L'expectative et le wait and see au programme. Le paysage politique paraît se dessiner assez doucement en Kabylie. Avec les élections, une autre réalité semble vouloir se faire jour, et des partis donnés comme importants se sont découverts presque nus ou réduits à leur plus simple expression. II est vrai que les citoyens sont plus exigeants et ne se contentent plus de mots, fussent-ils les plus beaux. Les partis à ancrage local ont, certes, conservé leur empreinte et, de nouveau se sont essayés à se faire une place au soleil. Mais encore une fois, et au risque de se répéter, la Kabylie est des plus ardues à gagner et les gens qui prétendent vouloir s'y implanter, se doivent de mouiller le burnous et aussi s'attendre à durement crapahuter pour conquérir les coeurs. Les partis traditionnels Les forces en présence et installées à demeure depuis l'avènement du multipartisme, comme le FFS et le RCD, ont eu maille à partir avec l'apparition du mouvement des archs. Un mouvement certes, aujourd'hui, éclaté et de très peu d'emprise sur la société. Un mouvement qui, d'après les observateurs au fait de la scène kabyle, a enfreint le code d'honneur du mouvement citoyen en mettant le pied dans le politique. D'ailleurs, plusieurs délégués se sont présentés dans les listes indépendantes. Ce qui n'a pas été du goût des partis, traditionnellement ancrés dans la région, qui voient en la participation des archs, un concurrent potentiel. Le FFS est et a su rester une force qui compte, malgré un environnement que l'on a voulu difficile pour lui. Le nom de son président, M.Hocine Aït Ahmed et son parcours, est le plus sûr des garde-fous pour ce parti. Aussi et malgré cette petite «zizanie» née dans ses rangs, ce parti a su et pu redresser la tête et rester toujours une force qui compte. Son frère ennemi, le RCD, créé par un ancien responsable du FFS, transfuge de ce parti, est lui aussi et après avoir traversé des temps difficiles, aujourd'hui de retour sur la scène régionale. Le RCD, contrairement au FFS, pense que la participation aux législatives est, en fait, un accompagnement pour le régime finissant. Mis à part ces deux partis, d'autres grosses pointures se sont lancées dans la bataille. Le FLN d'abord, qui a pu se réinscrire dans la région en faisant un joli score lors des élections locales passées alors que le RND est venu juste derrière avec une véritable opération de séduction et une volonté certaine de se retrouver au lendemain du 17 mai, comme la première force dans la région. Le parti de Belkhadem s'est permis même une percée lors des dernières sénatoriales. La bataille est rude entre les partis. C'est à qui rameutera le plus de monde en se demandant d'ores et déjà d'abord, les raisons du peu d'engouement populaire pour les meetings et autres rencontres, ensuite la question qui se pose est de savoir par quelle nouvelle démarche il va falloir aborder le terrain, afin de chasser cette impression de morosité qui, des semaines durant, a collé à la campagne. Il est vrai que la réponse a fusé d'elle-même des citoyens, ces derniers se sont rendus en nombre aux meetings animés par les mentors tels Ouyahia, Belkhadem, Sadi, Ali Fawzi Rebaine etc. C'est dire que les citoyens savent choisir quel discours écouter. Ils refusent de perdre leur temps avec ces candidats qui, souvent se trompent de mandat et confondent allègrement le législatif avec l'APC du coin. Des discours indigents, souvent mièvres, portés par des personnes dont généralement la formation politique vole au ras des pâquerettes, noyant de par leur suffisance et leur incompétence avérées les candidats autrement intéressants et qui ont des choses à dire et.., à faire. De leur côté, les partis islamistes, même s'ils n'ont aucune chance de prendre pied dans la région, estiment que ces dernières valent tout de même le détour. La rue est comme déconnectée de ce qui aurait dû et pu être une fête où le verbe roi trace la route vers un meilleur devenir. Certes, et c'est normal en démocratie, chaque segment politique a ses visions et c'est ainsi que les adeptes du boycott, dans les espaces souvent restreints par la force des choses, semblent accompagner la population qui donne l'impression d'être en retrait de ce scrutin. Surtout que la région continue de se débattre dans ses éternels problèmes. La situation économique et sécuritaire, le chômage et le manque d'investissements constituent les soucis majeurs des populations, dont la plupart continue de faire des pensions de retraites, notamment des émigrés, leur principale source de revenus. La campagne et les citoyens S'il est un fait majeur à noter lors de la campagne qui s'achève, c'est le peu d'engouement des citoyens. Tant dans les villes que dans les villages, les meetings, conférences et autres rencontres ne drainent pratiquement pas les foules, exception faite des rencontres animées par les dirigeants de parti et encore ceux ayant quelque ancrage social. Le citoyen, et quelle que que soit sa tendance politique, est tout simplement comme non concerné par ces bruits qui lui semblent loin de toute objectivité politique. Ammi Smaïl, un vieux retraité de chez Sonelgaz, dira: «Vous savez, j'ai l'habitude des campagnes électorales, je sais ce que c'est et cette campagne est des plus fades». Comprenez le désarroi des électeurs, quand un jeune aspirant au siège de député ne trouve rien de mieux à faire valoir que la promesse de «régler le problème du chômage des jeunes dès qu'il sera élu». Cette inconséquence a fait sourire plus d'un, mais en même temps, fait grincer des dents ceux qui savent que ces choses sont de pures affabulations. Promettre de régler le chômage!!! Un autre citoyen descendu du village pour faire ses emplettes en ville explique: «Pourquoi perdre son temps à aller écouter des gens qui ne font aucune différence entre une mairie et l'APN, on prend les gens pour qui? Personnellement, si c'est pour élire des gens pareils, je crois que je ne vais pas me déranger. Fort heureusement, il y a des partis qui proposent des candidats autrement sérieux!» «Cette campagne, c'est vrai, est ouverte pour tous, mais on n'a pas le droit de faire traîner la politique dans le caniveau», dira avec ces mots Sadek, un jeune homme plein de bon sens paysan. Kaci, un adepte du boycott, explique que «voter ne sert à rien», et il conseille vivement à tous de l'imiter car, selon lui, «la solution n'est pas dans l'urne, mais dans un changement radical de politique». La Kabylie, qui s'apprête, à l'instar des autres régions du pays, à élire des représentants à l'APN, a vécu une campagne des plus mornes. Une campagne revivifiée certes, de temps à autre par les meetings de certains chefs de parti, mais on notera, le peu d'engouement des gens. Il faut souhaiter que le scrutin se passe dans la sérénité et le calme.