A l'aube du troisième millénaire, la wilaya de Souk-Ahras compte encore de nombreux sites d'habitat précaire et des bidonvilles. Des centaines de personnes vivent dans des conditions inhumaines depuis des dizaines d'années. Ibn Rochd et Sidi Messaoud (Hamma Loulou) improprement appelées cités, sont situées au coeur du chef-lieu de wilaya et sont connues comme des lieux de transit, mais qui font désormais partie d'un décor vieux de 40 ans. Beaucoup de citoyens sont nés et continuent d'y vivre mais la plupart s'y sont installés à la faveur de l'opération RHP menée au début de la décennie en cours. Les anciens occupants relogés louent ou vendent leurs baraques aux ruraux attirés par les mirages de la ville où ils finissent par perdre leurs repères... On a parfois envisagé de supprimer ces «centres» devenus des bidonvilles à l'intérieur du tissu urbain. Ces lieux considérés comme des plaies sociales, des foyers de ma-ladies devaient être rasés après relogement des occupants. Des projets d'équipements collectifs devraient y être installés dans le cadre d'un vaste plan de réaménagement, depuis le dernier découpage administratif de 1984, élevant Souk-Ahras, au rang de wilaya. De tout cela, personne ne parle plus. Des projets et des promesses évaporés avec les changements intervenus depuis. L'habitat précaire à l'intérieur du tissu urbain de Souk-Ahras ne se limite pas à ces «centres», il s'étend à une bonne partie de la ville, à d'autres quartiers, qui relèvent de la propriété privée mais non moins insalubres. Des centaines de familles incapables de reconstruire leurs bâtisses ou de les améliorer vivent encore dans l'insalubrité totale. Ceux et celles qui ont pu ou su se procurer des logements décents ont loué leurs vieilles maisons en ruine aux plus démunis et à un prix fort. Mais il y a plus grave, notamment, ceux qui vivent dans des caves à Souk-Ahras même et que les autorités ignorent. Ces familles vivent dans des conditions intolérables. A ce titre, un ancien responsable du mouvement associatif souk-ahrassien nous dira: «En matière d'attribution de logements, qui loge-t-on à Souk-Ahras?» et de poursuivre: «C'est là une question pertinente mais essentielle et qui montre les limites de nos lois...! En fait nos lois ont donné un statut à ces bénéficiaires de résidence en premier lieu, et de logement ensuite» et de conclure: «Cette amnésie», a condamné les gens nés à Souk-Ahras à croupir dans leurs fameuses caves qui menacent ruine et le système de notation mis en place étant en faveur de ces occupants «indus», les locataires des caves et autres doivent attendre qu'un remède soit trouvé pour guérir cette «amnésie» législative». Mais en fait, les plus à plaindre dans ce calvaire que mènent ces familles des caves et des bidonvilles, ce sont les enfants tous chétifs, sales, mal habillés en toute saison, pieds nus, aux regards éteints, aux visages sans joie et sans espoir. Leur univers est délimité pour ceux du «PK108», par l'oued qui procure à leurs parents quelques revenus tirés de la vente des agrégats, des dépôts d'ordures ménagères, et de la surveillance de quelques caprins et ovins. Interrogés à propos des possibilités de résorption de ces plaies sociales et foyers d'épidémie, quelques responsables de l'APC de Souk-Ahras avouent l'impuissance de leur institution en la matière n'ayant ni « es prérogatives ni les moyens nécessaires pour enrayer cette désolation. Si on nous donnait, nous commencerions par loger les familles et raser les cabanes qui leur servent d'abri. Les lieux seraient immédiatement clôturés avec interdiction d'y installer quoi que ce soit sans une étude pour leur utilisation ultérieure». Cependant, nous croyons savoir que l'attribution de logements, l'urbanisme «communal», et autres attributions sont désormais les prérogatives des APC élues; ces nouvelles institutions composées de plusieurs partis, démocratiquement élues, sont-elles des leurres? En fait, y a-t-il des élus sourds aux échos de la réalité.