Au niveau de ce parti, l'heure est à l'optimisme: «Nous donnerons une leçon de démocratie à toutes les formations politiques qui existent en Algérie, de la plus vieille à la plus jeune». Le Front des forces socialistes (FFS) mise beaucoup sur la joute électorale du 29 novembre prochain. De la base militante au président du parti, la mobilisation est au beau fixe. Les préparations vont bon train. Le parti a enclenché la vitesse supérieure mais à pas mesurés et certains. Au FFS, on estime que le IVe Congrès national, tenu les 6 et 7 septembre derniers à Alger, a servi de tremplin pour donner un nouveau souffle à la plus vieille formation politique de l'opposition algérienne. On estime même que le temps des crises internes est révolu. Le dernier congrès a contribué efficacement à souder les rangs entre les anciens du parti et les jeunes. Pour mieux se rendre compte de ce constat, mieux vaut se déplacer au siège national du FFS, sis au 56 avenue Souidani Boudjemaâ, Alger. Il était 15h, en ce mercredi 3 octobre 2007, lorsque nous avions franchi le portail vert foncé de l'imposante villa, faisant office de siège national du parti. Le portrait de son président, Hocine Aït Ahmed, vous accueille avec un large sourire. Un calme des plus sereins, entrecoupé du froufrou des arbres, plane sur le quartier général de cette formation politique d'obédience socialiste. Mais ne dit-on pas que l'art véritable ne s'accomplit que dans le silence? C'est le cas chez le FFS. A l'entrée du siège national, à droite, la salle d'attente est bondée de visiteurs. Ce sont des militants venus de différentes contrées du pays pour exposer les problèmes rencontrés dans la préparation des listes électorales au niveau de leurs régions respectives. «Tout va pour le mieux. On rencontre ça et là quelques entraves administratives, certes, mais cela ne nous empêchera, en aucun cas, de préparer les élections locales. D'autant plus que la population compte beaucoup sur notre parti» souligne, optimiste, un militant venu de Tizi-Ouzou. Les militants présents au siège national vont loin dans leurs discussions en abordant le climat général émaillant les préparations des prochaines élections locales. Pendant que le débat s'anime de plus belle, Rachid Chaïbi, membre du bureau national, entre et nous prie d'attendre quelques minutes. «Karim Tabbou (Secrétaire national du FFS, Ndlr) est en discussion avec quelques militants de l'intérieur du pays. Patientez juste quelques instants. Il vous recevra...». Au bout de quelques instants, Rachid Chaïbi revient et nous demande de le suivre. Nous empruntons les escaliers en colimaçon menant au premier étage. C'est ici le bureau du premier secrétaire national du Front des forces socialistes. Karim Tabbou nous reçoit en s'excusant de nous avoir fait attendre. «Le temps nous presse. Nous devrons finaliser la confection des listes électorale avant le 9 octobre. Nous avons un programme trop chargé que nous devons exécuter minutieusement, et sans faire d'erreurs, parce qu'on n'en a pas le droit» insiste M.Tabbou. Celui-ci estime que la tâche est d'autant plus compliquée que le Secrétariat national du parti n'est pas encore formé. «Mais cela n'est qu'une affaire interne au parti qui ne portera en aucun cas préjudice au bon déroulement de la préparation aux prochaines élections locales». Le travail de fourmi Assumant son poste jusqu'au bout, Karim Tabbou veille personnellement au grain. Tout est passé au peigne fin. Pour élaborer sa stratégie électorale, le FFS a classé les communes en quatre catégories, à savoir, les communes disposant de structures du parti, celles qui n'en disposent pas, les communes en conflit (c'est-à-dire, celles dont les sections FFS souffrent d'un dysfonctionnement et dont les instances ne sont pas renouvelées depuis deux ans), et enfin les communes stratégiques. Par ailleurs, de 1200 listes de candidature que compte le FFS, on n'en a retenu que 700 pour les communes. De ce nombre, le Front des forces socialistes n'a reçu que 72 recours. Notons que cette opération s'est déroulée durant les journées des 6 et 7 octobre dernier. Autrement dit, une journée avant le dernier délai fixé pour le dépôt des listes de candidature. Il faut dire que le FFS, en prévision des prochaines joutes électorales, a fait une véritable course contre la montre. Toutes les instances du parti ont été renouvelées en des temps records. A commencer par la conférence d'audit qui s'est tenue les 21 et 22 juin; puis la conférence nationale des élus, organisée les 5 et 6 juillet. Ces deux évènements ont conduit à l'organisation d'un congrès national qui s'est tenu les 6 et 7 septembre dernier à Alger, en présence du président du parti, Hocine Aït Ahmed. Ce congrès est d'ailleurs perçu