La réaction algérienne, qui n'a pas caché son insatisfaction et sa surprise face à une telle décision venant d'un pays voisin et frère, n'a pas laissé indifférentes les autorités libyennes. La visite éclair effectuée dimanche dernier à Alger par le ministre des Affaires étrangères de la Libye suscite des interrogations au sein de l'opinion publique nationale. Habitués aux déclarations rocambolesques du leader de la Jamahiria, les Algériens n'arrivent pas à saisir ses intentions. La classe politique et à sa tête le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, a déjà eu l'occasion de s'exprimer sur la surprenante décision prise par le pays voisin et ami d'imposer un visa d'entrée en son territoire aux Algériens. Un geste à la limite de l'hostilité qui vient tel un cheveu sur la soupe remettre en cause la construction de l'unité maghrébine et le partenariat dans le domaine économique projeté dans le cadre de la commission mixte algéro-libyenne. L'émissaire libyen était porteur d'un message adressé par Mouamar El Guedaffi au président Abdelaziz Bouteflika signifiant la non-application de la dite décision concernant le visa aux Algériens désirant se rendre en Libye. Il faut dire que la réaction algérienne, qui n'a pas caché son insatisfaction et sa surprise face à une telle décision venant d'un pays voisin et frère, n'a pas laissé indifférentes les autorités libyennes qui ont toujours trouvé, en l'Algérie, un soutien diplomatique durant les années difficiles de son isolement sur la scène internationale et des effets de l'embargo auquel était soumis la Libye durant des années par l'Occident. Mais la diplomatie à géométrie variable du guide de la Révolution a toujours laissé pantois les pays voisins. Avant cette question du visa, Mouamar El Guedaffi avait lancé un pavé dans la mare en concoctant un projet d'un Etat touareg dans la région du Sahel, aux frontières du Mali, de l'Algérie, de la Libye et du Niger. Il en avait fait l'annonce lors d'une visite au Mali, l'été dernier, avant de se rétracter. Le journal national Echourouk qui avait publié un reportage traitant sur le sujet avec des témoignages de personnalités de la communauté targuie contactés dans ce sens par les officiels libyens, a été poursuivi en justice par El Guedaffi lui-même. Le procès en question est en attente du verdict après l'appel introduit par le journal arabophone. Ce qui montre bien que la Libye entretient des relations ambiguës avec l'Algérie. Sur le plan sécuritaire, ce pays a apporté une aide précieuse pour l'extradition, en Algérie, du numéro deux du Gspc, Amari Saïfi alias Abderrazak El Para, détenu par la rébellion tchadienne du Mdjt qui a de bonnes relations avec la Libye. Ce qui sous-entend que l'Algérie et la Libye collaborent en matière sécuritaire et de lutte contre le terrorisme. Mais la dernière sortie au sujet du visa confirme la fragilité des relations avec ce pays qui peut changer de cap diplomatique de façon imprévisible comme c'est le cas de son attitude face aux pressions américaines au sujet des visées de Tripoli de se doter de la technologie nucléaire militaire. El Guedaffi a mis fin de façon brusque à son programme secret juste après la chute de Baghdad. Tout en montrant sa disponibilité à tisser des relations diplomatiques fortes avec les Occidentaux après avoir réglé la crise des attentats terroristes ayant visé les avions transportant des ressortissants anglais et français en indemnisant fortement les familles des victimes. L'Algérie est appelée à adopter une attitude de vigilance face à ce pays voisin à la politique controversée qui mène, ces derniers jours, une campagne pour le boycott du sommet arabe de Riyad. La Libye, faut-il le rappeler, entretient des relations conflictuelles avec le Royaume wahabite des Al Saoud.