Sauf grande surprise, le duo «Ségo-Sarko» devrait animer le second tour. Attention à la marche! Le grand jour est arrivé pour les Français. Douze candidats passent, aujourd'hui, l'épreuve de l'urne pour le premier tour de l'élection présidentielle. Mais seuls deux passeront au deuxième tour. La course est, ainsi, rude pour la nomination du 6e président de la Ve République, la 23e depuis la fondation de la République française. Un pack de douze concurrents, issus de différents courants et de couleurs politiques diverses, est présenté aux Français: droite, gauche, ni droite ni gauche, centriste-extrême droite, extrême gauche et communiste. Nicolas Sarkozy, (UMP), Ségolène Royal (Union pour la démocratie française) (Parti socialiste), François Bayrou et Jean-Marie Le Pen (Front national) sont les maillons forts de ces joutes électorales. Sauf grande surprise, le duo «Ségo-Sarko» est bien parti, selon les sondages, pour animer le deuxième tour prévu le 6 mai prochain. La bousculade entre les deux favoris a commencé bien avant les autres concurrents. Ils ont mené, d'abord, la lutte au sein de leurs propres partis. Sarkozy a misé sur cette élection depuis son installation à la tête du ministère de l'Intérieur. La démission du Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, après le rejet par les Français de la Constitution européenne, et l'échec du programme CPE (contrat première embauche), de Dominique de Villepin, ont permis de déblayer le terrain à Sarkozy pour accaparer l'UMP, (parti qui a pris la relève du RPR de Jacques Chirac). La droite s'est rassemblée derrière Sarkozy, en dépit du froid entretenu avec le candidat de l'UDF, François Bayrou. Idem pour Ségolène Royal. Elle s'est battue toute seule contre les «éléphants» du Parti socialiste. Mais elle a réussi à sortir victorieuse, puisque plébiscitée par les membres du PS en convention, une première en France, boutant les poids lourds du PS que sont Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn. Cela explique bien la raison pour laquelle le jeu est verrouillé, même très serré, entre les deux candidats. Mais le spectre de 2002 demeure vivace dans les esprits des Français, lorsque Jean- Marie Le Pen, du Front national (F.N.), avait coupé, à la surprise générale, l'herbe sous les pieds de Lionel Jospin, en se qualifiant ainsi au deuxième tour. Ce dernier a annoncé, cette année encore, la couleur en promettant «un scénario Jospin version 2007». De son côté, le centriste François Bayrou se met déjà dans la peau d'un président en devenir. Concernant le reste des candidats (une communiste, un de l'extrême droite, un «révolutionnaire», quatre de la «gauche plurielle» et enfin un représentant de la pêche et de la chasse), ne sont là que pour le décor. Pourquoi? Toutes les élections présidentielles qui ont eu lieu sous la Ve République ont respecté une seule logique: soit la droite, soit la gauche. Depuis la naissance de la Ve République, quatre présidents de la droite ont siégé à l'Elysée, tandis que la gauche n'a eu qu'un seul représentant, François Mitterrand (pour deux mandats). En 1965, la France a organisé sa première élection présidentielle au suffrage universel direct. Le président sortant, Charles de Gaulle, coiffe au poteau le socialiste François Mitterrand, lors du deuxième tour, en le dépassant de 2,5 millions de voix pour être réélu un second mandat. De Gaulle démissionne après les événements de mai 1968 et une élection anticipée est provoquée. Suite à sa dispersion en plusieurs rangs, la gauche a échoué lors de cette élection de 1969. Deux candidats de la droite animaient le second tour. Georges Pompidou, courant gaulliste, affrontait Alain Poher (un autre candidat de la droite modérée). Ayant tiré la leçon de son dernier échec présidentiel, la gauche décide de s'unir autour d'un seul candidat: François Mitterrand. Une nouvelle fois, elle se trouvait dos au mur. Valery Giscard d'Estaing, - centriste- remporte cette nouvelle élection anticipée (le président Pompidou décède avant la fin de son mandat). La gauche n'arrive toujours pas à trouver le chemin de l'Elysée. Dans le même esprit, et portant un air de revanche, la France organise sa quatrième élection en 1981. Après l'effort, c'est le confort. La division Chirac-Giscard d'Estaing profite à la gauche qui s'installe pour la première fois sur le fauteuil de l'Elysée, dominé jusque-là par la droite. Mitterrand est le premier président de la gauche sous la Ve République. Une expérience plutôt positive. Celui-ci décroche un deuxième mandat, lors du duel de 1988, qui l'a opposé à son Premier ministre, Jacques Chirac (droite). Les Français ont, semble-t-il, trouvé dans la gauche une certaine sérénité grâce à la stabilité retrouvée. Après quatorze ans de pouvoir, c'est la fin de l'ère socialiste. La droite revient, de nouveau, sur le haut du podium. Jacques Chirac récupère le pouvoir en 1995, dans un duel farouche qui l'a opposé à Lionel Jospin. Le même scénario se reproduit en 2002, après le coup de tonnerre de Jean-Marie Le Pen qui a éliminé le socialiste Jospin, se qualifiant au deuxième tour. Pour barrer la route au représentant de l'extrême droite, Chirac s'est vu plébiscité (82% des suffrages, le plus important jamais réalisé en France depuis la fondation de la République. Un deuxième mandat quinquennal, après l'amendement de la Constitution, a ramené la durée du mandat de sept à cinq ans. Donc, ce n'est pas une surprise de voir la gauche et la droite encore une fois au coude-à-coude dans la course à l'Elysée. L'urne va rendre, ce soir, son premier verdict, confirmant ou infirmant ainsi les derniers sondages.