus par des députés de la gauche française, siégeant au Parlement européen. Prévue le 22 février dernier, cette réunion n'a donc pas eu lieu, en raison de l'absence des délégués des ârchs à Paris. La non-tenue de la rencontre est significative d'un changement appréciable de la part des autorités centrales de l'Hexagone dans son attitude vis-à-vis des événements de Kabylie. En effet, le refus essuyé par Abrika et ses compagnons est un signe qui ne trompe pas sur la volonté de l'Elysée de ne plus se mêler des affaires intérieures de l'Algérie. Les intenses tractations diplomatiques algéro-françaises, constatées après les attentats du 11 septembre, ont, semble-t-il, donné l'occasion à Bouteflika d'exposer sa démarche dans la gestion de la crise qui secoue la Kabylie et, partant, convaincre le président français du bien-fondé du processus du dialogue engagé avec les dialoguistes des ârchs. La «désolidarisation» de la France officielle du mouvement de contestation en Kabylie, sonne comme un soutien au pouvoir, dans sa tentative de régler la crise par la voie du dialogue. Cela dit, la réaction de l'Elysée risque d'être mal interprétée par Matignon et le ministère des Affaires étrangères, entre les mains du Parti socialiste. Ces derniers n'hésiteront sans doute pas à revenir sur le sujet par des voies détournées, histoire de récupérer l'électorat d'origine algérienne, sensible à ce qui se passe en Kabylie, depuis plus de dix mois. En fait, plus qu'une question de politique internationale, les événements qui secouent l'Algérie, constituent pour la classe politique française, un enjeu électoral de premier ordre. Cela étant, force est de constater que la droite a choisi son camp dans la bras de fer pouvoir-ârchs qui, présidentielle française oblige, est sorti des frontières algériennes pour être un sujet de prédilection d'une frange importante des socialistes français. Par ailleurs, en décidant de ne pas «autoriser» une réunion qui devait se tenir le jour même de la parution du livre de Hichem Aboud et dont l'objectif secret est de mettre la pression sur le pouvoir algérien, Jacques Chirac apporte un soutien actif à Bouteflika, en empêchant une autre polémique sur la nature du pouvoir en Algérie. D'un autre côté, les radicaux des ârchs, encadré par le RCD, viennent de perdre une opportunité d'internationaliser la crise en Kabylie. Un échec qui, à n'en pas douter, déteindra sur leurs actions futures. D'ailleurs, la menace à peine voilée, sur le retour des émeutes, brandie, jeudi dernier par certains animateurs zélés, lors d'un meeting à Béjaïa, traduit une volonté de ne laisser aucune chance au dialogue amorcé par le Chef du gouvernement. En tout état de cause, il y a lieu de souligner qu'après le refus d'accorder le visa aux délégués radicaux des ârchs, ces derniers n'auront désormais d'autres interlocuteurs que le pouvoir. Aussi, est-on amené à penser que le «coup de main» de Chirac à Bouteflika vaut son pesant d'or. Reste à savoir maintenant si les résultats qui sortiront de la prochaine rencontre entre la présidence de la République et les «citoyens libres» sauront désamorcer la situation en Kabylie.