Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad devrait à nouveau défier demain son adversaire George W. Bush, cette fois quasiment chez lui, à New York à l'Assemblée générale de l'ONU, avec en arrière-plan une escalade des tensions qui fait craindre une nouvelle guerre. "Il est faux de penser que l'Iran et les Etats-Unis se dirigent vers la guerre. Pourquoi dire cela ? Pourquoi devrions-nous partir en guerre ? Il n'y a pas de guerre en vue", a dit Ahmadinejad dimanche sur la chaîne de télévision américaine CBS. Pourtant, depuis qu'il a fait à l'ONU une entrée fracassante sur la scène internationale il y a deux ans, l'opposition entre l'Iran et les Etats-Unis s'est considérablement renforcée. L'Iran est désormais visé par deux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU lui imposant des sanctions pour son refus de renoncer à ses activités nucléaires les plus sensibles. Et Ahmadinejad, qui s'exprimera à la tribune des Nations unies après le président américain, risque de se lancer, comme en 2006, dans une diatribe antiaméricaine au moment où Bush pousse à de nouvelles mesures punitives plus draconiennes, du Conseil de sécurité ou - à défaut d'un accord de la Chine et de la Russie - des Etats-Unis et de leurs alliés européens. Ahmadinejad assure que le programme nucléaire iranien ne vise qu'à produire de l'électricité. "Quel besoin avons-nous d'une bombe ?", a-t-il demandé sur CBS. Mais il a aussi dit samedi, la veille de son départ pour les Etats-Unis où l'attendait un concert de protestations, que ni la "guerre psychologique" ni les sanctions économiques n'arrêteraient "la marche de l'Iran vers le progrès". Bush ne croit pas aux protestations pacifiques d'un dirigeant qui a appelé à la destruction d'Israël, le grand allié des Etats-Unis, et remis en question la réalité de l'Holocauste. Toute la question est de savoir si l'exaspération pourrait pousser Bush à en finir avant le terme de sa présidence, en janvier 2009. Le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner vient ouvertement d'envisager l'éventualité de l'affrontement armé en cas d'échec de la diplomatie. Car selon Bush, qui a fait de l'Iran l'un des Etats de "l'axe du mal", le régime islamique arme aussi les extrémistes chiites contre les soldats américains en Irak; en Afghanistan, il aide les talibans; il soutient le Hezbollah qui oeuvre à la déstabilisation du gouvernement libanais; il appuie les groupes anti-israéliens considérés comme terroristes. Le commandement américain en Irak a alourdi les charges dimanche en accusant l'Iran de fournir aux rebelles des missiles sol-air sophistiqués capables d'abattre des appareils américains. Comble de l'impudence pour Bush, son homologue iranien, l'une des personnalités internationales suscitant le plus d'hostilité aux Etats-Unis, a cherché à déposer une gerbe sur le site du World Trade Center, détruit par les attentats du 11-Septembre. Bush a dit "comprendre" que la police de New York ait refusé la permission au représentant d'un régime "soutenant le terrorisme". Il s'est toujours gardé d'exclure le recours à la force. Cependant il se défend d'intentions militaires pour le moment. "J'ai constamment dit que j'espérais que nous pourrions convaincre le régime iranien d'abandonner son ambition de mettre au point un programme d'armes (nucléaires) et y parvenir de manière pacifique", a dit Bush jeudi. De nombreuses voix se sont élevées pour presser Bush de renouer avec l'Iran un dialogue rompu il y a 27 ans. Comme en 2006, Ahmadinejad a offert à M. Bush un débat public à l'ONU. La Maison blanche a exclu cette éventualité. Ahmadinejad a dit se rendre à New York avec l'intention, aux Nations unies ou la veille dans un discours aussi attendu que controversé à l'université de Columbia, d'exposer les "positions du peuple iranien" à des Américains "très désireux" de les connaître.