Les brigades motorisées et mobiles appuient les barrages fixes le long des autoroutes menant à et en dehors d'Alger, et l'on sent, diffus et perceptible à la fois, ce vague sentiment d'anxiété. Alger a bénéficié d'un apport supplémentaire de 15.000 policiers afin de sécuriser les élections législatives. Selon une source policière de haut rang, «pratiquement tous les corps de sécurité ont été mobilisés à cet effet, et hormis la présence accrue de policiers à l'entrée des bureaux de vote, il y aura aussi des barrages fixes dressés à l'entrée des axes menant vers la capitale pour filtrer le mouvement des véhicules, des barrages mobiles et improvisés, des brigades mobiles et des ´´descentes-fouilles´´ dans les points ciblés». «Les marchés hebdomadaires seront supprimés le jeudi, ainsi que l'entrée dans la capitale des gros tonnages, des semi-remorques et autres poids lourds. Les véhicules immatriculés hors wilaya seront contrôlés. Le côté est (menant d'Alger vers Boumerdès et Tizi Ouzou) sera certainement le plus hermétiquement quadrillé». On le voit déjà, les barrages routiers deviennent de plus en plus rigoureux, causant parfois des embouteillages énormes, et des policiers ont pris position, depuis deux jours, dans et autour des bureaux de vote et des centres névralgiques de la capitale. Les brigades motorisées et mobiles appuient les barrages fixes le long des autoroutes menant à et en dehors d'Alger, et l'on sent, diffus et perceptible à la fois, ce vague sentiment d'une sécurité accrue mais qui nourrit l'anxiété. Ces nouveaux effectifs s'ajoutent, en fait, à ceux déjà sur place dans le cadre du nouveau plan de sécurité dont s'est dotée Alger depuis le début de l'année, puis depuis les attentats du 11 avril 2007. Aussi, et pour la première fois depuis le début de la lutte antiterroriste, les SMS sont utilisés pour impliquer les citoyens dans la lutte en Algérie. Des SMS pour dénoncer et venir à bout des groupes armés. Depuis plusieurs semaines, les services de sécurité algériens ont appelé par SMS les abonnés au téléphone mobile à dénoncer les terroristes en les signalant à un numéro de téléphone mis gratuitement à leur disposition. Le message lancé hier dit: «Message des forces de sécurité: Cher(e) citoyen(ne), nos frères souffrent du résidu des terroristes en fuite. Le devoir vous appelle à signaler toute menace. Appeler numéro gratuit 1590», peut-on lire sur cet SMS envoyé aux Algériens sur leur téléphone portable. S'adressant aux «citoyennes et aux citoyens» et donnant une série de numéros de téléphone pour «transmettre toute information sur les actes, les mouvements et les lieux abritant les terroristes», ces placards soulignaient que «sauvegarder la sécurité et la stabilité du pays est un devoir pour tous les Algériennes et les Algériens, quelles que soient leurs opinions». C'était également la première fois que les services de sécurité, notamment l'armée en première ligne contre les maquis islamistes, adressaient des appels directs par affiches pour recueillir des informations sur les islamistes armés. En janvier, les services de sécurité avaient demandé l'aide des Algériens pour lutter contre les islamistes armés dans des affichettes placardées ou distribuées dans des régions censées abriter des maquis, notamment en Kabylie (est) ou subsisteraient quelques centaines d'éléments armés du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), devenu branche armée d'Al Qaîda au Maghreb. Les premiers détecteurs de métal ont fait leur apparition dans les grandes surfaces, les centres commerciaux et les axes urbains névralgiques, surtout à Alger et à Boumerdès, deux villes particulièrement ciblées par le Gspc-Aqmi. Les dispositifs sécuritaires gagnent aussi en hommes et en logistique, et l'on peut constater dans les trois wilayas du Centre, les plus sensibles aux pénétrations terroristes, Alger, Boumerdès et Tizi Ouzou, un accroissement des renforts policiers, gendarmes et militaires. Des dizaines de camions militaires ont traversé Boumerdès dans les deux sens. Magirus, Jeeps et contingents de l'armée ont traversé les villes côtières du Figuier, Sguirat et Sablière pour aller ratisser du côté de Zemmouri et Dellys. Jamais peut-être depuis les élections législatives de 1997, l'Algérie n'a connu pareils renforcements du dispositif sécuritaire, et il s'agit peut-être des plus importants maillages policiers depuis dix ans. On assiste au retour des images qu'on pensait effacées du quotidien des Algériens: gilets pare-balles, l'arme en bandoulière, la main nerveuse sur la crosse de l'arme automatique, les carrés de sécurité entourant les commissariats de police et les brigades de gendarmerie, les barrières de protection redéployées autour des établissements publics et de sécurité. En un mot, toute la panoplie d'une situation d'urgence. Et plus on se rapproche de Boumerdès, plus ces images gagnent en intensité et en rigueur. Ces élections législatives interviennent, en fait, au mauvais moment, c'est-à-dire à un moment où les autorités avaient besoin de tous les espaces et de toute latitude pour engager un nouveau bras de fer avec les groupes armés. Ceux-ci, affiliés au Groupe salafiste pour la prédication et le combat, devenu Al Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi), ne sont certainement pas intéressés par les élections législatives, mais feront, vraisemblablement, en sorte qu'elles soient perturbées par un coup d'éclat. Alger, dont la résonance médiatique est exceptionnelle, est devenue un enjeu majeur pour Aqmi. Un petit attentat pendant les législatives va multiplier par cent l'effet et la prépondérance du Groupe salafiste, résonance d'autant plus amplifiée que les correspondants de la presse étrangère assureront la couverture internationale pour Aqmi. La Commission nationale de préparation a lancé un appel à la vigilance «afin de contrecarrer toute velléité criminelle visant à perturber le scrutin», à la suite des attentats à la voiture piégée du 11 avril. Ces attentats, revendiqués par la branche d'Al Qaîda au Maghreb islamique (ex-Gspc), ont fait 30 morts et plus de 200 blessés.