Les responsables locaux se basent sur des textes réglementaires pour expliquer la révision des listes des bénéficiaires des indemnisations. Cinq mois après les tragiques inondations de Bab El-Oued, les 425 commerçants du désormais ex-marché de Triolet demeurent dans l'attente des indemnisations promises par les pouvoirs publics. Hier, une centaine d'entre eux s'est donné rendez-vous à proximité de ce lieu - qui sera converti en théâtre de verdure d'après les projets de la wilaya d'Alger - le temps «d'un rassemblement pacifique et non politique», dira M.Téfaoui, porte-parole de l'association du marché. Précision de taille, elle expliquerait l'absence d'un dispositif de sécurité spécial, tel celui déployé dans les derniers sit-in et tentatives de marches. Sur les banderoles, on pouvait lire: «Les sinistrés de Triolet attendent les promesses de l'Etat», «Les 426 commerçants de Triolet exigent les indemnités». Ce chiffre des locataires du marché en question n'est pas fortuit et semble même être à l'origine du bras de fer entre ces derniers et les responsables locaux. En effet, selon M.Téfaoui, la commission d'enquête, installée au lendemain des inondations, a décidé d'exclure la moitié des commerçants des listes des bénéficiaires des indemnisations. Du fait, 285 commerçants seulement seront évacués vers les nouveaux locaux qui sont en voie d'achèvement au niveau du parking Saïd-Touati, près du marché Triolet. Cette situation inquiète les commerçants, la peur se lisant, hier, sur les visages. «Mon étal était ma seule ressource financière. Je nourris ma famille grâce à la solidarité des proches et des amis. Exclure des listes des bénéficiaires serait une catastrophe», avance un sexagénaire installé plus de vingt ans dans cet endroit. Un jeune l'interrompt: «Nous demandons aux autorités de respecter leurs engagements. Les commerçants de Triolet sont solidaires et refusent toute exclusion.» Contacté par nos soins, le président de l'APC de Bab El-Oued préfère parler de «révision des listes» plutôt que d'exclusion. «Même s'il est vrai que nous avons recensé près de 425 étals au lendemain de la catastrophe, nous tenons à préciser que seuls les commerçants n'ayant comme unique ressource financière que ces étals seront indemnisés.» Les responsables locaux se basent sur des textes réglementaires interdisant la distribution des étals au niveau des communes aux catégories exerçant une activité commerciale parallèle. «Des textes piétinés par l'APC de Bab El-Oued du temps de l'ex-FIS», dira M.Ben Amar. Résultat: bâti initialement pour accueillir 50 commerçants, Triolet regroupait le jour de la catastrophe 500 étals. La situation n'est pas perçue sous le même angle du côté des commerçants qui «disent avoir le droit à des indemnisations dans la mesure où l'APC n'est pas intervenue auparavant pour signaler l'effraction». La position des responsables locaux demeure ferme. «Nous refusons le chantage», dira M.Ben Amar, expliquant que la commission d'enquête n'a pas encore achevé son travail. «Nous n'avons aucun problème de locaux. Nous en distribuerons 500 si nous estimons que l'opération l'exige», assure ce dernier qui dénonce, à l'occasion, ce qu'il a appelé «la manipulation politique de certains cercles occultes à l'approche des législatives». L'on note que les premiers commerçants au nombre de 285 bénéficieront, très prochainement, de nouveaux locaux à Saïd-Touati. Pour les autres, ils devront patienter encore. Le temps que les services concernés achèvent les enquêtes. Une opération qui n'a que trop tardé «et qui serait due à la complexité du dossier», conclut M.Ben Amar.