A l'initiative des commerçants de Béjaïa, une quinzaine économique est organisée dans la cité des Hammadites, au niveau de la gare ferroviaire de la ville, et cela en parallèle à la foire estivale, qui elle, a eu lieu dans l'enceinte de l'ancien Souk El Fellah d'Ihaddaden. Attirés, par cette manifestation économique, les Bédjaouis ont vite déchanter. La spirale des prix a battu des records cet été, et à tous les niveaux. Quelques mères de famille, soucieuses de la prochaine rentrée scolaire, ont été particulièrement attirées par les blouses, cartables, chaussures et autres fringues. Mal leur en a pris de s'en approcher, car dès la première tentative, elles se sont vu dans l'obligation de rebrousser chemin et d'attendre des jours meilleurs économiquement parlant. A vrai dire, Béjaïa observe chaque année, et pratiquement à la même période, des manifestations similaires. La nouveauté, cette fois-ci, réside dans les derniers événements qu'a connus la région, et qui ont fini par l'ébranler économiquement et sociologiquement. «Nous espérions trouver des articles un peu moins chers qu'au centre-ville, nous dira une ménagère qui, couffin au bras, ne cessait de faire la navette entre les stands, dans le but de dénicher le produit recherché à moindre coût. Hélas, poursuivra-t-elle, l'incendie financier a fini par embraser même les petits commerçants ambulants.» Plus loin, un père de famille comptait les dernières pièces de monnaie. Et c'est en continuant à racler ses poches qu'il nous lancera: «J'espère qu'il m'en reste assez pour payer le sachet de lait et les deux baguettes de pain... J'ai tout dépensé...Mes enfants voulaient des chaussures neuves pour la rentrée. Les deux paires m'ont coûté la bagatelle de 1700 DA...et encore, elles sont de fabrication locale.» Un peu plus loin, des badauds surveillaient du coin de l'oeil l'endroit, à la recherche d'un éventuel boulot occasionnel. Ils ont entre 12 et 15 ans, mais les affres de la vie les poussent souvent à se débrouiller par n'importe quel moyen. Ces jeunes circulent à longueur de journée sous un soleil de plomb pour dénicher leur croûte ou leurs mégots de cigarette. Les uns vous proposent de porter votre couffin ou de nettoyer le pare-brise de votre véhicule, tandis que d'autres ne se gênent point pour vous vider les poches ou vous subtiliser votre porte - monnaie. Les policiers en faction, ce matin-là, étaient à l'affût du moindre incident. A chaque époque... sa misère.