En visite en Libye, le chef de la diplomatie italienne, Massimo d'Alema, a indiqué que les deux pays travaillent à finaliser les derniers détails. Le ministre italien des Affaires étrangères, Massimo d'Alema, était samedi et hier en visite de travail à Tripoli où il a eu avec les représentants de l'Etat libyen des entretiens dominés par le traité que les deux pays négocient et qui doivent aboutir à un traité sur les compensations dues à la Libye lors de l'occupation italienne (1911-1943). En fait, un tel processus constitue une première entre anciens colonisateurs et colonisés. Selon le chef de la diplomatie italienne, les discussions seraient très avancées et il ne resterait qu'à finaliser certains détails. Il est, dès lors, probable que l'accord sur ce traité, inédit dans les annales de la colonisation, sera annoncé la semaine prochaine lors du séjour à Rome d'une délégation libyenne. Dans une déclaration à l'agence italienne Ansa, M.d'Alema, a indiqué depuis Tripoli que l'accord «n'est pas encore conclu» mais «nous sommes d'accord sur le principe et il s'agit maintenant de régler des détails», «un grand pas en avant a été réalisé». Le chef de la diplomatie italienne a, toutefois, admis que les discussions étaient «très complexes» et concernaient des questions «très sensibles». Le ministre italien qui a eu des entretiens avec son homologue libyen, Abdelrahman Chalgham, a indiqué d'autre part qu'une partie des pourparlers s'étaient tenus en présence du guide libyen, Mouamar El Gueddafi. Le 29 octobre dernier, lors d'un colloque portant sur les déportations de Libyens en 1911 et 1912 dans les îles italiennes de Termiti dans l'Adriatique, Massimo d'Alema a déclaré, cité par l'agence Ansa: «Nous avons des dettes envers la Libye, mais aussi un intérêt fondamental à renforcer nos liens avec ce partenaire essentiel.» Le ministre italien ajoutait: «Le moment est arrivé de faire un pas en avant supplémentaire, et j'espère que d'ici quelques jours, nous pourrons annoncer un grand accord entre l'Italie et la Libye.» M.d'Alema a encore dit que cet accord bilatéral servira à fermer «un douloureux chapitre du passé». Tout en faisant montre d'optimisme, M.d'Alema n'a cependant mentionné aucune précision concernant le montant ou la nature de ces compensations, si elles sont financières ou autre. La Libye a été occupée militairement par l'Italie à partir de 1911 avant de devenir, dans les années 1930, une colonie italienne. Elle a retrouvé son indépendance en 1951, après une brève période d'administration franco-britannique sous mandat de l'ONU, rappelle-t-on. Le contentieux italo-libyen sur la période coloniale n'a pas été sans créer des tensions entre les deux pays dont les relations voguaient au gré d'un dossier, certes difficile, sur la table depuis plusieurs années. Les négociations italo-libyennes sur un sujet aussi sensible que celui de la colonisation et des drames qu'elle a suscités brisent, en fait, ce que, jusqu'ici, les pays européens considéraient comme un tabou. L'avancée des négociations entre la Libye et l'Italie sur leur passé commun met en lumière la pusillanimité de la France qui se dérobe à ses responsabilités lorsqu'il s'agit d'aborder la question de la repentance par rapport à son passé colonial. Un passé qui a laissé beaucoup de blessures et fait beaucoup de mal à la société algérienne. Méprisant, le président français Nicolas Sarkozy a rejeté, lors de son passage à Alger le 11 juillet dernier toute idée de repentance refusant même de reconnaître les méfaits que le colonialisme européen, français singulièrement, a fait aux peuples africain et algérien en particulier. Des enfumades du Dahra en 1830-1835 au déplacement massif des populations lors de la guerre de Libération en passant par les massacres du 8 Mai 1945, le colonialisme français a laissé derrière lui des tragédies dont les plaies ne sont toujours pas cicatrisées. Aussi, dans cette affaire, la France qui a une dette envers le peuple algérien est loin d'avoir les mains propres et se doit d'assumer totalement son passé colonial. L'Italie donne aujourd'hui un exemple probant en reconnaissant ses responsabilités et en assumant cette page noire de son propre passé colonial. Cela n'efface certes pas ce passé, mais permet aux deux pays d'ouvrir une ère nouvelle et plus sereine. Il appartient aujourd'hui à Paris de faire les choix qu'il faut et le pas que Rome a su réaliser.