au parti comme une condition sine qua non pour participer aux prochaines échéances électorales. Et maintenant que le parti a assaini sa situation interne, place aux élections locales. En ce sens, Karim Tabbou se dit plus optimiste que jamais. «Nous donnerons une leçon de démocratie à toutes les formations politiques qui existent en Algérie, de la plus vieille à la plus jeune, pourvu qu'on nous laisse travailler et qu'on ne nous mette pas des embûches sur le chemin» estime le premier secrétaire national du FFS. «Mais aux entraves, on s'est habitué», ajoute-t-il. M.Tabbou sait de quoi il parle. Et lorsqu'il s'agit d'exposer les problèmes bureaucratiques rencontrés dans la confection des listes électorales, il ne lésine pas sur les mots. Quelle est la nature de ces complications? Karim Tabbou parle d'un certain nombre de pratiques bureaucratiques plus «absurdes qu'aberrantes émaillant la constitution du dossier de candidature aux élections prochaines». Jugez-en vous-mêmes: plusieurs pièces administratives ayant la même portée juridique sont exigées dans le dossier de candidature. «Juridiquement parlant, la carte nationale d'identité et le certificat de nationalité ont la même signification. Franchement, je ne vois pas l'intérêt d'exiger ces deux pièces dans le dossier de candidature» se révolte M.Tabbou. Celui-ci cite également le parcours du combattant auquel les candidats sont soumis pour l'obtention du casier judiciaire. «On est plus censé espérer obtenir un visa aux USA que de se voir délivrer un casier judiciaire», ironise le premier secrétaire national du FFS. Pis encore, même les imprimés d'extrait d'acte de naissance n°12 se font de plus en plus rares! Au Front des forces socialistes, on ne cesse de pointer d'un doigt accusateur le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales. Pour déposer le rapport du Congrès national auprès de ce ministère, «il nous a fallu faire des pieds et des mains. Le directeur des libertés publiques auprès du département de Zerhouni, est porté aux abonnés absents». «Au niveau de cette institution, il suffit qu'un des responsables s'absente pour que l'ensemble de l'appareil s'immobilise», regrette M.Tabbou qui préfère charger un huissier de justice pour remettre le courrier à l'Intérieur. Notons qu'au moment où nous mettons sous presse, le FFS a déjà remis son rapport au département de Zerhouni, accompagné du PV de la reconduite de Hocine Aït Ahmed à la présidence du parti, et de Karim Tabbou à la tête du secrétariat nationale du FFS. «L'administration use de tous les subterfuges afin de nous mettre les bâtons dans les roues, comme si elle voulait nous empêcher de participer aux élections. Mais on ne courbera jamais l'échine. On continuera à travailler contre vents et marées, parce que nous sommes un parti légaliste» souligne notre interlocuteur. Au FFS, comme les horaires diurnes ne suffisent pas, on continue à organiser des rendez-vous nocturnes. Le FFS, le diurne et le nocturne A plusieurs reprises, le premier secrétaire national était contraint de prolonger ses horaires de travail jusqu'à une heure tardive de la nuit. Cela est le cas de la réunion qu'il a tenue la semaine dernière avec les militants de la wilaya de Boumerdès et qui s'est poursuivie jusqu'à 1h du matin. «Nous allons créer la surprise», annonce Karim Tabbou, accompagnant sa phrase d'un sourire malicieux. Le premier secrétaire national du FFS dit en outre miser sur un autre cheval de bataille. Il s'agit d'éradiquer l'idée selon laquelle le FFS serait un parti régional et régionaliste. «Nous sommes ouverts à tous ceux qui acceptent d'adopter les idées du FFS. C'est la règle numéro1 pour adhérer à notre parti», explique M.Tabbou. Plusieurs députés ayant été exclus de leurs formations politiques d'origine, et voulant gagner les rangs du FFS, ont buté contre cette condition. Le premier secrétaire national du parti a indiqué que ces députés, au nombre de cinq, venant d'un parti politique siégeant actuellement à l'Assemblée populaire nationale, ont vu leurs candidatures refusées. Et pour cause: «Quiconque se propose de se porter candidat sur les listes de notre parti devra au préalable, signer la charte du militant. Ce que ces personnes, exclues de leur parti, n'ont pas eu le courage de faire», explique Karim Tabbou. «On n'a pas besoin de ce genre de personnes dans notre parti», tranche-t-il encore. S'agissant des militants des autres partis politiques voulant rejoindre les rangs du FFS au niveau local, Karim Tabbou dit préférer laisser l'appréciation à la base militante. C'est en fait dans ces conditions que le FFS se prépare pour les prochaines échéances électorales. Ainsi, après avoir boycotté les législatives du 29 mai dernier, le FFS revient...en force.