Devant la confusion qui règne sur la scène politique, les prochaines élections ouvrent des perspectives d'avenir pour les indépendants qui profitent ainsi de ce brouhaha politique afin de postuler à un poste de candidat aux législatives. Mais cette aventure politique n'est pas aussi évidente, puisque des «verrous» ont été déjà placés par l'administration pour empêcher toute personne appartenant à une tendance proche de l'opposition, qui n'est pas tolérée par le pouvoir, d'accéder à la tribune de l'Assemblée. Une entrave administrative qui a été dénoncée par le député Hadj Lahbib Guidoum, député indépendant, qui a adressé, il y a quelques semaines, une missive au ministre de l'Intérieur, M.Zerhouni, lui demandant de revoir la nouvelle formule qui consiste à obliger les signataires à venir en personne légaliser à l'APC les formulaires de soutien au candidat. La loi électorale du 15 mars 1997 relative au dépôt des candidatures pour les élections législatives stipule que le candidat doit fournir 400 signatures et que quelques-uns des signataires seront ensuite convoqués pour justifier ce soutien. Une formule qui a amené plusieurs personnes, qui n'ont pas de «tuteur politique», à se présenter aux législatives et à siéger à l'Assemblée. Pour certains de ces indépendants, leur élection est intervenue au terme d'une campagne grandiose qui visait à les faire connaître de la population et ainsi à se faire élire. D'autres, beaucoup moins nombreux, ont préféré se présenter dans des régions isolées et loin de la fureur des partis politiques pour faire une campagne sereine. Il existe, aussi une catégorie de candidats qui ont acheté des voix pour accéder à la tribune de l'APN. Aujourd'hui, les indépendants risquent d'être plus nombreux qu'en 97 et surtout plus menaçants pour les partis politiques au pouvoir. D'ailleurs, le SG du RND, Ahmed Ouyahia avait déclaré, lors d'une rencontre avec la presse, qu'il avait plus peur des indépendants que des autres partis. Une attitude justifiée par le fait que certains militants du parti dissous avaient affiché leur ambition de se présenter aux législatives. Une tendance islamiste qui sera aussi rejointe par certains éléments de l'AIS qui veulent ainsi faire leur come-back politique après un court «parcours de terroriste». Mais, devant les contraintes des signatures et les barrages administratifs, ces candidats «décriés» par une partie de la classe politique, ont décidé de se présenter sur les listes du mouvement Ennahda de Lahbib Adami. Autres candidats susceptibles de postuler comme indépendants, les députés appartenant à des partis qui n'ont pas encore obtenu d'agrément. C'est le cas, notamment, des députés qui ont rejoint le FD de Ghozali, comme Mohamed Meraoui, ou encore ceux qui ont créé le mouvement El Badil - Haider Bendrihem, Mohand-Arezki Ferrad - même si ce dernier avait affirmé dans un entretien dans l'hebdomadaire Ennour eldjadid qu'il ne se représentera pas aux prochaines élections. Ferrad, qui constitue le noyau dur de l'opposition à l'Assemblée, avait quitté le FFS, il se trouve aujourd'hui plus que jamais isolé politiquement. C'est le sort qui attend Tahar Benbaïbèche qui, après avoir été au sommet du RND et du pouvoir, se retrouve, pour des considérations personnelles et politiques, dans les abysses de la scène politique. Aujourd'hui, la plupart de ces députés restent indécis et ne semblent pas intéressés par une éventuelle représentation à l'Assemblée. C'est le cas des anciens ministres et ex-députés du RND Nouredine Bahbouh, Abdelaziz Benmhidi et Saïd Bendakir qui constituaient, à eux seuls, la force d'opposition à Abdelkader Bensalah, président de l'APN. Ces députés, qui bénéficient encore d'une grande estime, d'un grand respect et qui ont été «empêchés» de constituer un mouvement politique, peuvent prétendre à être des indépendants «éligibles». Certains partis qui manquent de figures politiques «populaires» n'hésitent pas à faire des appels du pied à ces personnalités «éligibles» pour les convaincre de rejoindre leur rang. Ce fut le cas de Khalida Messaoudi qui, exclue du RCD, fut approchée par le FLN et le RND pour renforcer leurs listes et surtout séduire l'électorat kabyle. Il n'est pas exclu, d'ailleurs, que certaines personnalités fortes du mouvement des ârchs tendance proche des dialoguistes puissent présenter des listes indépendantes en Kabylie et même dans la capitale. C'est le cas notamment de Salim Allilouche, l'ancien porte-parole des dialoguistes qui aurait «reçu l'assurance» d'être député. Mais le programme de ces partis, considérés comme proches du pouvoir, n'a pas convaincu ces personnalités politiques qui restent en rade en attendant que l'horizon politique s'éclaircisse un peu plus. Certains, qui ont déjà retiré les formulaires de candidatures, préfèrent attendre pour se prononcer officiellement sur les élections. Ils ont jusqu'au 25 avril pour déposer leurs listes. Mais, selon certaines informations, 25 indépendants ont déjà déposé leurs listes auprès des autorités concernées et d'autres risques de suivre d'ici à la fin du mois. Il est évident que devant le retrait des principaux partis des élections, et l'absence de figures politiques connues, le pouvoir pourrait être amené à ouvrir les portes aux indépendants et ce, afin de combler le vide des autres tendances et construire une opposition de «façade» à l'Assemblée pour faire face au pôle «bétonné» du FLN et du RND.