Quoi de plus normal que de procéder à la levée des couleurs, de hisser l'emblème national chaque matin à l'intérieur des écoles algériennes. La dernière instruction ministérielle exigeant des chefs d'établissement de procéder à la levée quotidienne des couleurs nationales, anime les débats au sein du secteur. Enseignants, parents d'élèves et même les médias, se sont emparés de ce dossier qui prend l'allure d'une «affaire». Cependant, si ce geste parait «exagéré» pour certains, il n'en demeure pas moins qu'il est un moment de recueillement, ô combien symbolique, à la mémoire des martyrs de la guerre de Libération. D'autant que l'Algérie a traversé une période délicate - au point que l'on «accusait» l'école algérienne de former des extrémistes. Le système éducatif a besoin d'un souffle salutaire. Celui qui permet à l'élève de retrouver ses repères nationalistes et patriotiques. Combien d'établissements scolaires portent sur leur fronton des noms de «chahids illustres», Ourida Meddad, Hassiba Ben Bouali, Abane Ramdane... et dont les élèves ignorent le parcours révolutionnaire? Le chef de l'Etat l'a bien dit lors de son dernier discours devant les cadres de la nation: «Les jeunes connaissent mal leur histoire». L'Algérie, à la suite d'un long parcours chargé d'histoire et au long processus du mouvement national, a débouché sur une guerre de Libération nationale qui a abouti à son indépendance. Une liberté chèrement arrachée et qu'il faut préserver, par l'acte et la parole. Toutefois, une question s'impose: pourquoi des idéaux aussi nobles qui ont réussi à faire l'union sacrée entre les Algériens sont tombés en décrépitude? Le ministre de l'Education nationale, Boubekeur Benbouzid, a déclaré récemment être impressionné par le nationalisme américain. «Les citoyens américains sacralisent le drapeau des Etats-Unis, il est partout et dans chaque classe...» a-t-il fait remarquer. Ces propos ont été tenus à l'occasion du séminaire, qui a débuté le 11 février pour prendre fin hier, celui-ci avait pour thème «La prise en charge de la dimension nationale dans les programmes d'enseignement». Une rencontre à laquelle avaient pris part pas moins de 240 invités (le ministère de l'Enseignement supérieur, les moudjahidine, la culture, les Scouts musulmans algériens, le Haut commissariat à l'amazighité...enseignants, chefs d'établissement mais aussi la Fédération nationale des parents d'élèves). La question qui vient immédiatement à l'esprit et qui devrait être posée, est de savoir comment un pays comme les USA, peuplé de populations disparates venues des quatre coins de la planète ont réussi à se forger une identité et à devenir une nation. Même si les fondements historiques qui ont érigé les pays en Etats puis en nations sont aux antipodes les uns des autres, il reste que le sentiment patriotique demeure le ciment de l'unité des nations. L'Algérie que l'on n'arrête pas de présenter comme une terre à la civilisation millénaire connue et reconnue par l'Unesco pour ses richesses, tant matérielles qu'immatérielles, en est aux balbutiements d'une identité commune, autour de composantes constitutionnellement consacrées, l'amazighité, l'arabité et l'Islam. L'accès au logement, le droit au travail sont des droits constitutionnellement consacrés. Comment les jeunes Algériens peuvent-ils, dans ces cas-là, se sentir citoyens? Ils ne sont pas adéquatement informés, leur intérêt pour la nation n'est pas affiché. Constat d'un système qui a failli. Plus de cours d'éducation civique, aucune mesure d'accompagnement de gestes qui peuvent paraître symboliques tel que la levée des couleurs, l'image de l'Etat ternie par les scandales financiers finissent par provoquer un désintérêt total, sinon un «désamour» des jeunes envers leurs pays. C'est un sentiment d'abandon qui les envahit et il est d'une extrême urgence que la confiance se rétablisse entre eux et les responsables de l'Etat...à commencer par l'école et la famille. Une chose est sûre: la défaillance, l'échec de l'école en termes d'initiation au patriotisme, se mesurent à l'aune de l'ignorance par nos têtes blondes de leur histoire, leur identité. C'est un constat implacable.