Le Gspc affirme que pas un sou n'est parvenu de l'étranger aux caisses de l'organisation, malgré la collusion avérée maintenant avec Al Qaîda. La France et l'Espagne sont les deux principales sources de fonds des terroristes islamistes d'Al Qaîda au Maghreb, et des réseaux de financement y ont été mis en place par des cellules dormantes. C'est ce que rapporte le quotidien espagnol à grand tirage El Pais de mardi. Le journal affirme qu'une équipe de procureurs, juges et enquêteurs travaillent depuis octobre 2006 sur un réseau complexe établi dans ces deux pays et qui financerait les terroristes sévissant au Maghreb. «Délinquance et recours à la charité sont les principales sources de revenus des terroristes en France et en Espagne», selon le journal de centre gauche proche du pouvoir socialiste. «Le réseau passe également par les paradis fiscaux», ajoute aussi le quotidien. Une enquête de l'Audience nationale, plus haute instance pénale espagnole, montre que des fonds en provenance des Bahamas sont arrivés entre les mains d'un des membres du réseau en Espagne, et ont été camouflés par de fausses factures au nom d'une entreprise d'informatique japonaise. Les affirmations tranchantes du journal espagnol sont cependant à prendre avec précaution. Madrid, qui vient d'être contaminé par «la phobie du Gspc», semble, depuis les attentats de Madrid du 11 mars 2004, prendre au sérieux la moindre menace, d'où qu'elle vienne, et quelle que soit sa portée. Concernant le financement et l'argent que le Gspc, devenu Aqmi, détient et fait tourner, les «sources d'approvisionnement locales» restent les plus importantes. Braquages de banques, rackets, impôts sur les plantations, attaques des convoyeurs de fonds et prélèvements sur les biens agricoles et commerciaux sont les cinq premières sources d'autofinancement, et même si le financement empruntant des canaux étrangers est un apport supplémentaire et incontestable, cela reste dérisoire par rapport aux sources principales. Dans un communiqué diffusé sur un site web, lorsque la presse faisait état de «sommes colossales» et de «butin de guerre» détenus par le Gspc, celui-ci démentait détenir une quelconque fortune ou butin de guerre, et qualifiait les informations publiées par certains journaux de «grossiers mensonges que les réalités contredisent». Le Gspc affirmait que le butin de guerre dont parlent certains ne pouvait être que des sommes insignifiantes «même pas capables de payer le dixième des dépenses de l'organisation en armes légères» et disait que ce financement «provenait de braquages et de vols commis sur des entreprises étatiques ou sur des personnes». Le communiqué précisait que «en matière de butin, le Gspc possède à peine de quoi approvisionner ses troupes de combat et les équiper». Concernant les informations qui disaient que l'argent provenait aussi de l'extérieur, le Gspc soutient que pas un sou n'est parvenu de l'étranger aux caisses de l'organisation, malgré la collusion avérée maintenant avec Al Qaîda. Le Gspc avait élaboré une stratégie d'autofinancement basée sur le prélèvement d'impôts sur les plantations et les récoltes auprès des agriculteurs de régions riches comme Dellys, Sahel Bouberak, Lagatta, Zemmouri, et tout le littoral allant de Boumerdès à Azzefoun. La présence de riches commerçants dans ces régions de la Grande Kabylie a été une seconde autre grande source d'approvisionnement. Viennent par la suite, en ordre, le petit racket, le braquage de transport de fonds et le vol dans les banques, les bureaux de poste, les impôts et les contributions communales diverses. La vidéothèque du groupe salafiste montre clairement des actions perpétrées en Kabylie contre des transports de fonds et le braquage de banques, procédés qui avaient fait florès en Kabylie en 2004 et 2005. L'un des plus grands braquages perpétrés avait ciblé un transport de fonds à la sortie de Tizi Ouzou et 150.000 euros avaient été récupérés par le groupe, auteur de l'embuscade mortelle à l'explosif contre les deux voitures de la banque. La vente d'armes dans les pays du Sahel est aussi une source d'approvisionnement plus intéressante que le dangereux canal espagnol ou français. Les vastes zones désertiques d'Agadez (nord) et de Diffa (sud-est), limitrophes de l'Algérie, de la Libye, du Tchad et du Nigeria, sont devenues des repères de trafiquants d'armes, de drogues et de véhicules. Cette insécurité pousse les tribus nomades et les commerçants, à s'armer pour se protéger contre les voleurs de bétail et les bandes armées. En 2005, la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) a estimé à près de 10 millions, le nombre d'armes légères et de petits calibres qui circulent à l'intérieur des 15 pays membres. Le Tchad, qui est entré dans une phase cruciale de sa crise, et bien qu'il n'offre pas de frontières directes avec l'Algérie, n'en constitue pas moins une zone de transit, via le Niger, vers le sud algérien pour les marchands d'armes, très entreprenants dans la région, surtout en période de troubles. Voilà pourquoi les vastes bandes de la région saharo-sahélienne constituent aujourd'hui un danger constant. Zones grises s'il en est, créées par des contrebandiers locaux, des cigarettiers de grand chemin, des commerçants d'armes, des Touareg séparatistes et des islamistes séditieux, et tensions suspectes qui coïncident avec le moment où Washington met en place des structures de surveillance de ce vaste territoire saharien, dans le cadre de son plan dit Pan-Sahel Initiative, le PSI. L'épisode du Gspc avec la prise d'otages au Mali, au Niger, puis au Tchad, a eu le mérite de percer à jour le mystère qui enveloppait les routes et les cheminements des armes légères pour arriver jusqu'aux maquis algériens du Nord. Une partie de cet armement est destinée à la vente, et donc au financement.