Hier encore, les autorités mauritaniennes ont confirmé l'arrestation de deux autres Algériens «accusés de relations avec Al Qaîda». A combien est estimé leur nombre? On ne le sait pas. Une offensive contre le risque terroriste ou une «allergie» fraîchement découverte aux ressortissants algériens? Les arrestations en série d'Algériens en Mauritanie fournissent bel et bien matière à réflexion. Hier encore, les autorités mauritaniennes ont confirmé l'arrestation de deux autres Algériens «accusés de relations avec le terrorisme». L'offensive des services de sécurité mauritaniens n'est pas une promenade de santé. Effet direct, au nom de la logique terroriste: les Algériens sont dans la ligne de mire. Ils sont victimes de l'image d'un pays «malmené» par le terrorisme, vendue -jusqu'ici encore- à l'étranger. La nouvelle donne d'une soi-disant «Al Qaîda Maghreb» vient noircir davantage le tableau. Ainsi, depuis l'attaque terroriste du 4 juin 2005 qui a ciblé la base militaire de Lemgheity (à proximité des frontières entre les deux pays), les Algériens de Mauritanie n'ont pas connu des jours meilleurs. Depuis, séquestrations, tortures, interpellations et mauvais traitements, font encore le quotidien des Algériens installés en Mauritanie. Farouk Ksentini qui connaît bien le dossier des Algériens détenus à Nouakchott, pense que la Mauritanie est «excitée, comme plusieurs autres pays, par la question de la lutte antiterroriste». Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (Cncppdh), a été déjà saisi par la famille d'un Algérien détenu depuis début mai 2005. Bien avant l'attaque du Gspc (Groupe salafiste pour la prédication et le combat). Contacté, hier, par L'Expression, Farouk Ksentini a déclaré que «tout le monde est excité par cette lutte contre le terrorisme, mais souvent plusieurs pays se trompent de cible». Il parle en connaissance de cause, le président du mécanisme ad hoc des disparus fera savoir que tout dépassement au nom de la logique terroriste est inadmissible. Farouk Ksentini a déjà interpellé le ministère des Affaires étrangères pour faire la lumière sur les Algériens détenus, maltraités et torturés en Mauritanie. A la fin de la même année, citée en référence, soit décembre 2005, un autre Algérien a été découvert enterré, après avoir été assassiné dans des conditions floues. Quoi qu'il en soit, l'Etat est appelé à protéger ses ressortissants et demander leur extradition. Car, tout terroriste présumé est considéré innocent avant son jugement. L'attaque de Lemgheity, qui avait fait 15 mort et 17 blessés, a déclenché une vague d'arrestations par les services de sécurité mauritaniens dans les milieux des étrangers. Deux autres détenus algériens croupissent dans les geôles mauritaniennes depuis l'été 2005. Ces derniers ont dû appeler les autorités algériennes à intervenir pour accélérer leur jugement. Autrement, respecter la décision prise par le juge d'instruction, mi-2005, lequel avait accordé la liberté provisoire aux deux suspects. L'un d'eux, en l'occurrence Aïssa Smaïl Abdellah, a été acquitté récemment, après deux ans de détention arbitraire, à en croire certaines sources. Tergiversations, détention sans jugement et tortures sont les ingrédients usités par les services de sécurité mauritaniens. Les deux détenus algériens, Aissa Ismail Abdellah et Abdelmadjid Benmoussa sont accusés de collaboration avec des groupes terroristes. L'arrestation de deux ressortissants algériens est intervenue au moment où 11 autres individus sont présentés à la justice mauritanienne. Ils sont accusés d'activité terroriste et de lien avec le Gspc. Certains d'entre eux auraient fait partie de ceux ayant attaqué en juin 2005, la base militaire de Lemgheity. L'actuel procès à Nouakchott des conjurés de Lemgheity, risque, selon certaines sources, de «mal tourner». Car les avocats des détenus inculpés rejettent les chefs d'inculpation et brandissent le fait que les «aveux» ont été obtenus sous la torture. Farouk Ksentini, joint par téléphone, a indiqué que l'Etat algérien «n'a pas l'habitude d'abandonner ses ressortissants, surtout lorsque ces derniers sont en difficulté». Faudrait-il donc s'attendre à une réplique algérienne à cette série d'arrestations et de détentions? A cette question, notre interlocuteur se contente de dire qu'«en principe, les autorités algériennes sont tenues de protéger et de défendre les justiciables, quels que soient les motifs pour lesquels ils sont détenus». Ainsi, cette nouvelle vague d'arrestations porte à plus de 320 le nombre d'Algériens détenus à travers le monde à la fin de l'année 2006. Soupçonnés de liens avec le Gspc et Al Qaîda, ces Algériens croupissent dans les prisons de Guantanamo, de Londres, Rome, Nouakchott, Kaboul, Rabat, Libye et dans d'autres prisons tenues secrètes par les Américains.