Le monde entier a décidé de célébrer durant toute cette année la patate. Purée! A nous tous qui ne comprenions pas pourquoi l'Algérie a souffert, le dernier semestre, de la rareté de la pomme de terre et de son prix allant jusqu'à la création d'un «office national de la Pomme de terre», l'explication du mystère de l'envolée de ce tubercule qui fît la Une des médias et faillit faire chuter le gouvernement est: l'ONU. Oui, l'Assemblée générale des Nations unies vient de déclarer à l'unanimité, l'année 2008, «Année internationale de la pomme de terre». Autrement dit, le monde entier vient enfin de reconnaître l'importance stratégique de ce légume dans la lutte contre la malnutrition, et a décidé de lui consacrer une promotion publicitaire durant toute l'année 2008. Des fêtes, des festivals, des rencontres et séminaires, peut-être même des films...élèveront tout au long de cette année la patate au rang de star mondiale. Est-ce à dire que le gouvernement algérien avait flairé le coup médiatique mondial qui se préparait au 1er janvier 2008, et a précédé l'événement en mettant sur pied le fameux Office? «La pomme de terre devrait faire partie intégrante des stratégies visant à fournir une alimentation nutritive aux populations pauvres et affamées» explique la déclaration des Nations unies. Quoi de ridicule pour le gouvernement algérien alors, de créer un «Office de la pomme de terre»? On pourrait même oser dire que notre gouvernement a fait en la matière de la politique prospective. Parce que l'ONU dit bien «la Pomme de terre, une alimentation nutritive pour les pauvres et affamés». A voir la crise politique, l'agitation du gouvernement et la campagne médiatique générées les six derniers mois de 2007 par la rareté de ce légume, nous sommes enclins à croire que nous faisons, peut-être, partie «de ces populations pauvres et affamées» dont parle l'ONU. L'Instance internationale autorise même l'utilisation du logo dessiné pour la circonstance par le graphiste italien Giancarlo de Pol. Trois pommes sur une assiette sous forme de trait, en dessous, des semblants de tubercules allongés. Ce dessin a été élu parmi des centaines, parce qu'il «symbolise le lien de l'humanité avec l'agriculture», estime l'ONU. Autre performance de ce tubercule lié dans l'imaginaire populaire aux classes pauvres, est son classement au top mondial des aliments les plus produits au monde: la 4e place messieurs! C'est pourquoi notre chagrin est d'autant plus grand devant son absence sur les étals de nos marchés (et dans nos champs). Double chagrin s'il en faut, puisque c'est au moment où sa production mondiale a atteint les cimes qu'il est venu à manquer chez nous. Pire! Les pays en voie de développement, dont nous faisons partie, produisent ces dernières années plus de patates que ceux dit développés et riches. En 2005, les pays en développement ont produit 161,5 millions de tonnes de patates contre 155,9 millions de tonnes chez les riches, marquant pour la première fois de l'histoire leur supériorité. Le rapport est le même pour 2006 avec une production de près de 318 millions de tonnes. On aura beau retourner la question, rien n'y fait. Le mystère du désamour de la patate avec nous demeure entier. Qualifiée de vraie pharmacie naturelle, les scientifiques disent qu'elle contient du potassium, du fer, du phosphate, du magnésium, des glucides, des lipides, des protéines, les vitamines B1, B2, C et bien d'autres bienfaits pour notre santé. Pour toutes ces raisons, joignons nos efforts à ceux de l'ONU, à ceux du monde entier, pour que la patate nous revienne en abondance et surtout à moindre prix. Pour cela, louons et glorifions ses noms si beaux et évocateurs: Claustar, Désirée, Nicola, Ratte, Charlo et Charlotte, Roseval, Bintje...elle se décline en plus de cent variétés. Cela mérite bien une majuscule pour son nom: Pomme de terre, imprimerons-nous durant, au moins, toute l'année 2008.