Le Premier ministre palestinien a commencé hier ses consultations pour la formation d'un cabinet d'union nationale. Désigné jeudi à la tête du gouvernement par le président Mahmoud Abbas, conformément à l'accord de La Mecque, Ismaïl Haniyeh, issu du Hamas a commencé hier ses consultations en vue de former un cabinet d'union nationale. Ces pourparlers se déroulent en parallèle à la préparation du sommet à trois, prévu ce lundi, entre le président Abbas, le Premier ministre israélien, Ehud Olmert et la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice. Selon des sources proches du Hamas et du Fatah, les discussions ont commencé hier. «Les discussions débutent aujourd'hui (hier). Il y aura des rencontres dans la soirée avec les groupes parlementaires et des personnalités indépendantes», a indiqué le porte-parole du Hamas, Fawzi Barhoum. «Le Hamas mène aussi des consultations en interne pour choisir les neuf candidats aux ministères (attribués au mouvement islamiste)», a-t-il ajouté. De son côté, au nom du Fatah, Abdel Hakim Awad, a confirmé une rencontre avec M.Haniyeh, sans préciser d'heure, mais a souligné qu'il «n'y aura pas de désignation de ministre» dans l'immédiat. Ces pourparlers font suite à l'accord de La Mecque, la semaine dernière, entre le président Abbas et le chef du bureau du Hamas, Khaled Mechaâl, lesquels se sont entendus sur la formation d'un cabinet d'union comprenant, notamment, neuf ministres islamistes et six issus du Fatah en plus de ministres indépendants et/ou venant d'autres formations politiques. S'exprimant hier après le début des consultations entre les deux parties, le Premier ministre, Ismaïl Haniyeh a déclaré à la presse: «J'espère pouvoir présenter le nouveau gouvernement au Conseil législatif (CLP, Parlement) avant l'expiration du délai initial de trois semaines». En cas d'échec dans les temps impartis, un sursis de deux semaines sera accordé à M.Haniyeh pour trouver un gouvernement de consensus. M.Haniyeh a, d'autre part, indiqué qu'«à partir de demain (aujourd'hui) nous allons procéder à des consultations avec les factions, les groupes parlementaires et les personnalités indépendantes pour former le gouvernement d'union». M.Haniyeh, qui dirigeait, depuis mars 2006, un cabinet dominé par le Hamas, a remis sa démission jeudi à Ghaza à M.Abbas qui l'a aussitôt chargé de former le prochain gouvernement, rappelle-t-on. Les Etats-Unis qui ne se sont pas prononcés sur l'accord de La Mecque, ont, cependant, démenti, jeudi, par la voix de la secrétaire d'Etat, Condoleezza Rice, fait savoir au président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qu'ils ne traiteraient pas avec le futur gouvernement d'union. Mme Rice a, ainsi, affirmé à la télévision saoudienne qui l'interrogeait sur ces propos: «Oh, nous n'avons pas remis de lettre de ce genre au président Abbas (...) En fait, ce que nous avons dit, c'est que nous attendrions que le gouvernement soit formé et que nous prendrions alors une décision sur nos relations avec ce gouvernement.» Mme Rice a encore ajouté: «Nous avons fait savoir que les principes du Quartette restaient pour les Etats-Unis, et bien sûr pour le Quartette, la base sur laquelle nous jugerions tout gouvernement» palestinien, réitérant: «Nous réservons notre jugement jusqu'à ce que le gouvernement soit effectivement formé.» Il faut bien dire que les arrangements de La Mecque entre Hamas et le Fatah n'ont pas emballé les Occidentaux, notamment les Américains, qui attendent de voir, d'autant plus que si l'accord prend en charge et assume l'ensemble des engagements signés au nom de l'OLP et de l'Autorité palestinienne, il ne dit mot, en revanche, de ce qui est de la reconnaissance d'Israël par le Hamas. Or, l'Union européenne, les Etats-Unis et plus généralement le Quartette (USA, UE, Russie et ONU) exigent que le Hamas renonce à la violence d'une part, et reconnaisse Israël, d'autre part. C'est dans ce contexte un peu particulier que va intervenir le sommet à trois entre Mme Rice et MM.Abbas et Olmert. Auparavant, Condoleezza Rice, qui devait arriver dans la soirée d'hier en Israël, doit rencontrer, séparément, le Premier ministre israélien puis le président palestinien avant de présider une réunion commune à trois, ce lundi. La chef de la diplomatie américaine a indiqué vouloir donner un «horizon politique» aux Palestiniens, axé sur la Feuille de route, le plan de paix international qui prévoit, notamment, la création d'un Etat palestinien. Or, les dernières initiatives unilatérales d'Israël: gel de la Feuille de route, retrait unilatéral de Ghaza, construction du mur de l'Apartheid en Cisjordanie, annexion de larges portions de territoires du nord de la Cisjordanie, jouxtant Jérusalem-Est, ont justement rendu aléatoire tout débat sérieux sur le futur des territoires palestiniens occupés. Mme Rice propose, ainsi, de discuter des «contours d'un futur Etat palestinien» sans exiger, en parallèle, d'Israël d'arrêter ses empiétements sur les territoires palestiniens mais aussi et surtout de revenir à la situation prévalant à l'époque de la signatures de l'accord d'Oslo entre l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) et l'Etat hébreu en 1993. Il faut noter, d'autre part, que la réunion tripartite, à l'initiative de la chef de la diplomatie américaine, tombe à un moment peu propice, quand le président Abbas est fragilisé par la crise politique qui secoue les territoires palestiniens alors qu'Olmert, le Premier ministre israélien, le plus inconsistant de ces dernières années, ne semble pas avoir l'envergure le qualifiant à prendre des décisions engageant Israël. Tout cela risque de laisser, une nouvelle fois, en stand by, le fond du dossier israélo-palestinien: le retrait d'Israël sur la ligne verte du 4 juin 1967 et l'ouverture de véritables négociations sans a-priori, seules à même, de poser les jalons d'une paix consensuelle (entre les deux communautés) et non imposée par l'une des parties.