Le déclin de la classe politique nationale est, fondamentalement, dû au refus d'alternance interne. Le projet d'amendement de la loi électorale présenté par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, hier, en plénière, devant les députés de l'assemblée fraîchement élus, sonne le glas pour une classe politique qui se reposait, jusque-là, sur ses lauriers. Le réveil est brutal. Les rescapés de la loi du CNT de 1997, au nombre de 26, vont connaître un rétrécissement historique qui tombera à 9 puis à 5, en attendant d'autres restrictions qui viendront par le biais de l'amendement de la loi organique relative aux partis politiques. Désormais, la survie d'un parti politique dépend de son ancrage populaire. S'il n'a pas au moins une représentativité de 4% des suffrages exprimés dans l'une des trois dernières élections ou 600 élus répartis dans 25 wilayas, à raison d'au moins 20 élus par wilaya, il ne pourra plus présenter de candidats aux prochaines élections. Ils peuvent user d'un dernier recours en tissant des alliances ou en profitant de «parrainages». Mais la formule peut porter le risque dans le sens d'une perte d'identité propre; formule qui débouchera sur un même résultat. Lorsqu'un parti donné ne répond pas aux exigences du projet d'amendement en débat à l'APN, il perd automatiquement les atouts qui lui ont permis d'exister pendant près de deux décennies, vivotant grâce aux financements du contribuable, avant que ne l'achève la loi sur les partis. C'est la fin d'une époque, serait-on tenté de dire. Mais quels sont les partis, parmi les 26, qui vont survivre? Pour le moment, ils ne sont que 9 partis qui peuvent répondre à ces exigences. Ce sont le FLN, RND, MSP, El Islah, FNA, PT, Nahdha, RCD et FFS. Les cas du FFS, Nahdha, El Islah ont été sauvés par leurs anciens scores pendant que le FNA, nouveau parvenu, et le RCD, par le nouveau score et celui de 1997, resté inchangé, vont bénéficier d'un sursis. Cependant, la pérennité des scores obtenus aujourd'hui n'est pas établie. A long terme, le risque va lourdement peser sur les partis comme le FFS, El Islah et Nahdha s'ils ne remontent pas la pente. Ces trois partis, en plus du RCD, vivront l'anxiété que suscite la nouvelle loi sur les partis qui viendra cadenasser définitivement le champ politique si l'exigence de représentativité géographique est retenue. On s'achemine ainsi vers une classe politique constituée au plus de 5 partis (FLN, RND, MSP, FNA et PT) dans le moyen et court terme. On ne sait si la prochaine loi va permettre le renouvellement du champ politique en donnant la chance à de nouvelles formations de se constituer. Dans ce cas de figure, on peut admettre, à long terme, la disqualification des partis qui occupent aujourd'hui le devant de la scène, si les principes élémentaires de la démocratie sont consacrés par les lois de la République. La classe politique est appelée à se régénérer comme le veut la loi de la nature. Il faut avouer que les partis dits «grands» ne doivent leur dimension qu'à leur proximité du pouvoir. Quand leur assise populaire s'érode, quand le régime duquel ils tirent leur «légitimité» se disloque, quand leurs militants trouvent meilleur environnement, ils connaîtront, à coup sûr, le déclin. L'allusion concerne autant les partis de l'Alliance qui ne font pas l'effort de garantir l'alternance, en fermant la porte aux nouvelles élites.