«Le soufisme n'est pas du folklore, encore moins une idéologie» expliquera à l'assistance, M.Saleh Zitouni... «Deux contraires ne peuvent se réunir: si tu es, il n'est pas, s'il est, tu n'es pas. Alors, abandonne ton existence et l'appel viendra à toi» disait le sage Cheikh El Alaoui, fondateur éponyme de la Tarika Alawiya. Ainsi, le soufisme tel qu'il est et non pas tel que l'on se l'imagine a été le thème d'une rencontre, mardi soir, au Théâtre de verdure Laâdi-Flici, à l'occasion des activités culturelles entrant dans le cadre du Ramadhan qu'organise l'établissement Arts et Culture. Aussi, Ce n'est pas fortuit si le 27e jour du Ramadhan a été choisi à cet effet. Cette soirée hautement spirituelle, organisée en collaboration avec l'association Cheikh El Alaoui pour l'éducation et la culture soufie a été animée par M.Saleh Zitouni, docteur en médecine et néanmoins fin érudit en la matière, qui s'attellera à définir ce qu'est et ce qui n'est pas en soufisme. Aussi, nous apprend-on: «Le soufisme n'est pas du folklore, encore moins une idéologie. Ce n'est pas non plus une religion, mais une religiosité. C'est un cheminement personnel qui conduit à Dieu. C'est un enseignement et un vécu.» Pour M.Zitouni, la religion telle qu'elle est comprise aujourd'hui dans le monde moderne porte en elle la violence. Or, le véritable soufisme n'est pas cela. C'est la simplicité, la sagesse, la tolérance, la passivité et la paix. M.Zitouni dont le maître à penser est Ahmed Ben Allaoui, fera remarquer que «le soufisme est le coeur de l'Islam, la saveur de l'Islam, autrement, l'Islam dans son vécu..» Et de renchérir: «Le soufi est un être simple qui sacralise la vie, n'a aucun problème avec les autres religions. C'est quelqu'un qui prône la paix. C'est la seule voie de la sagesse pour nous épargner de retomber dans les dégâts que les idéologies ont commis.» Si, le soufisme nous était enseigné dès notre enfance, M.Zitouni soulignera la multiplicité des supports multimédias qui existent aujourd'hui pour le faire connaître. Cependant, ajoute- t- il, «nous ne faisons pas de prosélytisme». Une idée partagée par cet intervenant qui fera distinguer que le seul but du soufisme est la quête de l'être vers Dieu. Parmi l'assistance, lors du débat qui a suivi la conférence, une autre remarque pertinente viendra de M.Meziani qui démontera par de menus détails historiques, que le soufisme est «un lieu de pouvoir unique par sa quête de connaissance». M.Zitouni, regrettera le fait que l'Islam soit aujourd'hui synonyme de violence. «Le soufisme est plutôt synonyme de fraternité et ceci ne date pas d'aujourd'hui.»Et un des membres du bureau de l'association Cheikh El Alaoui d'abonder dans le même sens: «Pourquoi le maître d'une école spirituelle vit en France, alors qu'ici les gens le demandent. Là-bas, on est beaucoup demandé mais les médias ne couvrent pas l'événement. Ils préfèrent sans doute véhiculer l'image du musulman barbu et violent et non celle du porteur de paix. On a organisé en France plusieurs manifestations du genre. Beaucoup de monde est venu, y compris Zinedine Zidane mais les médias ne sont pas venus. Pourquoi ce boycott?» Face à un monde de plus en plus matérialiste dans lequel la vie de l'homme se perd en sens de jour en jour, la tasawûf, la voie initiatique de l'Islam, propose, d'après l'association Cheikh El Alaoui, une éducation d'éveil qui tend à épanouir la conscience de l'être. Elle enseigne le respect de la création et la découverte, à travers elle, du mystère divin. L'histoire témoigne que le soufisme était et demeure la voie royale empruntée par les grands hommes de la tradition tels que Ali Hassen Al-Bassrî, Rabia al-Adawiyya, Avicenne, l'Emir Abdelkader...Poètes, philosophes, théologiens, écrivains et personnalités diverses se sont référés, inspirés et nourris de sa sagesse. La perte de cette culture -toujours d'après cette association-, source d'universalisme, de compassion et de retour vers soi, a appauvri et desséché la pensée du monde musulman actuel. Aussi, l'association El Alaoui préconise le retour aux valeurs universelles qui permettra de revivre un renouveau de la pensée, réaliser son unité, assumer son rayonnement et contribuer à la réconciliation de tous les hommes. Ainsi dans le cadre de la préservation de ce patrimoine, l'association Cheikh El Alaoui s'est fixé les objectifs de faire renaître l'héritage spirituel de l'Islam, enseigner les vertus mohammadiennes, donner une éducation coranique aux enfants et promouvoir l'esprit d'un Islam de paix et de progrès. C'est ce qu'il faut, en effet, si on ne veut pas retomber dans l'obscurantisme! Cette soirée était accompagnée d'une exposition-vente de livres sur le soufisme. Elle s'achèvera par une belle qaâda de chants soufis animée par la troupe El Aïssaoua de Mostaganem et les chorales d'Alger et Béjaïa qui ont enchanté l'assistance fort nombreuse, qui s'est déplacée en cette dernière soirée spécial Ramadhan. Une soirée propice qui annonçait les prémices de l'Aïd, dans la joie et le recueillement.