Les patrons français sont conviés à une réunion le 27 août prochain à Paris. Le Medef est-il en train de revoir sa copie en matière d'opportunités d'investissement offertes en Algérie pour se jeter enfin à l'eau et en finir avec des années de réticence? M.Yves-Thibault de Silguy, président de Vinci et président du Comité Algérie de Medef International, conduira une délégation de chefs d'entreprise en Algérie, du lundi 12 au mercredi 14 novembre 2007. Cette délégation accompagnera le président français, Nicolas Sarkozy, qui effectuera une visite d'Etat déjà annoncée à l'occasion de sa récente tournée maghrébine. Dans une lettre datée du 09 juillet dernier, le vice-président et directeur général du Medef, M.Thierry Courtaigne, a informé l'ensemble du patronat de l'objet de cette visite qui est de débattre ensemble (ndlr: Français et Algériens) «de la manière de lever les derniers obstacles et de renforcer la présence des entreprises françaises en Algérie». Il est aussi question d'aborder «tant avec les ministres et les dirigeants des administrations qu'avec le secteur privé algérien, les priorités de l'Algérie, les réformes, les difficultés et les succès». Un langage franc et direct qui a fait défaut, ces derniers temps, aux officiels français chargés de promouvoir la coopération économique entre les deux pays. Même si, comme indiqué dans le document, «les relations commerciales franco-algériennes ont progressé de manière remarquable depuis 2000». Les chiffres publiés dans la lettre sur les investissement directs étrangers (IDE) pour l'année 2006 «montrent une augmentation très nette des investissements: 294 millions de dollars contre 140 millions de dollars en 2005, soit une hausse de 111% qui fait de la France le 1er investisseur hors hydrocarbures». Des chiffres qui cachent mal le peu d'entrain et d'enthousiasme manifestés jusque-là par les opérateurs publics et privés de l'Hexagone. Il est aussi mis en évidence le fait que «la France est également le premier fournisseur en Algérie avec 20,6% de parts de marché et près de 250 entreprises françaises y sont implantées et emploient plus de 20.000 personnes». A cet effet, les patrons français déjà installés en Algérie et ceux intéressés d'y aller, sont conviés à une réunion programmée pour le 27 août prochain à Paris. Le conclave sera rehaussé par la participation de M.Bernard Bajolet, ambassadeur de France en Algérie et de M.Marc Bouteiller, chef de la Mission économique à Alger avec la participation d'entreprises françaises ayant des activités en Algérie présidée par M.Yves-Thibault de Silguy, président de Vinci et président du Comité Algérie, de Medef International. La réunion du comité Algérie du Medef est l'occasion, comme l'annonce ce dernier dans une invitation à ses homologues datée du 16 juillet dernier, d'aborder également ensemble «les évolutions des relations de l'Algérie avec la France et avec l'Union européenne, et de sa place dans la nouvelle initiative du président Sarkozy». Et d'ajouter plus loin que «cette rencontre devrait permettre de préparer un document récapitulant les attentes des différents partenaires quant au futur des échanges franco-algériens ainsi que les principaux obstacles rencontrés par les entreprises françaises dans leur activité en Algérie». Ce document sera remis au gouvernement français avant le voyage d'Etat prévu cet automne. La dynamique enclenchée par Sarkozy est déjà entamée, reste à savoir quelles sont les offres qui seront soumises à la partie algérienne. Le matelas des 100 milliards de dollars annoncé par le président Bouteflika n'a pas laissé insensible le monde des affaires en France. Sinon comment expliquer alors ce regain d'intérêt en direction des opportunités offertes par l'Algérie? L'élection de Nicolas Sarkozy à l'Elysée n'y est pas étrangère certes, mais elle n'est pas la seule explication. Quand bien même il milite pour un partenariat d'exception entre les deux pays après avoir enterré le projet de «traité d'amitié» cher à l'ancien président Jacques Chirac. Il faut dire aussi que l'arrivée en force des gros bras chinois, coréens, indiens, qui s'ajoute à la pénétration des opérateurs italiens et espagnols et surtout émiratis, a créé un vent de panique dans les milieux des affaires d'outre-mer qui commencent à mesurer les conséquences des tergiversations de la dernière décennie. Le retard sera-t-il rattrapé? Le climat politique et économique de l'Algérie est aujourd'hui différemment apprécié par les experts français qui brossent un tableau très positif de la situation: «L'accumulation de recettes pétrolières et une gestion saine des finances publiques favorisent aujourd'hui l'émergence d'une conjoncture économique très favorable en Algérie. Le programme global de relance économique et les réformes engagées par les autorités afin de moderniser les infrastructures, conjugués à une situation politique stabilisée, contribuent à l'instauration d'une nouvelle donne économique qui engendre d'importantes opportunités d'investissements», peut-on lire dans le document rendu public par le Medef. Le Mouvement des Entreprises de France qui regroupe une pléiade d'opérateurs économiques et chefs d'entreprises françaises a, de tout temps, marqué son attitude par un manque de volonté manifeste d'investir en Algérie sous prétexte du climat jugé peu favorable aux affaires ou carrément du risque jugé élevé pour les affaires. L'Algérie a été considérée comme une zone à risque malgré la notable amélioration de la situation sécuritaire. Mais il semble, ces dernières années, qu'une nouvelle politique est mise en oeuvre. Depuis le regain d'intérêt mesuré affiché par les patrons français en 1998, la Compagnie française d'assurance crédit à l'exportation (Coface) n'a pas cessé de revoir à la baisse le facteur risque pour les investissements en Algérie. La Coface, un organisme très influent dans l'orientation et la régulation des investissements français à l'étranger, est devenue, en l'espace d'une décennie (1990-2000), la bête noire des opérateurs économiques algériens et un «frein» aux investissements français en Algérie, selon les observateurs. La notation du risque Algérie a, de tout temps, été mal interprétée par la partie algérienne qui y voyait une connotation politique dans la démarche française. D'autant plus que le Medef a, de tout temps, évolué dans le giron de l'Elysée.