Le président de l'APN et son homologue français n'ont soufflé mot sur le traité d'amitié. Le Premier ministre français, Dominique de Villepin, vante les rapports algéro-français, mais ne souffle mot sur le traité d'amitié. A l'issue d'un entretien, à Matignon, avec Amar Saâdani, président de l'APN, Dominique de Villepin a salué «les relations fortes» entre Paris et Alger. Ces mêmes relations qui, à maintes reprises, ont été soufflées par un vent de fâcherie, bénéficient, cette fois-ci, d'un traitement de faveur, du moins sur le plan institutionnel. Si ce n'est, bien évidemment, un double langage auquel se sont habitués les Algériens. «Ce sont des relations fortes même si elles ont été marquées par des épisodes douloureux. L'Algérie a une place très particulière dans le coeur des Français», a déclaré le Premier ministre français. La visite de Amar Saâdani intervient quelques semaines après l'escale effectuée à Alger par Jean-Louis Debré, désormais ex-président de l'Assemblée nationale française. Celui-ci vient d'être nommé à la tête du Conseil constitutionnel français, une récompense de fidélité de la part du président français, Jacques Chirac. «Nous voulons que cette relation, au-delà du travail des gouvernements, puisse se diffuser, se développer à travers l'ensemble des élus. C'est la meilleure façon de faire en sorte que cette relation reste forte, dynamique, exigeante», a ajouté Dominique de Villepin. Ni le devoir de repentance ni les excuses ne sont évoqués. On ne connaît pas les raisons de cette escapade, mais, pour la droite française, le problème du passé colonial est une mise en scène destinée à jeter de la poudre aux yeux. On peut rester sidérés devant cette habitude de la droite française à distribuer des pardons tous azimuts à tous les peuples sauf aux Algériens. Le Premier ministre français est revenu sur la nécessité d'accorder les violons, mais a, carrément, fui le traité d'amitié, une question que la France évoquait, auparavant, à chaque coin de rue. Interrogé sur cette question, Dominique de Villepin s'est gardé de prendre les raccourcis difficiles de l'affaire, préférant dire tout bonnement qu'«il faut avancer, il faut travailler» pour développer les relations bilatérales. «Il y a tant de sujets d'intérêt commun en matière économique, culturelle, sociale et de sécurité». La France a-t-elle perdu, à mi-chemin et à quelques encablures des présidentielles, l'intérêt qu'elle accordait au traité d'amitié? Ce même projet a été gelé après le vote de la loi du 23 février 2005 par le Parlement français. Si les deux parties n'ont soufflé mot sur ce traité d'amitié, Jean-Louis Debré a voulu rectifier le tir et donner à la visite de Saâdani une autre dimension. «Il y a un rêve d'un avenir partagé, mais sans pour autant oublier le passé. Il est tel qu'il est, ne cherchons pas à le maquiller ou à le transformer». Ainsi, le stade de «partenariat d'exception», réclamé par Jacques Chirac, lors de sa visite à Alger, en 2003, n'a pu être atteint, en dépit d'un sempiternel va-et-vient diplomatique. Le président de la République avait réclamé, ouvertement, des «excuses officielles» de la France pour les crimes commis contre le peuple algérien durant la colonisation. Depuis, le projet de «traité d'amitié» est resté au point mort. Au stade où en sont les choses, peut-on s'attendre à un miracle de la part des députés? A fortiori, ces derniers se contentent d'user d'un langage parlementaire, préfèrant fuir, dès maintenant, les questions qui fâchent.