Demain et vendredi prochains, les ministres de la Défense américain et européens affronteront les Russes sur des questions qui risquent de relancer la course aux armements nucléaires. Le Conseil de l'Atlantique Nord, se réunira au niveau des ministères de la Défense les 14 et 15 juin, au siège de l'Otan, à Bruxelles. Se tiendront les mêmes jours, toujours au niveau des ministères de la Défense, le Conseil de partenariat euro-atlantique (Cpea), le Conseil Otan - Russie (COR), le Groupe des plans nucléaires (NPG), le Comité des plans de défense (DPC) et le Conseil avec les pays non-Otan, qui participent à la Isaf pour l'Afghanistan. A cette occasion, une conférence de presse a été tenue, lundi après-midi au siège de l'Otan, par le secrétaire général adjoint, directeur par ailleurs, des affaires politiques, M.John P. Colston. D'emblée, M.Colston a insisté sur le caractère officiel de cette rencontre annuelle, «durant laquelle des décisions seront prises». Sur les huit réunions prévues pour ces deux jours, ce sont celles réservées au projet de bouclier antimissile, l'avenir du Kosovo, la Force de réaction rapide de l'Otan et celle de la réforme du commandement de l'Organisation transatlantique qui vont dominer les débats avec les journalistes accrédités. Sur le dossier du projet de bouclier antimissile américain en Europe, le directeur politique a été clair: «La décision sera prise par l'Otan», a-t-il affirmé. Il a laissé sous-entendre qu'il était presque impossible de remettre en cause le bouclier américain en Europe, «car c'est un projet qui date de plus de cinq ans, entériné, justement lors du Sommet de Riga de 2005.» Il a ajouté que les Russes étaient parfaitement informés de ce projet, «aujourd'hui à un stade avancé». Commentant une question sur la proposition de Vladimir Poutine de substituer la base antimissile de l'Azerbaïdjan au projet américain, M.Colston a estimé qu'«il y a le problème de l'adaptation technologique», avant d'ajouter avec prudence: «De toute façon il est trop tôt donner une réponse là-dessus. Pour nous -Otan- c'est le système américain qui nous intéresse, mais nous sommes heureux que M.Poutine choisisse la collaboration, plutôt que l'affrontement. Nous verrons tout cela au Conseil Otan-Russie». Arrive le deuxième dossier assez complexe, celui de l'avenir du Kosovo. Les journalistes ont rappelé au SG adjoint, la déclaration du président américain, George W. Bush, faite lors de sa visite en Albanie dimanche dernier. Déclaration par laquelle il s'est prononcé pour l'indépendance du Kosovo: le président américain affirmant que «cela a assez duré». Sachant l'opposition ferme de la Russie à une indépendance du Kosovo, George W.Bush ira-t-il jusqu'à se passer d'une résolution du Conseil de sécurité? «Une résolution du Conseil de sécurité, basée sur le rapport du Finlandais Martti Ahtisaari, est une voix sûre qui assurera une stabilité à la région», a estimé le SG adjoint de l'Otan. Et d'ajouter que l'Otan et l'Europe encouragent les voisins immédiats du Kosovo à aller dans ce sens -l'indépendance-, avec en perspective l'intégration, à terme, de la Serbie à l'Otan, lui préparant ainsi l'entrée à l'Union européenne. Il a conclu qu'il n'y a pas de plan «B» pour le Kosovo, et qu'il n'y a pas encore de veto russe sur la question. Autrement dit, sur ces deux dossiers chauds, les USA et l'Europe ne semblent pas vouloir céder un seul «pouce de terrain». Et lorsque le SG adjoint de l'Organisation transatlantique précise que le Groupe nucléaire «va réfléchir, lors de sa rencontre de jeudi, à la nouvelle politique de dissuasion nucléaire pour le XXIe siècle», il y a tout lieu de dire que l'affrontement entre l'axe Atlantique et la Russie serait inévitable. L'examen de la situation - l'état - de la Force de réaction rapide de l'Otan en Afghanistan, ainsi que la réforme des structures des différents commandements de l'Otan, lors de ces deux journées de rencontres indiquent, on ne peut mieux, que le temps de la guerre froide n'est pas si révolu que l'on ne pouvait le croire. Dans son essai L'Art de la politique, Gaston Bouthoul, vice-président de l'Institut international de sociologie et professeur à l'Ecole des hautes études sociales dans les années soixante, écrivait déjà: «Notre progrès scientifique est au service de notre archaïsme politique. Plus que la bombe atomique, je crains la routine des gouvernants. Car ils paraissent, jusqu'à présent, du moins, quelle que soit l'idéologie dont ils se réclament, incapables d'imaginer d'autres solutions que la guerre à leurs compétitions traditionnelles. Tout comme au Moyen Age, chaque gouvernement s'estime justifié et consolé en soutenant que ses armements sont destinés à défendre la paix. Chacun estime que ses armes sont défensives, celles d'autrui offensives et que sa guerre sera une guerre juste. Notre civilisation, comme tant d'autres avant elle, mourra peut-être de ce sophisme d'autant plus redoutable qu'il est sincère. Car ne l'oublions pas, toutes les civilisations ont péri par la guerre.» No comment!