«On connait dans les cours, un autre moyen de se grandir, c'est de se courber.» (Talleyrand, 1754 - 1838, homme d'Etat et diplomate français) Bernard Kouchner, le ministre français des Affaires étrangères s'est défendu, mardi, à Moscou, où il se trouvait pour une visite de travail, de vouloir la guerre contre l'Iran. «On dit que Bernard Kouchner veut la guerre, mais ce n'est pas vrai. C'est une manipulation. Je ne veux pas la guerre, je veux la paix», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Voilà un hiatus (diplomatique) supplémentaire révélateur de l'ex- «docteur» Kouchner. A-t-on vu dans l'histoire des Etats un ministre des Affaires étrangers décider, seul, de déclarer une guerre ou d'une action diplomatique d'envergure au nom de son pays? Le domaine de la politique étrangère est un domaine réservé au chef de l'Etat, me semble-t-il. Particulièrement dans un régime présidentiel tel que celui de la France. Il ne s'agit pas de votre personne, M.Kouchner. Vous êtes le porte-voix de votre chef, M.Nicolas Sarkozy. N'est-ce pas lui, juste après avoir passé ses vacances d'été chez son ami George W.Bush, dans sa résidence privée, qui a réuni dès son retour les ambassadeurs de France pour les avertir (les instruire) en leur rappelant que «l'Iran, en persistant dans sa démarche, s'exposerait à des bombardements»? Vous ne faites que confirmer l'alignement de M.Sarkozy (et avec lui la France) sur les convictions guerrières de M.Bush. Par ailleurs, vous avez ajouté, lors de votre inquiétante déclaration, qu'il fallait que l'Union européenne pense à de nouvelles sanctions, plus dures, contre l'Iran. C'est-à-dire que vous faites fi des Nations unies et de leur Conseil de sécurité. Exactement ce qu'avait fait M.Bush lorsqu'il avait décidé d'envahir l'Irak. La seule différence est que le Britannique Tony Blair n'est plus là pour le soutenir. C'est désormais M.Sarkozy qui endosse ce rôle en Europe. Au-delà de toutes ces gesticulations diplomatiques, l'essentiel est fait: l'opinion mondiale n'exclut plus l'éventualité d'une attaque contre l'Iran. C'est cela le plus important. En dévoilant, volontairement, les intentions du palais de l'Elysée sur la question, votre but a été de «provoquer» l'opinion internationale par presse interposée, afin de «légitimer» la prochaine guerre contre un pays, certes versatile, mais riche en hydrocarbures et perturbateur des plans américains dans toute la région du Moyen-Orient et de l'Asie mineure. Surtout, argument supplémentaire, l'Iran est un pays musulman chiite. Il n'est pas aussi docile que les régimes sunnites des monarchies du Golfe. A propos, pouvez-vous nous expliquer votre revirement à propos du Premier ministre irakien, Nouri al Maliki? Vous aviez demandé son départ, n'est-ce pas? Que s'était-il passé entre-temps? J'ai souvenance que votre appréciation n'a pas été du goût de M.Bush. Car, après vous, le président américain lui a renouvelé sa confiance. Depuis, vous vous êtes tu. Il faut reconnaître que votre expérience dans l'action humanitaire internationale, dont vous fûtes un «prophète», vous joue des tours lorsqu'il s'agit de diplomatie, du moins, à ce niveau d'exigence. Car, voyez-vous, j'aurais aimé vous voir avec la même insistance et la même campagne médiatique sur le sort des Palestiniens d'hier et ceux de Ghaza aujourd'hui. Bien sûr, l'avenir des Palestiniens est réglé pour le moment. Il dépend de la volonté d'Israël et d'Ehoud Olmert. Pour l'heure, il s'agit de préparer l'assaut final contre l'inflexible Iran. Vous vouliez prendre à témoin le monde contre la bombe iranienne. Alors, nous témoignerons le jour venu.