Me Ksentini reconnaît que «les chiffres sont assez importants mais il s'agit, confie-t-il, souvent de détention abusive.» Ils étaient plus de 320 Algérien détenus à travers le monde à la fin de l'année 2006 pour des activités en relation avec le terrorisme. Nombre d'entre eux ne sont pas encore jugés. Aux USA, ils ont le statut de combattants ennemis. Ils croupissent dans la célèbre et honteuse prison de Guantanamo qualifiée, il n' y a pas si longtemps, par Me Farouk Ksentini, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme de «Goulag américain tropical». Une zone de non-droit. Ces Algériens soupçonnés de liens avec le Groupe salafiste pour la prédication et le combat, actuellement rebaptisé Al Qaîda au Maghreb islamique, croupissent dans les prisons de Londres, Rome, Nouakchott, Kaboul et dans d'autres prisons tenues secrètes par les Américains. Parmi eux, certains ont été acquittés par les tribunaux qui les ont jugés. D'autres attendent d'être jugés. Les six Algéro-Bosniaques, détenus à Guantanamo ont été déjà acquittés et leurs familles indemnisées par le Tribunal criminel de la Bosnie alors qu'ils sont toujours prisonniers à Guantanamo et font toujours l'objet d'accusations d'anti-américanisme et subissent la torture la plus abjecte. Au total, 25 détenus sur les 385 encore prisonniers à Guantanamo sont Algériens. Quelques-uns ont perdu la raison sous l'effet du traitement très spécial qu'ils subissent depuis des années. Un traitement, faut-il le signaler, inhumain et en contradiction avec les Conventions internationales régissant le statut des prisonniers. Guantanamo n'est pas la seule destination de ces Algériens pourchassés par les différents services secrets du monde. Un rapport publié par le Conseil de sécurité portant sur le terrorisme international, fait état que 70 détenus par les autorités pakistanaises sur un millier de personnes sont Algériens. Il s'agit de la deuxième plus grande proportion par pays, après l'Arabie Saoudite. Ils croupissent aussi dans les prisons marocaines, libyennes, italiennes, espagnoles, anglaises, françaises, mauritaniennes...Me Ksentini reconnaît que «les chiffres sont assez importants, mais il s'agit, confie t-il, souvent de détention abuside.» Il nous cite l'exemple «des deux frères Gaâd qui géraient un taxiphone en Italie et qui sont arrêtés pour avoir été soupçonnés d'entretenir des liens avec le terrorisme.» Ils attendent d'être jugés par la justice italienne. La commission qu'il préside a reçu une correspondance de la part des deux frères demandant une aide. A ce sujet justement, Me Ksentini dit «qu'ils ont droit à un procès équitable.» Et de rappeler que «les autorités algériennes sont tenues de protéger et de défendre les justiciables quels que soient les motifs pour lesquels ils sont détenus.» L'exemple du ressortissant algérien, Ismaïl Aïssa, récemment jugé en Mauritanie et acquitté après deux longues années de détention est très révélateur sur la légèretés des accusations portées contre les détenus algériens. Pour la première fois, des islamistes avaient droit à un procès public régulier dans ce pays. Dans plusieurs cas de figure, les dossiers sont vides. C'est la raison du retard de leur jugement. L'ex-détenu en Mauritanie a bénéficié de l'assistance de notre représentation diplomatique à Nouakchott qui l'a soutenu et pris en charge sa petite famille. Torturé et marqué par son séjour en prison, il compte saisir les instances de justice internationales pour demander réparation et juger ses tortionnaires. D'autant plus qu'il détient les preuves. La commission que préside Me Farouk Ksentini, ne peut intervenir ou intercéder directement dans ce genre d'affaires de justice. Mais ceci ne l'empêche pas de porter à la connaissance des autorités algériennes ce genre de cas pour faire enclencher la machine diplomatique. Revenant sur le cas des détenus de Guantanamo, il nous informera que «la procédure de leur transfert en Algérie est actuellement bloquée». C'est le même cas pour les détenus en Grande-Bretagne. Ces Algériens attendent que leur pays fasse un forcing diplomatique pour, au moins, bénéficier d'un procès équitable. Comme le font les Etats occidentaux quand il s'agit de leurs ressortissants aussi criminels soient-ils. Comme c'est le cas des infirmières bulgares qui ont inoculé le virus du sida à des enfants libyens.