Présenté au dernier Festival de Cannes, le film Cartouches Gauloises, réalisé par Mehdi Charef, sera projeté en avant-première, mercredi prochain à 19 h, à la salle El Mougar. Organisée par le Département Cinéma de la manifestation «Alger, capitale de la culture arabe 2007», sous l'égide du ministère de la Culture, la projection du film, distribué par la société MD Ciné, sera rehaussée par la présence du réalisateur et du producteur algérien, M.Salem Brahimi. Un film autobiographique poignant, tendre, drôle, mais bouleversant. Un film personnel. C'est le printemps 1962. Le dernier printemps de la Guerre d'Algérie. Le printemps avant l'été de l'Indépendance. Ali, 11 ans, est vendeur de journaux. Son monde est celui de la guerre et de l'enfance. Dans son monde, il y a les attentats. Il y a l'apartheid. Il y a son père, un moujahid dont on il faudra dire qu'il est parti travailler en France. Il y a l'arbitraire et la violence de la «pacification». Il y a le cinéma où Ali va chercher la paix, récitant les dialogues de Los Olvidados qu'il connaît par coeur. Il y a les copains algériens qui se font rafler, exécuter...Il y a les copains français qui partent un à un en sachant qu'en France «y fait gris, tout le monde est triste et...ils aiment pas les youdes»...Il y a Djelloul, le harki qui fait si peur à Ali...L'homme sans pitié qui bientôt, fera pitié à Ali... Il y a Barnabé, le chef de gare, muté à Sarcelles où, c'est sûr, il n'est «pas près d'y revoir un Arabe ou un juif...» Il y a Zina, la pute de qui Ali est amoureux...Bientôt, elle fuira...mais qui voudra l'aider, à part peut-être Ali? Il y a Rachel, la voisine juive, qui -Indépendance ou pas! reste et dit préférer «mourir de la main des Arabes que d'être humiliée, là-bas, en France...» Elle sourit à Ali en lui disant: «Allez..., va à ton Indépendance...» Il y a l'amour d'une mère, d'une épouse, enveloppant son fils Ali d'affection, de force, de dignité en attendant le retour de la liberté, et avec, celui de «son homme»...Et il y a Nico...encore et toujours. Le copain cruel aussi qui hurle, quand Ali y dépose le drapeau de l'Algérie: «Vous êtes tous des fourbes! La cabane, elle est à moi aussi!» Nico, le copain qui ne «partira jamais». Jamais? Le titre du film correspond également à un souvenir d'enfance du réalisateur: «Quand j'ai commencé à vendre des journaux dans les bistrots, tous les soldats fumaient tellement ils étaient stressés. Ils avaient des cartouches entières gratuites...Et puis Gauloises parce que c'est l'histoire de la France, les Gaulois, comme on nous apprenait à l'école.» Et d'ajouter lors d'une interview accordée à L'Expression: «La dimension autobiographique n'est nullement absente, l'enfance te submerge d'images où la tendresse et l'émotion t'affectent. Je raconte, certes, à travers le regard de cet enfant, l'indicible qui exprime une sorte de mémoire intérieure.» Pour réaliser ce film, Mehdi Charef a dû se replonger dans des souvenirs d'enfance qu'il a longtemps occultés, ce qui n'a pas été sans douleur, même s'il avoue l'avoir portée depuis très longtemps. «Je suis allé dans quelque chose que j'avais vécu très fortement, très douloureusement. Non seulement je la revivais, mais j'étais là, à le recréer, avec des acteurs et des techniciens. Et je l'avais voulu.» Après Le Thé au harem d'Archimède, qui a vite séduit l'un des plus grands cinéastes français, Costa Gavras -Il aidera le réalisateur à mettre en images ce texte de fiction qui va remporter le César du premier film et le prix Jean Vigo-, voilà que le succès se profile de nouveau à l'horizon pour notre cinéaste. Aujourd'hui Mehdi Charef se sent mieux après avoir fait ce film. Il confie: «Vous savez, ce film est finalement une thérapie pour beaucoup de monde et cela se confirme avec les témoignages des pieds-noirs ou des militaires français. Certes, j'ai mis longtemps à le faire et j'ai beaucoup souffert de cette déchirure, mais aujourd'hui je me considère comme indemne, car je me suis réconcilié avec mon passé. Cette réconciliation avec le passé, l'enfance, les espaces identitaires, fonctionne comme une véritable libération, une extraordinaire charge cathartique». Un film que l'on vous conseille vivement de voir. Aussi Md Ciné vous convie aussi à assister à la projection d'un autre film, La vengeance dans la peau, au cinéma L'Algéria à partir de samedi 12 janvier, à raison de 3 séances: 13h, 15h 30, 18h 30 et ce pendant trois semaines.