Moha revient cette semaine. Il aura ainsi inspiré pas mal d'artistes. Feu Malek Bouguermouh avait bien adapté Moha le fou, Moha le sage de Tahar Ben Jelloun, au théâtre de Béjaïa. Il y a deux semaines, Badis Foudala présentait à la salle El Mougar Le Fou sage (el mahboul el aâqel), une comédie sociale qui évoque cette «folie» qui caractérise les artistes et les pousse à vouloir bouleverser les choses et à repousser les limites de l'impossible. Cette fois, c'est autour du CCF d'Alger d'accueillir, ce soir et demain, à 19h00, une nouvelle adaptation, mise en scène et interprétée par Karim Tayeb, sur une scénographie de Baudoin Luquet. Une pièce écrite en français avec des passages de chants en arabe. Moha...Le vent des sables est un torrent qu'on n'arrête pas, fou à jamais dans la vision des autres. Du pouvoir, il peut continuer à parler, personne ne lui prête la moindre attention, pourtant ses paroles sont autant de feux d'artifice lancés sur la place publique. Alors il parle, seul ou avec les autres. Moha....Le vent des sables est une création du Théâtre de l'Autre. Une compagnie qui oeuvre dans cette voie de connaissance et de reconnaissance pour une découverte sensible des mémoires de là-bas et d'ici. «L'autre» que l'on regarde, mais qu'on ne voit pas, qu'on croise, mais qu'on ne touche pas, qu'on entend, mais qu'on n'écoute pas! «Je ne suis pas un saint, je ne suis pas une pierre sacrée. Je ne suis qu'un homme, un homme pauvre. Un homme riche de sa folie, riche de sa parole. Ahmed mon fils, Rachid ma tendresse...Au nom de Dieu, on vous a ceinturés de dynamite et on vous a tracé un chemin, celui qui mène au paradis...Soixante-dix vierges vous attendent...Ah! mes enfants, le paradis si vous saviez... On s'y ennuie pour l'éternité! On n'a pas besoin de dynamite pour y accéder, alors pourquoi cette ceinture de dynamite?». Moha lance sa diatribe à tous ceux qui veulent bien l'entendre ou pas, contre toute forme d'injustice. Un réquisitoire aussi politique que l'auteur dresse sur l'autel des inégalités et des fanatismes. Et pour secouer les consciences, il invoque son maître Omar El Khayam: «Je n'ai jamais murmuré la moindre prière, je ne sais s'il existe une miséricorde, et si je vais en enfer, mais je sais que j'étais toujours sincère.» Ancien élève du Conservatoire national de Lille, Karim Tayeb passe par le Théâtre populaire des Flandres, la Rose des Vents, le Théâtre de la Métaphore Daniel Mesguich, avant un passage de quatre années à Strasbourg. En 1990, il prend alors le parti de travailler sur la francophonie du Sud. Karim Tayeb est à l'origine de plusieurs créations dont La Poudre d'intelligence de Kateb Yacine. Baudoin Luquet, scénographe, est diplômé des Arts décoratifs de Paris. Il enseigne à l'Ecole d'architecture de Lille et développe une pratique de l'espace par des structures qui évoquent les reliefs constructivistes et les collages modernes. Un vent d'idées et de réflexions passeront ce soir par le Centre culturel français, à saisir au vol, absolument!