Messieurs Belkhadem et Sidi-Saïd sont ravis. Ce n'est pas l'avis des 34 millions d'Algériens qui sont vraiment déçus. Leurs problèmes ne sont pas pris en charge. Quelle déception! Quel fiasco! Cette réunion de la bipartite Ugta- gouvernement est un peu comme la montagne qui accouche d'une souris. Et pour cause, le gouvernement est en délicatesse avec son peuple de 34 millions d'habitants. Et l'Ugta, qui ne représente déjà plus qu'elle-même, négocie en sous-main des pseudos avantages qui étaient déjà dans l'air. En d'autres termes, les nouvelles dispositions que le chef du gouvernement vient nous annoncer comme des scoops étaient connues depuis un bon bout de temps. La réduction des taxes douanières et de la TVA sur la pomme de terre ne sont pas une nouveauté. La bipartite qui était un cadre de concertation, un endroit où l'on vient faire des propositions, ne joue même plus son rôle de pompier, tant les problèmes sont devant et derrière elle. Un fantôme courant derrière un fantôme. Devant la montagne de problèmes qui se posent aux pères de famille à la rentrée (inflation, factures de l'électricité et du gaz, rentrée scolaire, dépenses du Ramadhan, crédits à la consommation à rembourser) le gouvernement répond par une grille des salaires. Une manière de botter en touche. En fait, le gouvernement veut donner l'impression de bouger alors qu'il fait du surplace. Primo, cette grille des salaires, qui ne concerne que la Fonction publique, c'est-à-dire uniquement les agents de l'Etat, est-ce que cela peut intéresser les centaines de milliers de travailleurs des secteurs publics et privés? Le levier que peut représenter l'augmentation des salaires dans la Fonction publique s'avère inopérant en l'absence des autres facteurs: retour de la croissance, maîtrise de l'inflation pour renforcer le pouvoir d'achat des populations et, notamment des couches déshéritées. Dans ces conditions, la nouvelle grille est une arme à double tranchant. Toute augmentation va directement dans la poche des spéculateurs, car il faut bien voir qu'on ne joue pas sur l'offre, mais plutôt sur la demande. En l'absence d'une offre suffisante et d'une maîtrise des coûts, la demande s'avère dans ces cas être insatiable, et surtout pénalise les petites bourses. Situation à géométrie variable, la nouvelle grille, loin de résoudre les problèmes, ne fait en fait que les différer, car même si la nouvelle grille concerne 1,5 million de salariés, elle ne peut répondre à l'attente des populations. D'abord dans le monde entier, on est en train de dégraisser les effectifs de la Fonction publique pour rendre l'appareil d'Etat moins lourd, moins coûteux, moins pléthorique, et par voie de conséquence, plus efficace. La preuve a été faite dans le monde entier qu'un Etat lourd et centralisateur était un handicap sérieux au développement économique du pays. La preuve, avec des réserves de change très importantes, on assiste au contraire à une paupérisation de la population. Alors que dans les pays développés on peut créer une entreprise en 24 heures, en Algérie il faut des mois pour mettre sur pied une entreprise. Les histoires de guichet unique, ça n'a jamais donné des fruits. Il y a toujours trop d'Etat, trop d'imports, trop de taxes, alors que dans le même temps on procède à un démantèlement tarifaire qui va rendre encore plus fragile l'entreprise algérienne. Alors que les Algériens dans leur grande majorité attendaient des mesures radicales pour répondre à la fois aux problèmes de la rentrée et des mesures pour stabiliser, voire améliorer le pouvoir d'achat, le gouvernement s'est réuni avec l'Ugta pour déclarer qu'une nouvelle grille des salaires est en préparation et que si elle est prête d'ici la fin de l'année, elle sera appliquée dès le mois de janvier 2007. Tout le monde sait pourtant qu'il y a déjà eu une première augmentation des salaires, et que cela ne s'est pas traduit par une amélioration du pouvoir d'achat, ni par une stabilisation des prix. Au contraire, l'effet a été inverse sur l'inflation. C'est ce que l'on peut appeler l'effet boomerang. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le gouvernement continue d'être sourd aux attentes de la population. C'est comme s'il vivait dans une bulle, et de ce fait il n'est pas atteint par les cris de détresse d‘une grande partie de la population qui ne peut répondre à l'envolée des prix des produits de première nécessité, notamment de ceux des médicaments. Si l'on peut parler de tragédie nationale, c'est bien celle qui fait que les pères de famille sont démunis lorsqu'ils se rendent chez le pharmacien, certains médicaments étant hors de portée des couches moyennes et populaires.