On ne nous fera pas croire qu'il n'y a pas eu intervention alors que la FAF affirmait qu'elle n'appliquerait pas la décision du TAS. Le football algérien poursuit son inexorable descente aux enfers. Plus les années passent, plus les situations les plus ridicules et les plus archaïques s'installent dans cette discipline d'une manière durable. On pensait avoir atteint le fond au début des années 80, lorsque le pays «tournait» sous la coupe du parti et de la pensée uniques. On rappellera qu'à cette période-là, la division1, qui était composée de 16 clubs, se préparait à entamer une nouvelle saison. Le calendrier était établi depuis longtemps et les clubs s'apprêtaient à démarrer lorsque l'invraisemblable s'était produit en ce sens que la FAF avait décidé de porter le nombre des clubs de 16 à 20. On disait, alors, que c'était pour rehausser le niveau de la discipline qu'on agissait ainsi. Mais les gens n'étaient pas dupes et avaient compris que la fédération avait été forcée d'augmenter ce nombre uniquement pour permettre l'accession d'une équipe que nous ne nommerons pas. C'était, dit-on, pour que le niveau du football algérien devienne de meilleure qualité et que la discipline reparte du bon pied. En fait, ce fut à partir de ce moment-là qu'elle commença à péricliter. Près de 20 ans plus tard, après l'avènement du multipartisme et de la liberté d'expression, on en est toujours à bricoler avec cette ridicule décision de remettre l'Amel Boussaâda dans le championnat dont il avait été exclu pour avoir été prouvé qu'il avait fraudé en faisant jouer un joueur suspendu dans un match officiel. On fera remarquer, tout d'abord, que de telles décisions d'augmenter le nombre de clubs dans un championnat ont été très certainement suggérées à la FAF. Il est même possible qu'elles lui ont été imposées. Il serait, donc, trop facile de s'en prendre à la structure fédérale et de l'accabler de tous les maux dont souffre notre football. Il y a trop d'interférences extérieures dans ce sport qui font qu'il n'arrive jamais à décoller réellement. On intervient pour tout. Pour changer de stade, pour enlever ou réduire la suspension d'un stade ou d'un joueur, pour reporter un match de championnat ou de coupe, bref, les gens de la FAF n'en finissent pas de subir des pressions de partout. Dans le cas qui nous intéresse aujourd'hui, il est indéniable que quelque chose s'est passé pour que la FAF accepte d'appliquer la décision du tribunal arbitral du sport (TAS) alors que le président de l'instance fédérale avait fait savoir aux médias qu'il ne le ferait pas. Loin de nous, l'idée de nous en prendre au TAS. Une telle instance juridique est un plus pour le sport algérien, qui normalement, dit en tirer un appréciable bénéfice. Mais, dans le cas qui nous intéresse, il ressort clairement que le verdict a été prononcé en faveur d'un club dont la fraude a été avérée. La preuve en est que même le TAS conseille au joueur suspendu de se rapprocher de la commission de discipline de la ligue nationale pour apurer sa situation et pour payer une amende. En somme, on permet à un club qui a triché de pouvoir rejouer dans son championnat d'origine. Cela ouvre de terribles perspectives pour le football algérien car, demain, du fait de la jurisprudence, le TAS va être inondé de demandes de clubs qui ont fraudé pour qu'on leur rende leurs points perdus par pénalité. Et si à chaque fois qu'il y a des manifestations et de la grogne, on intervient en faveur de ces équipes, on finira par obtenir un championnat à 50 clubs et pourquoi pas à 100. Il paraît que l'ABS a fait référence au rejet par la ligue nationale de réserves du PAC à l'encontre du joueur d'un club adverse parce que ses dirigeants n'avaient pas payé la somme nécessaire pour que le dossier soit ouvert et étudié. Pour les gens de Boussaâda, la FAF avait commis un impair en ne se saisissant pas de l'affaire comme elle l'a fait pour le match NARBR-ABS alors que le NARBR n'avait jamais formulé de réserves sur aucun joueur de l'équipe adverse. La situation n'est pas la même, puisque le dossier du PAC a été rejeté en la forme, mais jamais le PAC n'avait fait cas de cette situation. Pour ce qui est de l'ABS, la jurisprudence existe, puisqu'en 1992, la CAF avait fait perdre un match à l'équipe d'Algérie parce qu'elle avait aligné un joueur suspendu et cela sans que son adversaire sénégalais ait déposé la moindre réserve. Mais là n'est plus l'essentiel. Le plus important est qu'un club qui est accusé d'avoir fait jouer un joueur suspendu a été racheté et qu'il va retrouver la division2. D'un autre côté, au lieu de remettre les choses en ordre, on permet au club de l'USM Bel Abbès, rétrogradé puis repêché après sanction de l'ABS, de rester, lui aussi, en division2. On se retrouve dans la triste situation avec deux clubs qui disent avoir raison et où, au moins, il y en a un qui a tort. Et ce dernier doit être désigné pour qu'il aille en interrégions. Cela dit, il convient d'affirmer que la FAF et la LNF ont fauté en une circonstance, celle de n'avoir pas demandé une commission d'enquête judiciaire sur le match NARBR-ABS sur lequel pesait de gros soupçons de corruption. Les deux instances ont, là, fait preuve de faiblesse. Elles en récoltent, aujourd'hui, toutes les graves conséquences. Maintenant, si l'on pense qu'il est humiliant de rétrograder, on rappellera que la saison dernière les Italiens, qui venaient d'être sacrés champions du monde, n'avaient pas hésité, un mois plus tard, à sanctionner leur champion national, la puissante Juventus de Turin et de le faire descendre en division 2 pour une histoire de matchs arrangés. Et chez nous, un club comme le Mouloudia d'Alger, dont la popularité est autrement supérieure à celle de l'ABS ou de l'USMBA, avait été rétrogradé en division inférieure pour avoir quitté le terrain à Batna. Jamais, au grand jamais, les supporters du MCA, réputés comme portés sur la violence, n'avaient manifesté leur mécontentement dans la rue. Leur club avait fauté et ils avaient accepté son sort en toute sportivité.