A voir la lecture que les trois hommes font de l'appel qu'ils ont lancé vendredi...ça patine avant même que la chose ne soit officialisée. Les trois leaders politiques, en l'occurrence MM.Hocine Aït Ahmed (président du FFS), Ahmed Mehri, (ex- secrétaire général du FLN) et Mouloud Hamrouche (ancien chef de gouvernement) ont fini par lever le voile sur leur initiative de sortie de crise, en gestation depuis plus de deux ans. Le communiqué, rendu public vendredi, brille néanmoins par son ambiguïté. Les trois chefs qui n'hésitent pas à afficher publiquement leur alliance politique, se sont montrés très peu prolixes sur les actions qu'ils comptent mener sur le terrain pour faire aboutir leur démarche et contribuer à la recherche de solutions de sortie de crise. Les premières réactions recueillies par L'Expression font ressortir même une certaine divergence dans la vision des trois leaders, notamment au sujet de la mise en oeuvre de cette initiative. La première question qui s'impose et dont on ne trouve pas de réponse dans le communiqué sus-cité -omission de taille-, a trait à l'interlocuteur recherché par les trois hommes politiques. Cet appel au dialogue est destiné à qui? Avec qui comptent-ils s'allier pour aboutir à leurs objectifs? Karim Tabbou, premier secrétaire du FFS, atteste que «l'appel est destiné à l'opinion nationale et internationale.» Au niveau interne, toutes les personnalités autonomes présentes sur la scène politique, les militants des droits de l'homme, les associations, en somme les véritables forces de la société, «sont invitées à se joindre à ce processus.» «Nous restons ouverts à tout apport qui viendra conforter cet espace d'ouverture et de dialogue», ajoute M.Tabbou. A exclure de cette liste, «le pouvoir» qui, selon lui, est «dans l'impasse.» En insistant sur «les personnalités autonomes», le responsable du FFS écarte de facto les partis de l'Alliance. Une «exclusion» qui n'est pas confirmée par M.Abdlehamid Mehri. Contacté par L'Expression, ce dernier indique que l'initiative «est destinée à tous les Algériens». Sans autre précision et sans aucune exclusion. Cette position confirme que les trois chefs politiques sont en effet d'accord sur le principe de lancer une initiative politique, mais divergent, semble-t-il, sur ses autres détails. D'ailleurs, M.Mehri n'évoque pas «la communauté internationale» dans sa réponse et n'exclut aucune partie de ce dialogue. Ce qui vient en harmonie avec l'esprit de l'appel rendu public vendredi et dans lequel on peut lire que «toutes les composantes de la société sont invitées à s'impliquer et s'engager dans la concrétisation d'un tel processus.» Cet ancien homme du pouvoir, qui a pris certes du recul après plusieurs années, ne semble pas tout a fait en mesure de faire rallier le camp de l'opposition. Mouloud Hamrouche, qui a signé le communiqué, préfère quant à lui, garder le silence: «Je partage les mêmes avis exprimés à L'Expression par MM.Tabou et Mehri», a-t-il répondu à une question de notre journal, sans pour autant qu'il ait été informé sur le contenu de leurs déclarations respectives. «Pour le moment, je préfère ne pas me prononcer sur cette question. Tout a été dit dans le communiqué.» Qu'est- ce qui motive le silence radio de cet ancien chef du gouvernement? Ce dernier, selon les observateurs, joue l'assurance et préfère attendre l'impact qu'aura cette démarche à tous les niveaux avant d'agir. Seul le FFS semble assumer parfaitement sa démarche. D'ailleurs, selon les informations que nous avons pu avoir, c'est sur initiative et l'insistance d'Aït Ahmed que l'appel a vu le jour. Preuve en est, seul le responsable de ce parti a voulu répondre sans aucune réserve à nos questions. «Scandalisé par la situation sécuritaire du pays et l'absence de perspective sérieuse, si ce n'est la gestion sécuritaire de la crise, nous avons décidé de lancer cet appel pour créer le changement.» A ce stade, il s'avère que les initiateurs de cette démarche ne sont pas encore décidés sur la manière appropriée de mettre en oeuvre leur démarche. M.Tabbou s'est contenté de dire que «les forces politiques sont appelées à se rencontrer pour débattre de la démarche de sortie de crise». Quelle place pour les islamistes dans cette nouvelle perspective? L'initiative déterrera-t-elle le contrat de Rome? M.Tabbou esquive et estime qu'il faut sortir «des schémas de classification et des clichés». Rappelons que dans leur message, MM.Hamrouche, Aït Ahmed et Mehri ont clamé que «la négation du politique, la répression et l'exclusion ne sont pas des solutions aux multiples difficultés et impasses que connaît le régime».