Même si le chef du gouvernement était convaincant, la vraie réponse sera celle du terrain. 120 minutes pour convaincre. C'est le temps consacré ce jeudi par le chef du gouvernement pour répondre aux députés. Aucune allusion à la politique. La réconciliation nationale et la révision de la Constitution étaient absentes. Le discours était plutôt centré sur le volet économique et social. Evidemment. La situation de l'après-17 mai dernier oblige. Après trois jours de débat, M.Belkhadem est revenu à l'APN avec des détails et des nouveautés. Explications, directives, mesures sont autant d'éléments apportés par le patron de l'Exécutif. Ce dernier a répondu globalement aux préoccupations de chaque élu. La nouveauté: l'exercice des prérogatives des députés. Conscient du souci, Belkhadem s'est engagé à rendre à l'APN ses missions. Un point pour lequel il a été fortement applaudi. Ensuite, il s'est étalé sur les réalisations et les perspectives de développement au niveau de chaque secteur. L'allocution a été sanctionnée par l'adoption du projet par la majorité écrasante des députés. Sur les 370 députés présents, 315 ont voté oui pour le programme de l'Exécutif. Tandis que 22 députés l'ont rejeté et 33 autres ont préféré s'abstenir. Pari réussi pour Belkhadem. Son projet qui a fait l'objet de critiques, est passé comme une lettre à la poste. Cela veut-il dire que les députés sont profondément convaincus? Certainement pas. Même les 315 votants restent quelque peu sceptiques. Ils attendent pour voir. D'ailleurs, juste après l'adoption, les chefs de groupes parlementaires ont exprimé des avis mitigés. Le président du Mouvement pour la société de la paix (MSP), M.Boudjerra Soltani, pense que la réponse était convaincante. «Le chef du gouvernement était logique et objectif dans son discours», affirme fraîchement M.Soltani. Pour lui, son responsable a éclairci toutes les préoccupations des députés. Si le programme est réalisé sur le terrain, l'Algérie connaîtra un «saut qualitatif» pour une concordance entre le discours politique et le front social. Si Affif, député FLN et président de la commission des affaires étrangères, trouve le chef du gouvernement plus convaincant que lors de la déclaration politique. «J'étais surpris par des réponses sous forme de propositions telles que l'augmentation de 30% de la prime du filet social», avoue-t-il. Même remarque relevée pratiquement par le parti du RND. «Une réponse agréée à l'ensemble des préoccupations des députés», affirme Chihab Seddik, député du RND. Il reconnaît également que Belkhadem a intégré l'ensemble des doléances et qu'il a fait preuve de réalisme. Selon lui, il n'y a pas de raison pour que le gouvernement ne prenne pas en considération les engagements et les propositions des élus du peuple. Satisfait dans sa globalité, le RND pense qu'il y a des points encore à éclaircir. Ce dernier, comme la plupart des députés, ne se contente pas uniquement du discours. «C'est surtout la réponse sur le terrain», dit-il. «On sent qu'il a pris en compte les interventions des députés», constate sur place un député indépendant de Ghardaïa. La révision de la tarification de l'électricité pour les régions du Sud est un signe fort pour lui. Ce député qui a voté pour le projet, précise qu'il reste encore des questions sans réponses. Un autre député indépendant de Béjaïa s'est abstenu pour absence des moyens de réalisation des projets. «En termes d'inscription des projets c'est impressionnant, mais en terme d'application c'est vide», constate-t-il. Le Parti des travailleurs n'a pas créé la surprise par son abstention. La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Mme Louisa Hanoune, explique que son parti s'est abstenu en raison de l'existence, en même temps, de points positifs et négatifs dans le programme. «Nous avons enregistré la bonne foi du gouvernement par rapport à la création d'emplois qui, malheureusement, n'a pas pris en considération les mécanismes pouvant les prendre en charge», affirme-t-elle. Le PT revient sur la réconciliation nationale qui doit faire l'objet d'un bilan au niveau de l'APN. Le parti dit n'avoir pas saisi l'idée de préserver et de renforcer les entreprises publiques non encore identifiées et maintenir les privatisations et le partenariat. Le chef du groupe parlementaire du RCD, M.Djamel Fardjallah, estime pour sa part que son parti a voté «contre» car, explique-t-il, ce programme ne prend pas en compte l'émancipation et la cohésion sociale. «Le document ne favorise pas l'émancipation et la cohésion sociale de la société algérienne mais il est là pour maîtriser les instruments de contrôle de la société», souligne-t-il. Enfin, le gouvernement sera-t-il à la hauteur de son engagement? C'est ce qu'attendent les 389 députés et derrière eux une population qui espère une amélioration de son quotidien.