Enjeu n Eliminés au premier tour, le centriste et le leader de l'extrême droite restent cependant sur l'échiquier : leurs voix qui aiguisent les convoitises seront capitales. Incertain, serré et palpitant le match Sarko-Ségo le sera assurément jusqu'au bout avec un tandem Bayrou-Le Pen dans la peau d'arbitre et détenant, de part un immense gisement électoral, la clé du sacre final. Car, s'ils avaient perdu leur pari et éliminés dès le premier tour, le centriste Frangois Bayrou et le leader d'extrême droite Jean-Marie Le Pen avaient, cependant, réalisé des scores qui les placent désormais en position d'arbitres, un très attendu 6 mai 2007. Bayrou, qui voulait «dynamiter» le clivage gauche-droite, arrive troisième, triplant son score de 2002, avec 18,55% des voix. Victime d'un taux de participation inégalé sous la Ve République, Jean-Marie Le Pen qui se disait persuadé qu'un «tsunami électoral» allait le porter au second tour comme en 2002, lorsqu'il avait éliminé le socialiste Lionel Jospin à la surprise générale, aura été, lui, le grand perdant du vote. Il est arrivé cette fois-ci quatrième avec 10,51% des suffrages contre plus de 16% en 2002. Roland Cayrol, directeur général de l'institut de sondages CSA l'affirme : «Jean-Marie Le Pen et Frangois Bayrou sont en position d'arbitres» et le second tour «risque d'être très serré». Les 7 millions de voix obtenues par Bayrou sont d'autant plus importantes pour la socialiste que, selon lui, Sarkozy peut compter sur au moins 80% des voix de Jean-Marie Le Pen alors que le report Bayrou-Royal est moins évident. Bayrou avait parié sur la volonté d'une majorité de Français, selon les sondages, d'en finir avec la bipolarisation qui a façonné le paysage politique français depuis… 1958. Plusieurs anciens ministres socialistes, dont l'ancien Premier ministre Michel Rocard, avaient appelé à une «alliance» avec le centre. Et si Ségolène Royal a rejeté la proposition, d'autres poids lourds du PS comme l'ancien ministre de l'Economie Dominique Strauss-Kahn avaient donné rendez-vous après le premier tour. Mais à droite aussi, le score de Bayrou aiguise les convoitises en vue du 6 mai mais également des élections législatives de juin. D'autant qu'il sonne l'échec, du moins dans l'immédiat, de la volonté de l'UMP, créée en 2002 et présidée par Sarkozy, de rassembler toute la droite, y compris son aile centriste. Quant à Jean-Marie Le Pen, 78 ans, il paye selon les analystes la stratégie de Nicolas Sarkozy, qui n'avait pas fait mystère de sa volonté de capter les voix du Front national. Ce qui lui a valu de violentes diatribes du vieux leader d'extrême droite, dont c'était la cinquième et sans doute la dernière campagne présidentielle. La gauche avait dénoncé en fin de campagne un rapprochement entre l'UMP et le Front national, ce qu'avait fermement démenti M. Sarkozy. Une consigne de vote en faveur de M. Sarkozy «n'est pas à l'ordre du jour» pour l'instant, a dit Le Pen, précisant qu'il donnerait la consigne «qu'il estime être la bonne» le 1er mai prochain.