Il s'agit peut-être des plus importants maillages policiers depuis les élections législatives de 1997. Les premiers détecteurs de métal commencent à faire leur apparition dans les grandes surfaces, les centres commerciaux et les axes urbains névralgiques, surtout à Alger et à Boumerdès, deux villes particulièrement ciblées par le Gspc-Aqmi. Les dispositifs sécuritaires gagnent aussi en hommes et en logistique, et l'on peut constater dans les trois wilayas du centre, les plus sensibles aux pénétrations terroristes, Alger, Boumerdès et Tizi Ouzou, un accroissement des renforts policiers, gendarmes et militaires. Des dizaines de camions militaires ont traversé jeudi et vendredi derniers la ville de Boumerdès dans les deux sens. Magirus, Jeeps et contingents de l'armée ont traversé les villes côtières du Figuier, Sguirat et Sablière pour aller ratisser du côté de Zemmouri et Dellys. Jamais peut-être depuis les élections législatives de 1997, l'Algérie n'a connu pareils renforcements du dispositif sécuritaire. Il s'agit peut-être des plus importants maillages policiers depuis lesdites élections. On assiste au retour des images qu'on pensait effacées du quotidien des Algériens: gilets pare-balles, l'arme en bandoulière, la main nerveuse sur la crosse de l'arme automatique, les carrés de sécurité entourant les commissariats de police et les brigades de gendarmerie, les barrières de protection redéployées autour des établissements publics et de sécurité. En un mot, toute la panoplie d'une situation d'urgence. Et plus on se rapproche de Boumerdès, plus ces images gagnent en intensité et en rigueur. Ces élections législatives interviennent, en fait, au mauvais moment, c'est-à-dire à un moment où les autorités avaient besoin de tous les espaces et de toute latitude pour engager un nouveau bras de fer avec les groupes armés. Ceux-ci, affiliés au Groupe salafiste pour la prédication et le combat, devenu Al Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi), ne sont certainement pas intéressés par les élections législatives, mais feront, vraisemblablement, en sorte qu'elles soient perturbées par un coup d'éclat. Alger, dont la résonance médiatique est exceptionnelle, est devenue un enjeu majeur pour Aqmi. Un petit attentat pendant les législatives va multiplier par cent l'effet et la prépondérance du Groupe salafiste, résonance d'autant plus amplifiée que les correspondants de la presse étrangère assureront la couverture internationale pour Aqmi. Face à cet acharnement terroriste, les autorités prennent au sérieux la moindre menace. Déjà, pour rendre «lisibles» des élections menées tambour battant, et dans un tohu-bohu général, elles ont délimité l'aire de jeu. L'affichage durant la campagne pour les élections législatives, qui a débuté officiellement jeudi, obéit à une réglementation et à des normes, rappelées par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales dans une récente circulaire. Ces mesures interdisent les sites d'affichage à proximité des centres de vote, octroient les prérogatives de désignation des endroits d'affichage à l'administration communale, «sous l'animation et le contrôle du wali». D'autres mesures interdisent aussi l'affichage de nuit, arrêtant les horaires pour celui-ci, de 07 heures à 19 heures, le long de la période de la campagne électorale qui s'étend officiellement, du jeudi 26 avril au lundi 14 mai 2007. La répartition des sites d'affichage obéit, en outre, à des normes, dont le nombre fixé par le décret exécutif, en fonction du nombre d'habitants par commune, à savoir, 10 sites pour les communes de 20.000 habitants, 16 sites pour les communes de 20.001 à 40.000 habitants, 24 pour les communes de 40.001 à 100.000 habitants, 30 pour les communes de 100.001 à 180.000 habitants et 01 site pour chaque tranche de 10.000 habitants pour les communes de plus de 180.000 habitants. La campagne, qui doit durer trois semaines, jusqu'au 14 mai, mettra aux prises plusieurs partis, qui vont du «mastodonte» FLN au lilliputien MEN, et plus de 18.760.400 électeurs sont appelés à voter, 10.083.579 hommes et 8.676.821 femmes. Le vote aura lieu au scrutin de liste majoritaire, à la proportionnelle de wilaya. Au total, 12.229 candidats, regroupés dans 1042 listes présentées par 24 partis et 102 listes indépendantes, se disputeront les 389 sièges de la prochaine Assemblée nationale. Les autorités ont aussi décidé, selon une circulaire du ministère de l'Intérieur, que les réunions devaient obtenir l'autorisation préalable des autorités et se tenir dans des «salles fermées et sécurisées». Plus de 2700 salles et lieux de réunion sont prévus. Elles peuvent se tenir aussi à titre exceptionnel dans des «aires de jeux et des places publiques» dans les communes dépourvues de salles de réunion. Les manifestations de rue sont interdites à Alger depuis 2001, et l'Algérie vit sous le régime de l'état d'urgence décrété en février 1992. La Commission nationale de préparation a lancé un appel à la vigilance «afin de contrecarrer toute velléité criminelle visant à perturber le scrutin», à la suite des attentats islamistes à la voiture piégée du 11 avril. Ces attentats, revendiqués par la branche d'Al Qaîda au Maghreb islamique (ex-Gspc), ont fait 30 morts et plus de 200 blessés.