Ce ne sont que des petites choses, des petits détails de rien du tout, mais qui en disent long sur la capacité des groupes terroristes à user jusqu'à la corde d'un mode opératoire, comptant toujours sur le relâchement de la vigilance. On ne voudrait pas et on n'aimerait pas contredire tel responsable politique quand il déclare: «Vous serez surpris». On n'aimerait pas non plus être discourtois avec tel autre responsable quand il déclare: «Toutes les mesures ont été prises pour renforcer la sécurité durant le mois du Ramadhan.» Vous voyez, on ne cite pas les noms de ces responsables, mais ils se reconnaîtront et nos lecteurs aussi l'auront fait. On a seulement remarqué que dans le cas des attentats du Palais du gouvernement, de la caserne de Lakhdaria et de la caserne des gardes-côtes de Dellys, le même mode opératoire a été utilisé. C'est de notoriété publique. Toute la presse en a parlé. N'aurait-on pas pu déjouer une telle pratique? Faire en sorte que les véhicules de livraison soient sous surveillance, pour déjouer toute nouvelle tentative de les utiliser pour tuer des Algériens? La bombe artisanale de Zemmouri nous interpelle également. Comment a-t-on négligé un sac contenant un objet suspect près du mur d'enceinte d'une cité de résidence de policiers? Ce ne sont que des petites choses, des petits détails de rien du tout, mais qui en disent long sur la capacité des groupes terroristes à user jusqu'à la corde d'un mode opératoire, comptant toujours sur le relâchement de la vigilance. Autre chose: cela faisait tout de même un bon bout temps qu'on savait que des imams illuminés faisaient des lavages de cerveaux et manipulaient de jeunes adolescents, en leur faisant croire qu'ils allaient combattre en martyrs en Irak, alors qu'ils sont utilisés comme chair à canon dans des attentats sanglants en Algérie même. Il y a là trop de coïncidences et de laisser-aller, que ça finit par faire désordre. Lorsque ce désordre coûte la vie à des dizaines d'Algériens innocents, alors là, nous disons halte. On peut multiplier les exemples à l'infini, et s'on s'apercevra que pour peu que les responsables y mettent du leur, il sera possible de déjouer une bonne quantité d'attentats, de massacres, de tueries. Il y a quelques années ont été inaugurés des centres de la police scientifique spécialisés dans la lutte antiterroriste. Ces centres n'ont-ils pas, entre autres, pour mission justement de typer et de catégoriser les moyens et les méthodes utilisés par les terroristes. Comme tous les criminels, les terroristes reviennent toujours à l'endroit de leurs crimes, et ils accomplissent à peu près les mêmes gestes. N'est-ce pas le rôle des spécialistes de la lutte antiterroriste d'étudier ces méthodes et ces gestes? Tous les criminologues, les psychanalystes, les sociologues, les physionomistes, les spécialistes en balistique et en explosifs que l'Algérie a formés et qu'elle a envoyés pour être formés à l'étranger, ne sont-ils pas parvenus à percer les secrets par trop répétitifs et moutonniers des groupes terroristes. Tous ces repentis qui se rendent aux services de sécurité, dévoilant les caches et les plans des terroristes; que fait-on de leurs aveux? Sont-ils répertoriés, étudiés, pris en compte, pour anticiper sur les attentats terroristes? Certains pointent du doigt la réconciliation nationale pour justifier le manque de vigilance des services de sécurité. Cet argument ne tient pas la route. La réconciliation nationale est un programme politique qui vise à enlever aux terroristes leur couverture idéologique ou religieuse, mais elle n'a jamais empêché les services de sécurité de combattre le terrorisme sous toutes ses formes, en ville ou à la campagne, ses maquis, ses réseaux de soutien, ses lieux de recrutement. Or, malheureusement, on voit bien que les mosquées sont utilisées à cet effet, et dans ce cas, il est fort possible de distinguer entre un musulman qui vient accomplir ses devoirs religieux, en toute bonne foi, de celui qui est là pour endoctriner des adolescents et les envoyer à la mort, entraînant derrière lui des dizaines de vies. Il est toujours possible de distinguer le bon grain de l'ivraie, et un imam sincère (heureusement ils sont la majorité) des brebis galeuses qui veulent ternir, voire ensanglanter cette noble profession de guide des croyants.